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Appel du Comité des habitants de Felloudja au Royaume Hachémite de Jordanie


ITRI INSTITUT TUNISIEN DES RELATIONS INTERNATIONALES

Publié par Candide le 3 juillet 2017 dans Chroniques

Appel du Comité des habitants de Felloudja au Royaume Hachémite de Jordanie

Aux Hommes de bonne volonté, respectueux de la dignité humaine

22 avril 2004
Traduit de l’arabe par Ahmed Manai
http://www.tunisitri.net/

Ce qui se produit actuellement en Irak, en terme de catastrophes et d’atteintes aux droits de l’homme de la part des forces d’occupation s’est exacerbé jusqu’à atteindre le degré de catastrophe humanitaire, à l’exemple de ce qui se produit à Felloudja. Car depuis que les forces d’occupation ont foulé le sol de l’Irak sous différents couverts, tels que la neutralisation des armes de destruction massive et autres mobiles fallacieux, et après que les masques sont tombés, ces forces ont mis en place un médiocre Conseil qui regroupe nombre d’éléments douteux, aussi bien sur le plan moral que financier, et jusqu’aux criminels de guerre. Ce qui a été à l’origine de la montée de la répulsion, de l’absence de confiance et de la réticence et défaut de collaboration du peuple irakien avec ce Conseil, jugé comme étant le produit et l’instrument de l’occupation, dont la mission se résume à l’application des plans de cette occupation et dont le seul marchandage auquel il s’adonne est la promotion de son pouvoir et ses intérêts contre les intérêts du peuple irakien. Plus grave encore, une partie des membres composant ce Conseil est allée jusqu’à éliminer physiquement, des Oulémas et chefs dans les différentes souches de la société en vue de provoquer la discorde religieuse. La meilleure preuve réside dans le fait qu’ils ont décidé de mettre en place ce Conseil sur la base de considérations religieuses pour asseoir ce plan.
Le peuple irakien a-t-il le droit d’exprimer son avis et de trancher dans les questions qui concernent son avenir ou doit-il se soumettre aux lois de la jungle telles que conçues par ses agresseurs ? Sur quelles bases considère-t-on le soulèvement du peuple irakien, dans ses villes principales, comme étant du « terrorisme » et non une véritable résistance en même temps que l’on rattache les graves atteintes aux droits l’homme commises par les forces d’occupation à une démocratisation américaine et non au terrorisme d’Etat ? N’est-ce pas là un vrai scandale ?
Les forces d’occupation doivent admettre que le peuple irakien est en droit de résister face à tout ce qui touche à sa dignité et sa souveraineté en accord avec ce que reconnaît le droit coutumier et le droit international en matière de droit des peuples à résister par tous les moyens universellement reconnus.
Le meilleur exemple de ce qui est évoqué, ci-dessus, est que l’entrée des forces d’occupation dans la ville de Felloudja s’est faite suite à un accord pacifique entre ces forces et les habitants de la ville qui prévoyait que les troupes ne soient pas stationnées dans la ville. Mais les forces d’occupation ont rapidement transgressé cet accord en prenant pour siège une école primaire, puis ont commencé à violer les domiciles privés et porter atteinte à la dignité des habitants. Révoltés par ces méthodes, les habitants sont descendus à la rue, dans une marche de protestation. La première marche de contestation démocratique n’eut alors pour seule réponse démocratique de la part des forces américaines que de provoquer la mort de treize personnes parmi les manifestants et d’en blesser des dizaines d’autres. Une seconde manifestation, a eu lieu le lendemain, pour dénoncer ces crimes et la seconde réponse démocratique s’est soldée par trois morts et cinq blessés.

C’est donc la multiplication de tirs gratuits contre les civils qui a été le détonateur de la spirale de violence, non seulement à Felloudja mais dans tout l’Irak, comme le reconnaissent certains chefs militaires et politiques américains. Et, parce que le peuple irakien est très attaché aux traditions tribales et religieuses conservatrices pour lesquelles la question de la vengeance est essentielle, les victimes doivent être rétablies dans leur droit que ce soit par la loi ou par les us tribaux.

Cette situation est aussi le résultat concret de l’obstruction faite au droit pour l’empêcher de remplir son rôle, de la part des forces d’occupation qui ont entrepris plusieurs séries d’arrestations arbitraires aux seuls motifs de soupçons et parfois même pour cause d’un regard inamical, ou pour utiliser les détenus comme moyen de pression sur la population. Les arrestations furent conduites au moyen de méthodes des plus terrifiantes. Sans le moindre égard aux femmes, enfants et personnes âgées, des bombes ont été employés pour ouvrir les portes, alors qu’il était inconcevable que les habitants refusent de les ouvrir. Des bombes assourdissantes ont été aussi utilisées, sans compter les formes de mépris envers les habitants qui sont considérés dans les traditions de Felloudja, comme de tout l’Irak, la première atteinte aux droits. Toute patience a ses limites, et la patience des Irakiens n’a que trop duré.

Les campagnes de reconstruction sont devenues un moyen d’enrichissement rapide et de dilapidation programmée des richesses de l’Irak. Car il est à noter, que pour Felloudja, trois millions sept cent mille dollars ont été dépensés sans qu’aucune amélioration ne soit ressentie par les habitants qui continuent à souffrir. La réaction des habitants de Felloudja et de tout l’Irak, refusant l’occupation et demandant le départ des occupants, est aussi assez liée à cet aspect de la crise.

