Mamdouh Othman: Les savants irakiens victimes d’un plan de liquidation américano- sioniste
juillet 1, 2017
ITRI INSTITUT TUNISIEN DES RELATIONS INTERNATIONALES
Publié par Candide le 30 juin 2017 dans Chroniques
Les savants irakiens victimes d’un plan de liquidation américano- sioniste :
Mamdouh Othman : 05/04/07
Traduit de l’arabe par Ahmed Manai : www.tunisitri.net
Il n’était sûrement pas venu à l’esprit du Professeur Hareth Abdel Hamid, chef du service de santé mentale à l’université de Bagdad, que le rapport qu’il avait envoyé à un séminaire scientifique tenu à Damas, allait servir matière à son oraison funèbre. Le Professeur Abdel Hamid a été en effet assassiné quelques jours auparavant dans le hall de l’université, sous les yeux de sa femme, juste après qu’il ait parlé à la chaîne anglaise Al Jazeera, des assassinats des médecins irakiens.
C’est la situation véridique des savants irakiens, telle que décrite par un professeur de lettres irakien dans sa déclaration à un journal américain : « les cadavres défigurés flottent sur le Tigre, les oiseaux ont émigré, les pigeons sont morts et l’enceinte universitaire est sous la coupe d’une forêt de turbans ».
Les savants irakiens sont ainsi confrontés à une politique permanente fondée sur les liquidations physiques et les traitements arbitraires, ce qui a poussé nombre d’entre eux à quitter le pays et à chercher refuge à l’étranger, occasionnant des pertes énormes à la communauté scientifique irakienne.
Le début du désastre :
Ce désastre national et humanitaire avait commencé très précisément au lendemain de la chute de Bagdad quand l’occupation est devenue une réalité tangible et une vérité certaine. Les forces d’occupation ont commencé par mettre des dizaines de scientifiques irakiens en résidence surveillée, chez eux et avec une surveillance permanente. Elles ont interdit à certains d’autres d’aller à leur travail à l’université et autres centres de recherche, et entrepris des négociations avec un autre groupe pour les faire transférer dans des centres de recherche Américains et Britanniques.
Les équipes d’intervention américaines disposaient de listes détaillées des personnes et de leurs adresses ce qui leur a facilité beaucoup leur travail « d’investigation, d’intimidation et de menace », en l’absence totale de toute autorité nationale et dans l’indifférence du monde, plutôt préoccupé par le désordre régnant en Irak.
Le nombre de savants irakiens est estimé à quelques milliers par les services américains. Eux et les israéliens, considèrent que 500 de ces quelques milliers forment l’élite proche de Saddam et qui a participé d’une manière significative au programme militaire irakien. Ils étaient la terreur des israéliens jusqu’à la chute de Bagdad.
Une multitude de rapports internationaux signalent qu’il existe cent cinquante (150) membres de commandos israéliens en Irak avec pour seule mission de pourchasser et liquider les savants listés. Selon certaines sources, ces liquidations ont touché jusqu’ici plus de 300 d’entre eux.
Les opérations d’élimination et de destruction, poursuivies par les services secrets américains et israéliens ne visent pas que les savants mais toute l’infrastructure scientifique du pays, c’est-à-dire tout son savoir scientifique et ses capacités de recherche. Ainsi et selon des rapports convergents, les destructions entreprises après la guerre ont touché des dizaines d’usines, de centres de recherche et de laboratoires dans les universités irakiennes et plus particulièrement à l’université de Mossoul. Tout le matériel et les produits de laboratoire, ainsi que les travaux et les résultats de recherche, ont été détruits. Ces destructions planifiées donnent autorité à une étude réalisée par le Centre d’Etudes du Golfe, concluant à l’existence d’un plan américano sioniste visant à liquider l’expertise et l’infrastructure scientifiques irakiennes, notamment en matière d’industrie militaire. Ce plan envisage aussi d’empêcher l’Irak de reconstituer ses capacités militaires et d’interdire à ses savants d’émigrer dans un quelconque pays arabe ou musulman. Il projette au contraire de les pourchasser et d’essayer de les recruter pour travailler dans des centres et des instituts américains et israéliens.
