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Lettre à un ami américain : Trump sur les traces de Bush


Cher ami, notre amitié est née dans un pays qui n’est pas le nôtre. Je me souviens de ta fierté d’appartenir à un pays qui a été dirigé par un jeune et beau président, assassiné par des forces occultes. Et sans doute pour consolider notre amitié naissante, tu avais ajouté avec la même fierté que ce même président avait reçu à la Maison Banche le premier président de l’Algérie qui venait de se libérer.

Notre amitié a ainsi perduré, résistant au temps qui s’écoule et à la distance qui sépare nos deux pays. Dans nos échanges épistolaires, tu ne manques jamais l’occasion de me demander ce que je pense de la politique de ton pays. Aujourd’hui que l’actuel président des Etats-Unis, Donald Trump qui est aux antipodes de John Kennedy tant sur le plan intellectuel que celui de la stature d’homme d’Etat, vient d’agresser la Syrie, tu aimerais savoir ce que je pense de ce président ‘’atypique’’.

Cher ami, tout d’abord et en vérité, ton pays n’a jamais retenu les leçons de ses ingérences et de ses déboires dans les affaires des autres pays. Sans remonter à Mathusalem, le monde entier avait retenu son souffle quand le général Mac Arthur en 1953 menaça de jeter une bombe atomique sur la Corée du nord pour éviter la débâcle de son allié Sud-Coréen. Quelques années auparavant, les Etats-Unis avaient osé raser avec des bombes atomiques deux villes du Japon. Quelques années plus tard, c’est au tour du nord Vietnam d’être soumis à des tapis de bombes qui l’ont ravagé. Non, les gouvernements américains n’ont pas retenu la leçon car après leurs défaites en Asie, ils ont aidé des forces médiévales à bouter l’ex-URSS de l’Afghanistan. Leur chef d’œuvre enfin, ils ont voulu exporter la ‘’démocratie’’ non en proposant le modèle de la grande constitution américaine mais en débarquant leur dite ‘’démocratie’’ de leurs chars dans des pays qui sont aussi vieux que le temps lui-même.
Vers un confort visuel inégalé…

Cher ami, je ne mets évidemment pas tous les Américains dans le même sac. Souviens-toi, je t’ai déjà parlé d’une journaliste américaine qui travaillait pour un journal alternatif à l’époque des Black Panthers. Ma rencontre avec cette Américaine et notre propre amitié née sur les pavés de Paris, m’ont évité d’avoir un jugement sommaire sur les Américains et leur Histoire. Cette journaliste, d’une grande culture, voyageait dans le monde arabe pour essayer de comprendre le lien éventuel entre la lutte des Noirs américains et celles des autres peuples qui souffrent de la politique américaine.

Le 11 septembre 2001, les Etats-Unis ont été victime d’un acte que le plus futé des scénaristes n’aurait pu imaginer. La réaction de ton pays a été immédiate, rendre gorge à ces effrontés qui l’ont blessé. Ils sonnèrent alors les trompettes de Jéricho orchestrées par des aventuriers médiatiques recrutés un peu partout dans le monde. La guerre cache en général des dessous inavouables. Avec ce 11 septembre, des imbéciles lui ont fourni une raison d’entrer en guerre. Enivrée par sa guerre légitime contre une bande de criminels, l’Amérique ne s’arrêta pas en chemin et alla chercher des noises à un pays voisin, l’Irak pour faire plaisir à ses amis de la région qui sont loin d’être des parangons de la vertu.

En Irak que la majorité des Américains croyait être un désert sans passé ni héritiers, ils ont fait connaissance avec ce pays en semant la cruauté et la haine, en faisant couler des rivières de sang, bref en saccageant le pays et en mutilant ses habitants. Dans le paysage lunaire labouré par leurs armées, leur proconsul à Baghdâd décréta la dissolution de l’Etat du pays conquis. Tragique erreur et stupide décision que les enfants de l’Oncle Sam allaient en payer le prix. L’oncle Sam ayant superficiellement étudié l’histoire de cette région, pensa qu’il allait dépecer l’Irak comme le firent la France et l’Angleterre en 1916. L’oncle Sam oublia deux choses simples. Primo que l’ère de Laurence d’Arabie était révolue. Secundo que les USA allaient affronter un peuple qui avait jadis opposé une résistance farouche, d’abord au ‘’flamboyant’’ empire Ottoman, ensuite à l’empire où le soleil ne se couche jamais, je veux parler de l’Angleterre, la perfide Albion.


