Il y a dix ans, disparaissait Roger Garaudy (13 juin 2012)
septembre 30, 2022
Association Entre la plume en l’enclume
plumenclume.com
Il y a dix ans, disparaissait Roger Garaudy (13 juin 2012)
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L’association Entre la Plume et l’Enclume rendit hommage à Roger Garaudy, en 2012, sous la forme d’un film de 90’ « Limpide dans la noirceur du siècle, Roger Garaudy ».
Roger Garaudy était un idéaliste, épris de recherche de la vérité, et un militant épris de justice : dans les deux milieux, celui des philosophes et celui du terrain, bien des gens ne l’aimaient guère, on aurait voulu qu’il ne soit que la moitié de lui-même.
Roger Garaudy le communiste
Un communiste qui frayait avec d’éminents catholiques, un militant de gauche qui fréquentait les intellectuels d’extrême droite, (tel Alain de Benoist, qui lui rend longuement hommage dans notre film) cela ne rentrait pas dans les catégories des gens qui se laissent enfermer par l’idéologie. Mais ce n’était certainement pas une girouette ou un opportuniste ; on était en présence de quelqu’un qui voulait aller toujours plus loin que ses certitudes, comme le dit Israël Shamir dans notre film, un homme qui aimait l’affrontement, qui avait du courage, et qui était désintéressé.
Le moment le plus dur, pour lui, fut celui de son éviction du parti communiste, en 1973 : il avait été le brillant orateur et véritable ministre de la Culture du monde soviétique, et se retrouva paria, tous ses camarades de combat lui tournaient le dos. Il n’en revenait pas, c’était une noyade qu’il n’avait pas vu venir, et il voulait mettre fin à ses jours.
Sauvé par l’islam
Mais il avait déjà été sauvé de la mort imminente antérieurement, lorsque, tout jeune professeur et résistant à Alger, il avait été condamné à mort par les autorités militaires vichystes. Le jour de son exécution, en plein désert, les trois Algériens constituant le peloton d’exécution avaient refusé de l’abattre, disant : ” l’islam nous interdit de tuer un homme désarmé. “
Il était donc naturel pour lui, après avoir fait le tour des impasses du monde occidental, et se trouver rejeté par ceux à qui il avait donné sans compter ses connaissances, ses talents et son énergie, de songer à s’acquitter de sa dette envers les musulmans.
Sur les traces de Louis Massignon
De façon fort logique, il approfondit alors sa culture islamique, sur les traces de Louis Massignon, autre esprit rebelle, inclassable, et vivement haï. Avec lui, il aimait considérer que les religions abrahamiques avaient des aspects complémentaires : le judaïsme centré sur l’espérance, le christianisme sur la charité, l’islam sur la foi. Louis Massignon choisissait de ne voir dans les trois univers spirituels que les sommets de la théologie et de la mystique universelle, mais il s’était investi dans l’anticolonialisme et le droit à l’indépendance de l’Algérie, puis dans le refus de l’escroquerie sioniste. Garaudy le suivit pleinement, mais appliqua aussi son esprit critique et didactique sur les pratiques abusives se réclamant de chacune des religions abrahamiques. Le rapprochement des civilisations ne pouvait reposer que sur la loyauté réciproque.
Les Mythes fondateurs
Roger Garaudy
L’engagement dans le cadre du plus grand respect pour la spiritualité de chaque peuple avait toujours été le moteur de Garaudy, dans sa dénonciation du nazisme, du colonialisme français, du sionisme abusif. Toujours à l’avant-garde des batailles de son temps, il publia Les Mythes fondateurs de la politique israélienne, en 1995, et fit découvrir à ses lecteurs la vilaine arnaque de l’industrie de l’Holocauste, selon les termes de Norman Finkelstein.
Sachant pertinemment qu’il lâchait là une bombe, il ne demanda pas de droits d’auteur à aucune des maisons d’édition du monde entier qui reprirent la version française, répandue par La Vieille Taupe, après le refus des éditeurs ayant pignon sur rue. Le feu se répandit dans le monde arabe, jusque-là assez indifférent aux mensonges concernant la guerre intra-européenne de 1940. L’antisionisme avait de nouveaux arguments, comme l’avait parfaitement formulé Robert Faurisson à la radio en 1980, en une simple phrase de 60 mots.
