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La Chine souhaite que le cheval « russe » sorte gagnant de l’affrontement en Ukraine mais dans quelque temps


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Robert Bibeau

Fév 11

Deux thèses s’affrontent parmi les partisans russophiles de la guerre américano-otanienne en Ukraine contre la Russie l’alliée conditionnelle de la superpuissance chinoise. Il y a la thèse des supporters inconditionnels de Vladimir Poutine qui proclament l’unité indéfectible des deux alliés asiatiques (Chine – Russie) qui, croient-ils fermement, gagnera cet affrontement. Il y a la thèse de ceux qui croient que la Russie s’est engagée seule dans le guêpier ukrainien. Selon eux, la Chine conserve une attitude modérée – quasi neutre – dans cette affaire et la puissance chinoise souhaiterait selon eux un match nul entre l’Ukraine et la Russie…autant dire une défaite de l’allié russe. Cette deuxième thèse origine du Washington Post et est reprise par quelques analystes russophiles dont Andrew Korybco dans l’article ci-dessous que nous allons analyser. Pour notre part nous croyons que la guerre en Ukraine s’inscrit en droite ligne dans la dynamique de la guerre multimodale, multiplateforme et totale que la superpuissance états-uniennes déclinante mène à la superpuissance chinoise « émergente ». Cette guerre géolocalisée en Europe ou se concentre l’essentiel des complices et des affidés des USA a pour but d’affaiblir le principal allié de la Chine, son fournisseur d’énergie et de matières premières, afin de compléter l’encerclement de la Chine et de préparer les conditions de la guerre pour Taïwan dans le Pacifique, là ou aura lieu l’affrontement final. La victoire de la Russie est vitale pour la survie de la « Sainte Russie » et indispensable pour l’Empire du milieu (Chine) dans ses préparatifs de guerre contre l’Alliance Atlantique-OTAN.

Par Andrew Korybko – Le 2 février 2023. Sur Le Washington Post a tout faux : La Chine ne veut pas de gagnant en Ukraine | Le Saker Francophone

Le Washington Post a publié en début de semaine un article d’opinion de Max Boot déclarant que « Xi Jinping ne veut pas se retrouver du côté des perdants en Ukraine« . Il estime, à juste titre, que la République populaire pratique une politique équilibrée à l’égard du conflit ukrainien, dans laquelle elle ne soutient pas formellement l’un ou l’autre camp, mais il a tort de conclure que c’est parce qu’elle veut se retrouver du côté des vainqueurs. En réalité, la Chine ne souhaite la victoire de personne en Ukraine. (sic)

Les États-Unis ont d’abord cherché l’« endiguement » de la Russie plutôt que celui de la Chine parce qu’ils ont prédit, à tort, que Moscou capitulerait devant le chantage stratégique de Washington via l’Ukraine ou s’effondrerait rapidement en raison d’une guerre par procuration et de sanctions sans précédent si elle intervenait militairement pour défendre ses intérêts dans ce pays. Dans les deux cas, on s’attendait à ce que la Russie ne puisse pas servir de soupape de pression à la Chine dans le cadre de la campagne de pression maximale que le bloc occidental dirigé par les États-Unis préparait contre elle.

Cette série de résultats stratégiques majeurs aurait ainsi permis aux États-Unis de réaffirmer avec succès leur hégémonie unipolaire déclinante sur les relations internationales, retardant ainsi indéfiniment la transition systémique mondiale vers la multipolarité. Tout a cependant dérapé car la Russie ne s’est pas effondrée au cours de l’année écoulée comme l’avaient prévu les États-Unis. Au contraire, Kiev met en garde contre une nouvelle offensive majeure dans un avenir très proche et le New York Times (NYT) vient d’admettre que les sanctions ont échoué. (Il n’y a aucune « transition » vers la « multipolarité », concept forgé par la Chine pour excuser son irruption spontanée comme superpuissance sur la scène internationale… )

La résistance de la Russie a entraîné un dilemme stratégique pour les États-Unis, car leur complexe militaro-industriel (CMI) ne peut pas maintenir le rythme, l’ampleur et la portée du soutien armé apporté à Kiev sans que les pays de l’OTAN n’épuisent dangereusement leurs stocks en dessous du seuil minimum requis pour maintenir leur sécurité nationale. En outre, la perpétuation indéfinie de cette guerre par procuration consommerait des quantités incalculables d’équipements militaires qui pourraient être utilisés pour « contenir » plus efficacement la Chine à l’avenir… en effet …

C’est là que se trouve la raison pour laquelle la Chine préfère en fait que le conflit dure aussi longtemps que possible sans qu’il y ait de vainqueur incontestable, car cela permet de dégrader les capacités militaires du Bloc occidental et d’éviter qu’elles ne soient dirigées contre ses intérêts régionaux en Asie-Pacifique. Dans cette optique, Pékin hésite à apporter un soutien significatif à Moscou, car la victoire du Kremlin mettrait fin au scénario de guerre par procuration indéfinie qui sert les intérêts de la Chine, comme cela vient d’être expliqué…qui désert les intérêts de la Russie qui s’épuise (militairement du moins) et risque d’être un piètre allié lors du grand affrontement taiwanais. .