Un autre volet de ce plan, consiste dans les mesures préventives visant à empêcher les étudiants arabes, dans les universités occidentales, de poursuivre des études et des recherches dans des domaines liés aux industries militaires.
A côté de son plan de liquidation des scientifiques irakiens, Israël tente de récupérer et de recruter certains d’entre eux pour les intégrer dans son programme militaire. Ce plan s’est traduit à travers ses tentatives de normalisation avec l’Irak, particulièrement au plan scientifique. Depuis la chute de Bagdad, plus de 30 colloques et séminaires sur l’Irak ont été organisés en Israël, sous les auspices et avec le soutien de personnalités officielles de premier plan.
Les scientifiques contraints à émigrer
Un colloque tenu récemment au Caire a donné des chiffres effroyables des scientifiques et universitaires irakiens assassinés ou contraints à l’exil. Ils seraient près de 310 liquidés par les seuls commandos israéliens. D’autre part, il y en aurait encore plus de 500 sur une liste d’attente de scientifiques et d’universitaires à liquider. La même source précise que plus de 17. 000 scientifiques et universitaires ont été contraints de quitter l’Irak depuis le début de l’occupation.
Ces liquidations ne sont qu’un aspect de la grande détresse que vivent les universitaires, les universités et les centres de recherche irakiens.
De nombreux universitaires et chercheurs irakiens ont été invités à rejoindre des universités américaines, soit sous la contrainte, soit appâtés par les avantages proposés. En fait, les tentatives de séduction des savants irakiens avaient commencé bien avant l’occupation et particulièrement lors des opérations d’inspection. Les américains avaient facilité légalement l’entrée et l’obtention de la carte verte ou même la nationalité américaine, à ceux d’entre eux qui accepteraient de donner des informations sur le programme des armes de destruction massive de leur pays. Le sénateur Bayran qui avait présenté le projet de loi, avait clairement expliqué que c’était « dans le but de priver l’Irak de ses cadres scientifiques et techniques, indispensables à la poursuite de son programme d’armes de destruction massive ». Il estimait d’autre part que cette loi allait faciliter le travail des inspecteurs onusiens.
Mais malgré la poursuite des inspections et l’entrée de milliers d’inspecteurs américains après la chute de Bagdad, on n’a jamais entendu parler de découverte de ces armes. Les américains n’ont jamais donné non plus les noms des scientifiques irakiens qui auraient gagné le billet d’entrée au paradis américain.
C’était donc l’intelligence irakienne qui était visée depuis le début et la preuve est que de nombreux scientifiques, des atomistes et des biologistes surtout, figuraient sur la fameuse liste des personnalités recherchées, diffusée par le Pentagone.
Les éliminations planifiées n’ont pas visé que les scientifiques ou ceux qui avaient des relations avec le prétendu programme militaire irakien. Elles ont aussi touché des professeurs de lettres et de sciences humaines et religieuses.
Des indices significatifs :
D’autre part, rien ne prouve que ces éliminations physiques aient visé des personnes appartenant à une catégorie religieuse ou confessionnelle spécifique, mais le fait est que la majorité des victimes sont des arabes.
C’est la conclusion de la première étude sur les liquidations des scientifiques, médecins et ingénieurs irakiens faite par le médecin expert irakien Ismaël Al Halili et présentée au congrès international sur les assassinats des académiciens irakiens, tenu récemment à Madrid.
La liste des victimes comporte plus de 300 académiciens, mais le chiffre exact semblerait plus important. Les familles des victimes ont pris l’habitude de taire leurs malheurs et renoncent souvent à informer les autorités, parce qu’elles les suspectent de complicité avec les criminels.
En fait ces éliminations font partie intégrante de la stratégie du « désordre créateur » suivie par l’occupant dans le but d’apprivoiser les irakiens et de les faire plier.
