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Apartheid : Israël instaure la ségrégation dans ses bus


 

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lundi 4 mars 2013, par La Rédaction

S’il ne s’agit pas officiellement de ségrégation raciale, cela en a tout l’air. Le ministère israélien des Transports a annoncé dimanche la création de nouvelles lignes de bus exclusivement réservées aux usagers palestiniens travaillant dans l’État hébreu. La mesure concerne les lignes partant du point de passage d’Eyal, situé près de la ville palestinienne de Qalqilya, et qui rejoint la métropole de Tel-Aviv. Elle touche toutes les populations arabes de Cisjordanie bénéficiant de permis pour travailler quotidiennement dans l’État hébreu.
Officiellement, c’est le bien-être des Palestiniens qui est visé. « Le plan vise à faciliter le déplacement des passagers palestiniens et à leur offrir une solution face aux compagnies de bus pirates, qui leur soutirent des prix exorbitants », explique dans un communiqué la compagnie israélienne Afikim, qui gère les lignes de bus entre Cisjordanie et Israël. D’après le ministère israélien des Transports, des prix « spécialement bas » oscillant entre 1 et 2 euros leur seront proposés, soit bien moins que les 8 euros que certains Palestiniens doivent parfois débourser en empruntant des compagnies privées.
Outre l’amélioration du confort de vie des Palestiniens, la décision vise aussi à désencombrer un réseau devenu surchargé pour les utilisateurs juifs. Ainsi, une source ministérielle israélienne évoque au quotidien populaire Yedioth Aharonoth le grand nombre de plaintes déposées par des usagers israéliens mécontents à cause de la surpopulation des bus qui force les chauffeurs à ne pas marquer l’arrêt dans plusieurs stations. « Les nouvelles lignes vont réduire la charge qui s’est formée sur le réseau de bus, résultat de l’augmentation du nombre de permis de travail accordés aux Palestiniens », affirme le communiqué ministériel.
D’après le quotidien israélien Haaretz, la décision résulte avant tout des pressions exercées sur le gouvernement par les colons israéliens de Cisjordanie. D’après ce journal, l’ancien maire de la colonie d’Ariel, Ron Nahman, ainsi qu’un dirigeant local de la colonie de Karnei Shomron se sont élevés en novembre dernier contre le risque sécuritaire posé par la présence d’utilisateurs arabes dans les bus empruntés par les colons. Le ministère israélien des Transports fait pour sa part état de plusieurs incidents impliquant des passagers juifs et arabes dans les cars en provenance de Cisjordanie. Quelque 520 000 Israéliens peuplent aujourd’hui des colonies situées en territoires palestiniens, et considérées comme illégales en vertu du droit international. Et l’annonce en décembre dernier de la construction de nouvelles « implantations » israéliennes en Cisjordanie va encore augmenter leur nombre.
Si les explications gouvernementales sur le but des nouvelles lignes de bus se veulent rassurantes, les précisions apportées par les conducteurs de ces mêmes bus le sont beaucoup moins. Plusieurs d’entre eux affirment auYedioth Aharonoth que les passagers palestiniens qui refuseront d’emprunter les nouveaux « bus palestiniens » seront priés de quitter les bus dits « mixtes ». « À partir de cette semaine, des contrôles seront menés aux checkpoints (point de contrôle), et il sera demandé aux Palestiniens de prendre leur propre bus », affirme au quotidien israélien un conducteur de la compagnie Afikim.
Côté gouvernemental, on assure pourtant qu’il est « interdit d’empêcher tout passager d’embarquer à bord d’une ligne de transport publique » en Israël. Le ministère des Transports ajoute que la création des nouvelles « lignes palestiniennes », considérées comme « lignes de bus générales », ont été portées à la connaissance des Palestiniens et ont en outre bénéficié de leur « accord complet ». Il est vrai que la nouvelle mesure n’a été annoncée qu’en Cisjordanie. D’après le Yedioth Aharonoth, de multiples flyers ont été distribués dans les villages palestiniens, exhortant les usagers arabes à n’emprunter que les lignes qui leur sont réservées.
Pour l’heure, la police israélienne opérant en Cisjordanie a annoncé le déploiement de forces additionnelles de maintien de l’ordre au point de passage d’Eyal. Interrogé par le Yedioth Aharonoth, des sources policières ont confirmé que les usagers palestiniens refusant de monter à bord des nouveaux bus ne seraient pas exclus, tout en ajoutant que leurs forces « feront de leur mieux pour exécuter la décision ministérielle ». Le récent témoignage de la militante israélienne Ofra Yeshua-Lyth, membre de l’ONG Machsom Watch et passagère du bus 286 entre Tel-Aviv et la Cisjordanie, sonne comme un mauvais présage :
« L’officier de police, le sergent major Shai Zecharia, a arrêté le bus à une station. Les soldats ont alors ordonné aux Palestiniens de descendre », raconte-t-elle au quotidien Haaretz. « La première chose qu’ils ont faite a été de collecter leurs cartes d’identité. Un par un, les Palestiniens ont été sommés de quitter la station de bus et de rejoindre à pied le point de contrôle Azzun Atma, qui se trouvait à 2,5 kilomètres de l’interconnexion Shaar Shomron. » Pour seule explication, l’officier de police leur a lancé : « Vous n’êtes pas autorisés (à voyager) sur l’autoroute 5. Vous devriez voyager dans des vans spéciaux, pas sur des bus israéliens. »

(04-03-2013 – Armin Arefi)

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