Néanmoins, la Chine ne veut pas non plus voir la Russie perdre pour la raison mentionnée plus haut, à savoir que le Bloc occidental veille à ce que son voisin ne serve pas de soupape de pression à Pékin dans le cadre de la campagne de pression maximale que prépare le bloc dans cette nouvelle guerre froide. Jusqu’à présent, rien n’indique de manière crédible que ce scénario se produira, surtout si l’on considère la robustesse globale de la résistance économique, militaire et politique de la Russie, malgré une pression sans précédent…nous ne pensons pas que l’humanité de 2023 s’engage dans une nouvelle guerre froide…au milieu d’une guerre mondiale totale.

Toutefois, dans l’éventualité extrêmement improbable d’un changement décisif de la dynamique stratégique en défaveur de la Russie, on s’attend à ce que la Chine apporte un soutien plus significatif à Moscou afin d’empêcher l’effondrement de son voisin et continuer ainsi à perpétuer cette guerre par procuration dans le but qui vient d’être expliqué. Comme cela ne s’est pas encore produit et ne se produira probablement jamais, la Chine ne voit aucun intérêt à donner à la Russie un avantage militaro-stratégique décisif sur le Bloc occidental, ce qui pourrait déclencher des sanctions paralysantes à son encontre également.

C’est pourquoi la République populaire se conforme tacitement aux sanctions anti-russes des États-Unis, exactement comme l’a déclaré le président Biden en septembre dernier, ce qui n’a pas été publiquement réfuté par les responsables chinois ou russes comme on aurait pu s’y attendre s’il avait dit un mensonge flagrant. De plus, elle a récemment commencé à explorer sérieusement les paramètres d’une nouvelle détente avec les États-Unis dans le but de normaliser leurs relations et de retarder – voire de neutraliser – son plan d’ »endiguement » anti-chinois…Retarder le plan d’endiguement oui cela est possible, mais neutraliser ce plan est utopique. Comme nous l’expliquons dans un article et comme Emmanuel Todd l’explique ici La troisième guerre mondiale est déjà commencé LA 3e GUERRE MONDIALE A COMMENCÉ. L,ESCALADE EN UKRAINE (Emmanuel Todd) – les 7 du quebec

Il n’existe pas de prétendue « alliance sino-russe« , contrairement à ce qu’affirme l’intellectuel indien C. Raja Mohan dans son dernier article d’opinion, mais il n’existe pas non plus d’alliance sino-américaine émergente. Ce qui se passe plutôt, c’est que la République populaire tente de trouver un équilibre habile entre la Russie et les États-Unis dans le but d’alléger autant que possible la pression exercée sur elle par les crises en cascade de ces dernières années qui ont fait dérailler sa trajectoire de superpuissance…de multiples ententes, traités militaires, associations et partenariats témoignent de l’alliance de la Chine et de ses Nouvelles routes de la soie avec la Russie et les États du Moyen-Orient et d’Orient L’horloge de la fin du monde à 90 secondes de minuit – les 7 du quebec et https://les7duquebec.net/?s=routes+de+la+soie

La Chine a besoin d’un accès fiable aux ressources russes à prix réduit pour poursuivre son essor économique, cette fiabilité étant mise en danger par la défaite improbable de la Russie dans le conflit ukrainien, alors que les remises susmentionnées s’évaporeraient en cas de victoire incontestable de la Russie. De même, la Chine a besoin que les États-Unis restent militairement embourbés dans l’ »endiguement » de la Russie en Europe afin d’alléger la pression qu’ils exercent sur elle en Asie-Pacifique, d’où la nouvelle détente visant à réduire la perception de la menace que représente la montée en puissance de la Chine.

En fonctionnant comme l’une des soupapes de la Russie contre la pression des sanctions de l’Occident grâce à sa consommation accrue des exportations de ressources à prix réduit de Moscou, tout en s’abstenant de fournir un soutien significatif à son opération spéciale, la Chine fait progresser la dimension russe de sa grande stratégie. De même, en s’abstenant de fournir le soutien susmentionné tout en négociant une nouvelle détente avec les États-Unis, la Chine favorise également la dimension américaine de cette stratégie.

Pour être tout à fait clair, afin que les idées partagées jusqu’ici dans cette analyse ne soient pas mal comprises, aucun jugement de valeur n’est impliqué dans cette grande stratégie machiavélique de la Chine qui vient d’être décrite. Tous les pays doivent, à juste titre, donner la priorité à leurs intérêts nationaux objectifs tels que leurs dirigeants les conçoivent, ce qui est précisément ce que fait la République populaire. Les moyens par lesquels elle fait avancer ces mêmes intérêts sont sans doute les plus efficaces possibles compte tenu du contexte mondial complexe.

Les observateurs doivent garder à l’esprit ce modus operandi et les motivations qui y sont liées s’ils aspirent sincèrement à analyser la grande stratégie chinoise avec autant de précision que possible. Certaines forces, tant au sein de la communauté des médias alternatifs que des médias traditionnels, ont tout intérêt à présenter faussement la Russie et la Chine comme des « alliés » ou comme des « rivaux » apparemment inévitables, deux perceptions qui sont erronées. La réalité est qu’elles coopèrent étroitement chaque fois que cela est mutuellement bénéfique (gagnant-gagnant dirait Xi), mais elles ne vont guère plus loin que cela.

Andrew Korybko

Traduit par Wayan, relu par Hervé, pour le Saker Francophone

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