Roger Garaudy fut traîné devant la 17° chambre, chargée de punir les délits relatifs à la liberté d’expression, et condamné par deux fois à de lourdes amendes. La militante écologiste Ginette Skandrani rendit compte des détails de ce procès inique dans son livre Ginette la rebelle.
Cela ne l’émut pas particulièrement, il avait compris et démasqué la caste qui usurpait la justice et la version officielle de l’histoire. Il enfonça le clou avec deux autres livres puissants, Le terrorisme occidental et Les États-Unis, avant-garde de la décadence, où il montrait la filiation entre la théorie de l’exceptionnalisme américain et les prétentions au statut de « peuple élu » au-dessus des lois, arrogant et sûr de lui, de certains malfaiteurs bien connus. Le Père Michel Lelong, fondateur des Groupes d’amitié islamo-chrétienne, le défendit dans tous ces derniers combats.
Livre de Roger Garaudy : La terrorrisme occidental Livr de Roger Garaudy : Les États-Unis, avant-garde de la décadence
Mensonge et prédation
Né en 1913, Roger Garaudy fut heureux de livrer son dernier combat à nouveau à une échelle internationale. Pour lui, le mensonge n’était pas la cible principale de son indignation, ce n’était que l’un des aspects prévisibles du cynisme des prédateurs. Certes, le mensonge est le marchepied du crime, mais c’est l’oppression des faibles, les abus des puissants, qui l’avaient toujours scandalisé. Et le sionisme n’était, pour lui, qu’une nouvelle entreprise néo-coloniale.
Don Quichotte selon Daumier et Cervantes
Il se voyait en Don Quichotte, solaire, osseux et épuré selon la vision qu’en a donné Honoré Daumier. Si on lui avait dit qu’il combattait des moulins à vent, et non pas de féroces géants, il aurait répondu, avec le génie souriant de Cervantes lui-même, que les ogres savent se cacher derrière les médias, se déguiser en inoffensifs moulins à vent. Car à toutes les époques, les médias qui fabriquent l’opinion dominante et veulent l’imposer ne brassent que du vent. Le réel, le véritable, ce sont les combats à livrer dans tous les contextes, entre les monstres gigantesques et les guerriers pour la justice guidés par l’amour, ceux qu’on qualifie de fous ou de révolutionnaires. Que l’on se moque d’eux et qu’on les roue de coups, cela n’y change rien, ils sont dans le vrai.
L’héritage prophétique
Que reste-t-il, dix ans après sa mort, de la vaste production et de la somme des combats de Roger Garaudy, toujours « à contre-nuit » comme il aimait à le dire ? Si internet, qui commence son essor en 1996, « signifie la victoire de Faurisson », les réseaux sociaux sont devenus une caisse de résonance prodigieuse des faits contre les impostures.
Les mensonges officiels, et les crimes de masse qu’ils permettent et consolident, ne concernent plus seulement certains épisodes de la Seconde guerre mondiale, mais sont devenus le réacteur nucléaire du système de gouvernance occidentale, et la jeunesse le sait. L’esprit critique déborde de fécondité, la Russie a repris sa grandeur et sa hauteur de vue, l’eurocentrisme provincial, que dénonçait dans notre film le chercheur tunisien Ali Menjour, est battu par la multipolarité qui s’organise à tous les niveaux.
Le rapprochement entre croyants musulmans et chrétiens se consolide autour d’un axe, le rejet de l’usurpation oligarchique, non seulement en Palestine, mais tous azimuts, dans le monde occidental tout entier. Les efforts titanesques de Roger Garaudy donnent leur fruit, et nos ennemis le savent. Le combat continue, toujours inspiré par son idéalisme prophétique.
A contre-nuit
j’ai refusé les routes de la plaine,
à contre-nuit
la transparence des destins.
Et l’arbre n’est pas mort :
une branche fleurit, rien qu’une branche,
narguant les fossoyeurs.
Roger GARAUDY
Extrait de “A contre-nuit”, poème, 1987