Il n’est pas étonnant dans ce cas, que les universités, qui sont le centre de la vie et de l’activité culturelle et politique, soient les premières visées.
L’analyse des statistiques réalisées par la « ligue des universitaires de Bagdad », révèle que 80% des assassinats ont visé des universitaires et que plus de la moitié de ces derniers avaient le titre de professeur ou de professeur adjoint. D’autre part, plus de la moitié des assassinats ont visé des membres de l’université de Bagdad, suivie de celle de Mossoul et Al Moustansiria. L’analyse révèle aussi que 62% des victimes avaient un titre de docteur, que 33% étaient des scientifiques et des médecins et que 17% des médecins visés étaient en exercice. Enfin, les ¾ des personnes ayant été victimes d’une tentative de meurtre sont décédés.
Refus de toute protection :
De toute part, des gens ont réclamé aux autorités d’assurer la protection rapprochée des universitaires menacés, comme elles le font pour les députés avec un coût de 27 Millions de $ par mois. En effet chaque député dispose en permanence de 10 gardes de corps. La solution aurait été d’affecter 2 gardes de corps à la protection de chaque universitaire, étant donné que ces personnes, menacées dans leur vie par un plan d’élimination physique, constituent le patrimoine intellectuel et scientifique du pays et qu’ils méritent, autant sinon plus que d’autres, la protection.
Des universitaires irakiens et d’autres pensent qu’il existe des escadrons de la mort, liés et protégés par les forces d’occupation, sont responsables de ces crimes. Ils se demandent à quoi servirait de demander au criminel de régler le problème et comment croire qu’il suffirait de 2 gardes de corps pour leur assurer la sécurité. Ce serait exposer les gardes à la mort en même temps que leur protégé. Ces universitaires refusent de se déplacer flanqués de gardes de corps
Estimant, à juste titre, que des responsables officiels ont été assassinés avec leurs gardes de corps, parce que les assassins relèvent de milices liées à des partis politiques présents au gouvernement, lui-même lié aux forces d’occupation.
La solution du problème, c’est-à-dire la fin de ces crimes, serait dans l’évacuation des forces d’occupation du pays et dans le refus irakien, arabe et international de toutes les milices sectaires et confessionnelles.
Les médecins sont aussi une cible :
Les médecins aussi sont ciblés par ces crimes. Ils ont payé un lourd tribut puisque plus de 150 d’entre eux ont perdu la vie et arrivent juste après les universitaires. Il est clair que le ciblage de spécialistes de disciplines scientifiques telles que l’ingénierie, la physique, la chimie, la géologie et la biologie, liées à l’industrie et aux secteurs vitaux de l’économie du pays, est très significatif. Ces assassinats posent le problème de la responsabilité des forces d’occupation qui, en tant que telles, assument leur entière responsabilité de ces crimes. D’autant que jamais un suspect n’a été arrêté et encore moins jugé alors que se trouve dans la zone verte la plus grande ambassade américaine au monde et un nombre indéterminé d’officiers de renseignements.
Les précédents américains :
Les experts rappellent que les Etats-Unis ont par le passé, exécuté ce genre de plan d’élimination de savants. Cela s’est passé à la fin de la deuxième guerre mondiale, sous le nom de code « piper kleep », mais les savants allemands ont accepté de travailler pour les américains et 500 d’entre eux furent amenés aux USA.
Israël aussi a fait de même avec les savants allemands qui avaient travaillé au programme des fusées égyptiennes au cours des années 1960 et a organisé une campagne de colis piégés. Il en a fait autant avec les savants arabes spécialistes du nucléaire, tel le savant égyptien Yahia Almechad en 1980 qui avait rejoint le projet de la centrale nucléaire irakienne bombardée par Israël ou le savant palestinien spécialiste du nucléaire Nabil Felifil, assassiné en 1984.
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Traduit de l’arabe par Ahmed Manai :
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