Les demandes des habitants de Felloudja étaient des demandes qu’il était facile de satisfaire et non des requêtes irréalisables. Elles n’eurent pour réponse que la mise en place d’un siège des plus durs sous prétexte de pourchasser ceux qui ont mutilé les corps des quatre américains alors que, selon notre avis, de sérieux doutes persistent sur ce qui s’est réellement passé et sur ceux qui étaient derrière cet acte et bien qu’il était possible de régler cette question par les voies juridiques en présentant les responsables de ce crime devant les tribunaux locaux. Au lieu de cela c’est une véritable boucherie qui s’est produite, pourtant c’est avec fermeté que nous avons condamné les crimes en question considérant qu’ils sont contraires à nos valeurs islamiques et arabes ancestrales.
Pour mieux saisir la réalité de ce qui s’est produit à Felloudja il est nécessaire d’exposer les étapes qui ont conduit à ces souffrances et à cette tragédie humanitaire :
La fermeture de tous les points d’accès à Felloudja (13 points d’accès) dans toutes les directions. Ce qui a été à l’origine de calvaires et de difficultés pour les habitants pour rentrer ou sortir de la ville.
L’hôpital général de la ville et l’hôpital jordanien ont été placés dans la partie située en dehors du périmètre du siège de la ville. Ce qui nous a empêché de bénéficier de leurs services et de fournir les services d’urgence. Il est même fort probable que le nombre des victimes parmi les civils n’aurait pas atteint ce chiffre important sans le concours de ce dispositif sauvage qui était prémédité.
L’aide humanitaire a été l’objet de plusieurs obstacles et interdictions qui ont bloqué l’acheminement de toute forme de secours afin d’étrangler la population de la ville et d’en tuer le plus grand nombre.
La fuite de la ville par près de 40 % des familles pour échapper aux bombardements intempestifs de l’aviation et aux tirs sauvages des snipers qui n’épargnaient ni secouristes ni simples civils, fussent-ils des enfants, femmes ou vieillards.
L’intensification des bombardements sauvages même lors des trêves avec utilisation des bombes à fragmentation non conventionnelles pour causer le plus de dommage possible parmi la population de Felloudja. Un crime qui revêt un aspect barbare d’une rare égalité dans l’histoire contemporaine.
Le calvaire vécu par un grand nombre de familles empêchées de sortir de leurs maisons en raison des snipers sauvages qui tiraient à tort et à travers, malgré l’épuisement des réserves d’eau et de nourriture et l’impossibilité de prendre en charge les blessés et malades dans leurs domiciles. Ce qui constitue de flagrantes atteintes aux droits humains.
L’attaque des véhicules de secours, la destruction de pas moins de neuf voitures et la mort d’un grand nombre de chauffeurs et secouristes. Ce qui a diminué les capacités de présenter les premiers secours et soins aux blessés et malades.
L’interdiction d’enterrer les morts dans l’unique cimetière de la ville ce qui nous a conduit à les enterrer dans un terrain de sport, transformé à l’occasion en un cimetière témoin de ce crime sans commun. Sans compter l’enterrement des corps qui n’ont pu être évacuées dans les jardins des maisons.
Les coupures totales d’eau et d’électricité et la mise en panne en conséquence des services qui comptent sur l’électricité et l’empêchement d’arrivée du carburant.
Les martyrs parmi les civils qui sont tombés dépassent le nombre de 800 victimes, dont la majorité est constituée de femmes, enfants et vieillards. Ce chiffre ne prend pas en compte les victimes que nous n’avons pu comptabiliser en raison d’impossibilité d’accès à certains endroits. Parmi ces dernières, certains corps ont été enterrés par leurs proches et d’autres ont été la proie d’animaux, et n’ont pas été formellement déclarés ce qui nous permet d’estimer à pas moins d’un millier le nombre de civils tués. Le nombre de blessés a atteint, au jour d’aujourd’hui, un total de plus de 1900 personnes blessées, dont la majorité sont des enfants, femmes et personnes âgées.
De ce qui précède, nous pouvons dire que le massacre de Felloudja continuera tant que les instances internationales n’interviennent pas pour mettre un terme à ce bain de sang. Si elles demeurent dans leur inaction il est même fort probable que nous vivions les prochains jours une nouvelle boucherie qui sera loin de s’arrêter aux seules frontières de Felloudja.
Le monde doit savoir que les rivières de sang donnent naissance à des fleuves de sang et que Le Tout Puissant est du coté des faibles.

Comité des habitants de Felloudja dans le Royaume Hachémite de Jordanie
Email : muhtaq72@yahoo.com
Thuraya : 00 88 21 65 20 72 291
Amman. Mobile : 07 96 81 51 07

Remarque : Nous prions toute personne qui reçoit cette lettre des habitants de Felloudja de la transmettre aux différents médias et aux instances internationales et régionales des droits de l’homme, afin de briser le blocus médiatique qu’on nous impose.
Traduit de l’arabe par Ahmed Manai
http://www.tunisitri.net/

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