Après la reprise de Mossoul : le retour de la résistance irakienne
février 12, 2017
Publié par Gilles Munier sur 12 Février 2017,
Catégories : #Irak, #Etat islamique, #Etats-Unis, #Kurdistan, #Syrie, #Daech
Le général Mattis, nommé au Pentagone, veut écraser l’Etat islamique à Mossoul et à Raqqa
Par Gilles Munier/
En décembre dernier, le général Stephen Townsend, commandant la coalition américaine en Irak, pensait en finir avec l’Etat islamique à Mossoul dans « quelques semaines, voire un ou deux mois ». Maintenant, il parle de six mois. Plus près des réalités du terrain, Maytham al-Zaïri — superviseur général des Unités de mobilisation populaire (Hachd al-Chaabi) – espère que « la bataille contre Daech ne s’étendra pas au-delà de 2018 ».
Fin février, le général des Marines James Mattis, nommé au Pentagone, doit remettre à Donald Trump son plan d’élimination de l’Etat islamique. Ceux qui se souviennent de son rôle dans l’opération Phantom Fury, en novembre 2004, pour reprendre la ville de Falloujah – alors surnommée « capitale de la résistance irakienne » – s’attendent à l’utilisation d’armes interdites et à de nouveaux massacres. Cela dit, il faut préciser que le général estime que l’intervention américaine en Irak était une « erreur stratégique ». Pour lui, le véritable ennemi des Etats-Unis : c’est l’Iran.
S’il ne fait aucun doute que l’offensive pro-occidentale sur Mossoul et Raqqa mettra un terme à l’emprise de l’EI sur ces villes, cela ne veut pas dire que l’organisation djihadiste disparaitra. En Irak, elle se trouvera alors en concurrence avec l’Armée des Hommes de la Naqshbandiya (JRTN), loin d’avoir disparue, et avec les Brigades de la Révolution de 1920 dont les cellules dormantes ont été réactivées.
Izzat Ibrahim al-Douri, chef du parti Baas clandestin et de la JRTN, dont plusieurs membres ont été arrêtés et exécutés par l’EI depuis la prise de Mossoul en 2014, n’a pas dit son dernier mot. Ses moudjahidine soufis ont affronté l’EI et les forces gouvernementales à plusieurs reprises. Si Mossoul et Raqqa tombent, les militants baasistes, ou islamo bassistes qui – volens nolens – ont prêté allégeance à Abou Bakr al-Baghdadi changeront de camp.
L’Association des Oulémas musulmans (AMSI), dirigée par Muthana al-Dari – qui a succédé à son père Harith, décédé l’an dernier en Turquie – avait mis en sommeil ses Brigades de la Révolution de 1920, suite à de rudes combats l’opposant à Al-Qaïda en Irak (AQI). Elle va les relancer pour contrer l’influence grandissante des milices chiites qui recrutent des combattants parmi les tribus sunnites.
Vers de nouvelles tensions
Le régime de Bagdad ne proposant aucune solution politique au chaos, la tenue des prochaines élections provinciales, fixées en septembre, va exacerber encore une fois les tensions ethniques et religieuses, et revivifier son opposition.
Le Parti démocratique du Kurdistan (PDKI) menace de boycotter le scrutin, et Massoud Barzani de proclamer l’indépendance de sa région si Nouri al-Maliki revient au pouvoir à Bagdad… quelles qu’en soient les conséquences.
Des signes de relance des activités d’Al-Qaïda en Irak ont été détectés dans la région de Samarra, de Tikrit et dans le djebel Hamrin. Elles font sans doute suite à la demande d’Ayman al-Zawahiri – successeur d’Oussama Ben Laden – à Abou Mohammed al-Joulani, chef du Front al-Nosra en Syrie, d’aider la structure irakienne à poursuivre le combat.
Depuis, Al-Nosra a pris ses distances avec la centrale afghano-pakistanaise et a changé de nom. Al-Joulani s’est effacé devant Hashem al-Sheikh, un ancien commandant d’Ahrar ash-Sham, pour participer, fin janvier, à la fondation de Hayyat Tahrir al-Sham (HTS) (Assemblée pour la libération du Sham). Le Harakat Nour al-Din al-Zenki et Jabhat Ansar al-Din, les ont rejoints. Il faut maintenant s’attendre à ce que d’autres organisations leur emboitent le pas. Dans la perspective de la chute de Mossoul, ce regroupement anti-Baghdadi ne pourra que renforcer AQI pour concurrencer les réseaux clandestins de l’Etat islamique dans les régions de Ninive, d’Al-Anbar et de Diyala. Affaire à suivre…