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Les États-Unis suspendent l’aide militaire à leurs intermédiaires syriens.


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Les États-Unis et la Grande-Bretagne ont suspendu l’aide militaire qu’ils accordaient au Conseil militaire suprême de l’Armée syrienne libre, la force qui leur servait d’intermédiaire pour armer la rébellion soutenue par les impérialistes afin de faire tomber le gouvernement syrien de Bashar el-Assad.

Cette suspension est intervenue après que l’Armée syrienne libre (ASL) a perdu le contrôle d’une enclave le long de la frontière turque face à des rebelles islamistes soutenus par les Saoudiens, proches alliés jusqu’ici de l’ASL.

Le 6 décembre, des combattants du Front islamique, une nouvelle alliance qui regroupe les salafistes et d’autres milices fondamentalistes sunnites, a pris d’assaut les installations de l’ASL dans la ville frontière d’Atmeh, dont leur quartier général militaire pour le Nord de la Syrie et plusieurs entrepôts contenant du matériel militaire. Ce matériel comprendrait des chars d’assaut et des armes fournies par les États-Unis et la Grande-Bretagne, des véhicule tout-terrains et du matériel de communication.

Le Front islamique a également pris le contrôle du poste de douane de Bab al-Hawa qui était tenu par l’ASL à la frontière avec la Turquie.

S’il faut en croire les reportages dans la presse, il n’y aurait eu que des pertes minimes, les combattants de l’ASL s’étant rendus ou ayant fui face aux force supérieures du Front islamique. Le commandant suprême de l’ASL, le général Salim Idris, a lui-même pris la fuite passant la frontière turque et de là vers le Qatar.

L’ASL avait accueilli dans ses bases les combattants du Front islamique pour les aider à repousser une attaque hypothétique que des rumeurs attribuaient à l’État islamique d’Irak et du Levant. En fait, le Front en a profité pour s’emparer de ces bases.

Après une série de revers militaires et la défection de bon nombre de ses combattants au Nord-Est de la Syrie qui ont rejoint les milices alignées sur Al Qaïda, la débâcle humiliante de l’ASL à Atmeh a clairement ébranlé la confiance de ses sponsors de Washington, Londres et Paris quand à sa viabilité. Si l’ASL a joué un rôle de plus en plus faible sur le terrain, celle-ci, avec le rassemblement politique organisé par les Etats-Unis auquel elle participait, le Conseil national syrien, ont joué un rôle essentiel dans les tentatives cyniques des États-Unis et de l’Union européenne de donner à leur volonté d’obtenir un changement de régime à Damas une apparence « modérée ». Washington et ses alliés européens ont cherché à mettre l’ASL en avant, en en faisant leur relais sur place pour l’approvisionnement en armes et autres matériels militaires en direction des milices islamistes.

La débâcle de l’ASL intervient à un moment où le gouvernement Obama, l’élite politique américaine et la communauté militaire et des services de renseignement sont fortement divisés sur la politique que devrait adopter l’impérialisme américain en Syrie.

Sans soutien populaire, les rebelles soutenus par les États-Unis et l’Arabie saoudite se sont enlisés, et dépendent de plus en plus des islamistes sunnites, y compris des milliers de combattants étrangers, dont les positions politiques extrêmement sectaires et les atrocités qui en résultent n’ont fait que discréditer encore plus la rébellion.

Tout en se révélant incapable de faire tomber Assad, la rébellion a rasé la plupart de la Syrie, fait plus de cent mille victimes, poussé sept millions de réfugiés à fuir leur foyer, ravivé les tensions entre sunnites et chiites dans tout le Moyen-Orient et permis à Al Qaïda et ses alliés de se tailler une enclave de taille respectable au Nord et à l’Est de la Syrie.

Les États-Unis ont été plus qu’enclins à s’allier avec Al Qaïda par le passé. En effet, ils ont accueilli favorablement leur intervention dans la campagne visant à faire tomber Assad, tout comme ils s’en étaient servi dans la guerre de l’OTAN contre la Libye Mais à Washington il y a des craintes de plus en plus fortes que l’on ait laissé une trop grande latitude à Al Qaïda et que la propagation de son influence de la Syrie vers l’Irak risque ne fasse éclater les fragiles structures politiques communautaristes que les États-Unis avaient établies là-bas à la fin de leur campagne militaire sanglante de 2007-08.

Ces dernières semaines, il y a eu de nombreux reportages qui suggèrent que les États-Unis et leur alliés envisagent d’agir contre Al Qaïda en Syrie et en Irak, alors même qu’ils cherchent à développer d’autres milices islamistes en Syrie dans le but de maintenir la pression militaire sur le régime d’Assad.

