Pourquoi les entreprises françaises doivent se méfier davantage de « l’ami Américain »?
décembre 17, 2018
France-Irak Actualité : actualités sur l’Irak, le Proche-Orient, du Golfe à l’Atlantique
Analyses, informations et revue de presse sur la situation en Irak, au Proche-Orient, du Golfe à l’Atlantique. Traduction d’articles parus dans la presse arabe ou anglo-saxonne, enquêtes et informations exclusives.
Publié par Gilles Munier sur 17 Décembre 2018, 11:23am
Par Jonathan Corcos (revue de presse : tribune/L’Usine Nouvelle – 15/12/18)*
Dans une note destinée à l’exécutif, la DGSI (Direction générale de la sécurité intérieure) dresse une synthèse des « ingérences américaines en France ». On y découvre que certains secteurs sensibles ont fait l’objet « d’attaques ciblées ».
Dans la note la DGSI (Direction générale de la sécurité intérieure) destinée à l’exécutif, on découvre que les secteurs d’avenir tels que les secteurs de l’aéronautique et de la santé ont été particulièrement visés car ils nécessitent d’investir des moyens importants en Recherche et Développement.
Une juridiction qui permet l’accès aux données sensibles stockées à l’étranger
Le Cloud Act (Clarifying Lawful Overseas Use of Data Act) a été voté par les Etats Unis en 2018 et permet à l’état américain d’accéder aux données d’acteurs économiques sous le coup d’investigation de la justice américaine. Les entreprises françaises subissent l’extraterritorialité de cette loi qui permet à la justice américaine d’accéder aux données stockées à l’étranger. Le Cloud Act pourrait donc permettre aux autorités américaines de capter le savoir-faire des entreprises françaises via des acteurs économiques incontournables tel que Microsoft en situation de quasi-monopole avec son système d’exploitation Windows et sa suite Office.
Des décisions d’embargos dissuasifs
En 2014 BNP Paribas a écopé d’une amende de près de 9 milliards de dollars car la banque était accusée d’avoir violé des embargos économiques en Iran à Cuba et au Soudan en effectuant des transactions en dollar. Or toute opération faite en dollar doit être conforme à la réglementation américaine même si elle est menée par une structure qui n’est pas américaine.
Cette année le Président américain Donald Trump a averti via un tweet « if you trade with Iran you won’t trade with US » (“si vous faites du commerce avec l’Iran, vous n’en ferez plus avec les Etats-Unis”). Les effets ont été immédiats : des entreprises françaises telles que Peugeot ou Renault se sont immédiatement désengagées du marché Iranien.
Des cabinets d’avocats américains qui pourraient être instrumentalisés par l’administration américaine
Les entreprises françaises font appel à des cabinets d’avocats américains pour s’assurer de respecter les règles d’extraterritorialité américaines. La DGSI prévient que les cabinets d’avocats américains ont la capacité d’identifier les vulnérabilités de leurs clients français et d’obtenir des données stratégiques. Et si ces données et informations étaient utilisées pour renforcer les entreprises américaines dans leurs marchés respectifs?
Un front européen uni pour répondre aux enjeux
Le traitement des ingérences américaines ne concerne pas uniquement la France mais l’Europe dans son ensemble. Un front européen uni permettra donc d’équilibrer les relations avec la première puissance mondiale. D’un point de vue légal à travers la mise en place du RGPD (Règlement générale sur la protection des données) et le projet de taxe de 3% du chiffre d’affaires des GAFA l’Europe tente d’équilibrer un peu plus le rapport de force avec « l’ami américain ».
Cependant le cadre légal ne suffit pas dans la guerre commerciale que se livrent les grandes puissances malgré les règles fixées par l’OMC. N’ayant pas d’interlocuteurs suffisamment crédibles pour les assister sur des sujets sensibles tels que le Cloud ou les systèmes d’exploitation les entreprises françaises et européennes font appel à des acteurs étrangers. L’Union Européenne devrait donc mettre rapidement en œuvre des politiques permettant l’émergence d’industries locales.
Jonathan Corcos est consultant pour Viatys Conseil
*Source : L’Usine Nouvelle