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La « stratégie du pire » de Trump qui a fonctionné avec les Corées pourra-t-elle marcher au Moyen-Orient ?


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The Huffington Post

13/05/2018
Donald Trump sera représenté par sa fille en Israël ce lundi, mais les tensions autour du déménagement n’en soient pas moindres.

Par Jade Toussay

Ronen Zvulun / Reuters
La stratégie du pire de Trump qui a fonctionné avec les Corées pourra-t-elle marcher au Moyen-Orient ?

INTERNATIONAL – Tandis que Donald Trump et Benjamin Netanyahu se félicitent, le reste du monde retient son souffle. Ce lundi 14 mai, l’ambassade des Etats-Unis en Israël est officiellement transférée de Tel-Aviv à Jérusalem. Une décision qui inquiète la communauté internationale et qui illustre une nouvelle fois la stratégie du « coup de poker » que mène Donald Trump avec un certain succès… pour l’instant en tout cas.

Entre sa « diplomatie du tweet » et ses menaces belliqueuses, Donald Trump a totalement rompu avec les pratiques de ses prédécesseurs sur le plan international. Une véritable « stratégie du pire » ou du « coup de poker » qui n’a pourtant pas été inefficace. L’exemple le plus évident? La rencontre « historique » entre Trump et Kim Jong-Un prévue le 12 juin prochain à Singapour, organisée après une escalade de violences verbales sans précédent entre les deux hommes.

Fort de cette première réussite coréenne, Donald Trump a décidé d’appliquer la même stratégie au Moyen-Orient. Et son dernier coup de force a été la reconnaissance de Jérusalem comme capitale d’Israël, et le transfert de l’ambassade le jour des 70 ans de la création de l’Etat hébreu. Mais de l’avis de nombreux experts, ces décisions vont à l’encontre des intentions de paix dans la région du président américain. Et après le retrait des Etats-Unis dans l’accord sur le nucléaire iranien, ce déménagement pourrait bien être l’étincelle qui embrase la région.

Au Moyen-Orient, la multiplicité des acteurs complique la donne

Si Kim Jong-Un peut le plus souvent compter sur le soutien de Pékin, aucun pays n’est directement impliqué sur le territoire nord-coréen, ni n’entretient de relations économiques fortes avec lui. Une particularité qui a permis à Donald Trump de mener le jeu quasiment en tête-à-tête avec le leader nord-coréen, illustration de la politique unilatérale qui le caractérise, comme l’explique au HuffPost Brahim Oumansour, chercheur associé à l’IRIS et spécialiste de la politique étrangère des États-Unis en Afrique du Nord et au Moyen-Orient.

« Donald Trump veut montrer à son électorat que les Etats-Unis décident seuls et non pas en concession avec qui que ce soit. Il utilise donc des diffusions unilatérales (comme ses déclarations au pied levé sur Twitter, ndlr) qui aboutissent à des négociations bilatérales avec le pays concerné ». Dans le cas nord-coréen par exemple, il n’a pas consulté le Japon, qui est pourtant un allié et l’un des premiers concernés par le développement du programme balistique coréen.

Mais au Moyen-Orient, appliquer cette politique est bien plus délicat. « Il y a davantage d’enjeux, tout d’abord parce qu’il y a des acteurs régionaux qui sont directement liés », analyse Brahim Oumansour. La volonté de déménager l’ambassade a d’ailleurs provoqué des réactions consternées de plusieurs pays de la région, de la Turquie, qui a jugé la décision américaine « extrêmement préoccupante » à l’Egypte, en passant par l’Arabie Saoudite où le roi Salmane a mis en garde Donald Trump contre « un pas dangereux » susceptible de provoquer « la colère des musulmans. »

Le Moyen-Orient est une poudrière (sur laquelle Trump souffle le chaud et le froid)

Depuis son arrivée au pouvoir, Donald Trump a clairement identifié ses amis et ses ennemis au Moyen-Orient. En choisissant de se rendre en Arabie Saoudite puis en Israël pour son premier voyage officiel, le président américain a en effet donné le ton, revenant aux relations traditionnelles américaines, à l’opposé de Barack Obama qui avait au contraire tenté de jouer sur l’équilibre des puissances régionales.

Mais ce faisant, il a aussi pris parti frontalement dans les conflits régionaux. Et dans une région où les alliances sont mouvantes, cette technique peut s’avérer très risquée. « L’alliance entre l’Arabie Saoudite et Israël peut-elle tenir aujourd’hui? Elle existe parce que pour l’instant, il y a un ennemi commun qui est l’Iran. Mais est-ce que demain, en reconnaissant Jérusalem comme capitale, il n’y aura pas une pression de l’intérieur en Arabie Saoudite contre la décision de Mohammed ben Salmane, prince héritier et vice-Premier ministre saoudien, de s’allier avec Israël? Jusqu’où ses alliances peuvent-elles aller? », interroge Brahim Oumansour.

Or, au Moyen-Orient, où de nombreux pays entament à peine leur reconstruction après de longs conflits, ou sont sujets à des manifestations populaires contre le pouvoir en place, la moindre petite étincelle dans un pays peut vite se propager. « On voit bien que l’escalade entre l’Iran et Israël se déporte sur le terrain de la Syrie », souligne d’ailleurs Brahim Oumansour, après les échanges de tirs entre Israéliens et Iraniens sur le plateau du Golan.

Trump est en train de « claquer la porte » à la construction d’une paix durable

En choisissant deux alliés précis, quitte à se mettre à dos les autres puissances régionales, Donald Trump semble donc bien loin de son objectif d’installer une paix durable au Moyen-Orient.

« Trump l’a rappelé: il n’appelle pas au calme et à la raison entre les parties. Il affirme d’abord qu’Israël a le droit de se défendre et soutient complètement le pays. Du point de vue de Netanyahu et de l’armée israélienne, ils ont un feu vert pour faire ce qu’ils veulent dans la région », analyse pour Le HuffPost Elisabeth Marteu, docteure en science politique de l’IEP de Paris et spécialiste du Proche-Orient.

Une stratégie « d’alliance et non pas de consensus international », comme l’explique Brahim Oumansour qui dans une région aussi sensible pourrait (dans le meilleur des cas, mais sans aucune certitude) amener une brève accalmie, mais non pas une paix durable, en dépit des intentions affichées par le président américain.

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