Les divisions aux sein du gouvernement Obama et des élites américaines ont été mises encore plus en lumière par l’article de Seymour Hersh cette semaine, qui exposait le ramassis de mensonges qui a servi de prétexte au gouvernement à la fin du mois d’août et au début de septembre pour préparer leur frappe militaire contre la Syrie qui a été évitée de peu. En s’appuyant sur des fuites au sein de l’appareil de la Sécurité nationale, Hersh a révélé que non seulement les États-Unis n’ont aucune preuve que le régime d’Assad a lancé une attaque au gaz sarin le 21 août dernier, mais ils ont tu le fait qu’ils savaient très bien qu’au moins un des groupes alignés sur Al Qaïda, le Front Al Nusra, avait accès à de grandes quantités de gaz sarin.

Au dernier moment, le gouvernement Obama s’est abstenu de lancer une guerre contre la Syrie et a entamé des négociations publiques avec l’Iran, le principal allié de la Syrie dans la région et lui-même une des cibles principales de la guerre en Syrie menée par les islamistes pour le compte des États-Unis.

Avec le régime iranien qui croule sous les sanctions économiques des États-Unis et de l’Union européenne, Washington calcule qu’il peut gagner Téhéran à ses intérêts stratégiques, libérant ainsi des ressources politiques et militaires pour se confronter à ses rivaux les plus puissants, la Russie et la Chine.

Pour sa part, le régime bourgeois iranien a signalé qu’il est prêt à s’allier aux États-Unis, proclamant son impatience à donner aux transnationales américaines et européennes un accès privilégié au pétrole et aux ressources en gaz naturel iraniens ainsi qu’à aider les États-Unis à stabiliser le Moyen-Orient, depuis l’Afghanistan jusqu’au Liban.

Washington demande maintenant à Téhéran de le rejoindre à la conférence États-Unis-Russie du mois prochain sur un « accord politique » pour terminer la guerre en Syrie, afin de faire pression sur le régime d’Assad pour qu’il accepte de laisser le pouvoir à un « gouvernement de transition » dans lequel les « rebelles » soutenus par les impérialistes auraient au moins la moitié des sièges. En même temps, il cherche à maintenir la pression militaire sur Damas.

Avant les événements de la semaine dernière à Atmeh, les responsables du gouvernement Obama cherchaient à persuader le Front islamique, dont une grande partie des membres ont ouvertement travaillé avec le Front Al Nusra aligné sur Al Qaïda, pour qu’ils envoient des représentants à cette conférence internationale.

Le gouvernement Obama a répondu à l’attaque du Front contre ses intermédiaires de l’ASL en indiquant qu’il veut maintenir ses liens avec le Front. La porte-parole du ministère des Affaires étrangères Jan Psaki a déclaré que Washington était « évidemment inquiet » des événements à Atmeh. Mais que « nous ne sommes pas prêts en ce moment à faire une déclaration générale sur ce que cela veut dire et ce qu’en sera l’effet à long terme. »

Quant à l’ASL, elle est impatiente de renouveler ses relations étroites avec le Front islamique. Louay al-Mokad, porte-parole du Conseil militaire suprême de l’ASL, a minimisé la confrontation entre l’ASL et le Front, la qualifiant de « malentendu entre frères. » Il a poursuivi en déclarant, « nous sommes ouverts à tous. Il est temps de s’unir contre le régime syrien. »

À quel point le Front islamique acceptera de reprendre la coopération avec l’ASL reste une question ouverte, même si celle-ci obtempère aux demandes du Front de recevoir une part importante du contrôle au sein du Conseil militaire suprême. Lors de sa formation le 22 novembre, le Front avait répudié le Conseil national syrien et affirmé son objectif d’établir une Syrie sous domination sunnite et régie par la Charia.

De plus, sa formation a été clairement soutenue, voir orchestrée, par l’Arabie saoudite. La monarchie saoudienne s’est opposée très fortement aux ouvertures de Washington en direction de Téhéran, par crainte de perdre son influence stratégique envers l’Iran, et il a accusé le gouvernement Obama de vouloir se retirer de la campagne pour un changement de régime à Damas.

Washington et ses alliés ont commis un crime monstrueux en Syrie, en organisant et en armant les forces les plus réactionnaires afin de faire tomber un régime considéré comme un obstacle à la domination débridée des États-Unis sur la première région exportatrice de pétrole au monde. En cela, ils ont été aidés et encouragés par la pseudo-gauche en particulier des organisations comme le British Socialist Workers Party, le Nouveau Parti anticapitaliste français et l’International Socialist Organisation américaine, qui ont répété la propagande impérialiste, faisant passer la rébellion islamiste sunnite fomentée par les États-Unis et les Saoudiens pour une « révolution ».

Keith Jones

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