Prisonnier de sa réelle puissance militaire, de son pragmatisme légendaire et de son ignorance de l’histoire, l’Oncle Sam élabora le scénario d’un film. Mais la guerre, ce n’est pas Hollywood, c’est de l’intelligence, une pensée et une cause qui doit être juste. La guerre en Irak se solda par un fiasco total. Des milliers de milliards de dollars engloutis, des centaines de milliers de morts et de blessés. Cette défaite à ne pas douter participe au déclin de la suprématie américaine. Les USA se sont débarrassés d’un Saddam Hussein pour le remplacer par d’autres Irakiens amis de l’Iran, un pays ennemi juré de l’Amérique. Et cerise sur le gâteau, en exploitant un différend théologique entre Irakiens, ton pays a commis une faute politique qui engendra un cadeau empoisonné pour le monde entier, un monstre dénommé Daech.

La CIA n’était pas à ses premiers coups fourrés et autres bévues. Elle avait déjà renversé l’Iranien Mossadegh en 1953, nationaliste tranquille et inoffensif bourgeois qui osa nationaliser le pétrole de son pays. Quelques décennies plus tard, l’Amérique trouva en 1978 en face d’elle dans ce même pays, l’Ayatollah Khomeiny, adversaire autrement plus redoutable. Que réserve le futur à cette Amérique qui a pendu l’Irakien Saddam Hussein en 2006 ? D’ores et déjà les nuits de Trump sont agitées car le vide créé par la disparition de Saddam l’Irakien est rempli par le trop plein des Iraniens grands joueurs d’échec. La CIA se croit toujours plus maline que des peuples façonnés par l’histoire dont les dirigeants pour dictateurs qu’ils puissent être ne sont point démunis de rationalité. A ce propos, Trump qui passait pour un impulsif, un narcissique et même pour un ‘’fou’’ auprès de ces journalistes voix de leurs maître, apparaît aujourd’hui aux yeux des mêmes plumitifs comme un président qui a mis son courage au service d’une vision du monde. Et c’est le président syrien qui serait irrationnel pour l’unique raison qu’il est un dictateur. C’est à ce genre de raisonnement que l’on devine le futur déclin d’un système. Ces idéologues d’un genre nouveau ne savent que tôt au tard, Trump, en jouant le rôle de l’arroseur sera arrosé comme son prédécesseur Bush. Mais faisons confiance à ces plumitifs quand Trump sera arrosé, ils trouveront encore quelque chose pour faire oublier leur mensonge et leur veulerie.

Cher ami, ne pense pas que je suis sévère ou injuste avec ton pays. Mon jugement a été nourri par mes lectures des grands noms de la culture américaine dont j’admire le talent et la lucidité sur leur propre société. Je pense notamment à ces ciseleurs des mots comme William Faulkner, John Steinbeck, Francis Scott Fitzgerald, Dos Pasos, les talentueux cinéastes, Cassavetes, Kubrick, Ford, Capra, les envoûtants musiciens de jazz (Louis Armstrong, Archie Shepp). Tous ces intellectuels et artistes ont chanté leur pays et beaucoup d’entre eux n’oubliaient pas d’avoir parfois la dent dure contre leur propre société. Ah l’Amérique, capitale New York et ses arrogantes tours taquinant le ciel… monstres d’acier et de verres, temple de l’art et de l’argent, ont fait de cette ville la métropole du monde, une ville dont le cœur ne cesse de palpiter de jour comme de nuit. Une ville où siège l’Organisation des Nations unies que l’on voudrait voir remplir le rôle pour lequel elle a été créée, pour assurer la paix et rendre justice à des peuples opprimés, celui de la Palestine par exemple.

Cher ami, je veux terminer ma lettre en citant un écrivain que tu m’as fait connaître. C’est Dos Pasos, un grand écrivain américain que j’admire depuis et qui a écrit cette phrase qui est restée gravé dans mon esprit : « L’Amérique notre nation a été vaincue par des nouveaux venus qui ont acheté les lois… et fait suer notre peuple pour s’enrichir ».

Je te laisse le soin de mettre les noms des gens qui ont acheté les lois qu’ils imposent au peuple américain et par extension dans les affaires du monde.

Ali Akika, cinéaste

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