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Syrie : les chrétiens d’Orient unis contre une intervention


le patriarche irakien Louis Raphael Sako, patriarche des chaldéens : une intervention militaire américaine reviendrait « à faire exploser un volcan destiné à emporter l’Irak, le Liban, la Palestine. Et peut-être que quelqu’un veut précisément cela ».

Syrie : les chrétiens d’Orient unis contre une intervention

jeudi 29 août 2013

De tout le Moyen-Orient, les Eglises, alarmées par le sort des chrétiens de la région et exceptionnellement unies, s’associent au pape François pour refuser toute intervention militaire en Syrie, jugeant qu’une action renouvellerait en pire l’expérience calamiteuse de l’Irak il y a dix ans.
François avait lancé dimanche un appel pressant pour faire « cesser le bruit des armes » en estimant que « ce n’est pas l’affrontement qui offre des perspectives d’espérance » mais « la capacité de dialoguer ».
Les patriarches d’Orient, conscients que leurs appels séparés ne sont pas suffisamment pris en considération, espèrent que François, populaire, parlera à nouveau et sera écouté par les capitales occidentales.
Le Vatican —son quotidien l’Osservatore Romano, sa radio— sont montés au créneau pour relayer les immenses craintes des chrétiens d’Orient, qui craignent d’être balayés par la violence et l’islamisme radical.
Dans la dernière édition de l’Osservatore Romano, le cardinal Leonardi Sandri, préfet pour les Eglises orientales, a adressé une supplique au nom de toutes ces Eglises pour que « l’intérêt supérieur de la paix et de la vie prévale sur tout autre intérêt et ressentiment partisan ».
Les chrétiens d’Orient ont soutenu en majorité les régimes autoritaires et laïcs —Saddam Hussein en Irak et la dynastie des Assad en Syrie—, qui protégeaient leurs droits et leur sécurité. Depuis la chute de Saddam Hussein en 2003, l’islamisme radical sunnite s’est répandu et des millions de chrétiens ont fui leurs villes et villages.
Dans le conflit syrien, une majorité de chrétiens ont soutenu Bachar al-Assad, par peur de l’alternative islamiste. Et ils pourraient en payer le prix fort, en cas de prise de pouvoir par les radicaux sunnites.
« La peur des chrétiens au sujet des frappes, observe le vaticaniste Marco Politi, trouve sa raison dans l’histoire des dix dernières années. L’évolution de l’Irak a montré comment on peut déstructurer un pays qui avait certes un dictateur mais qui était laïc : la guerre de religion entre musulmans s’est accrue ; le terrorisme a connu une grande expansion, la situation des chrétiens a empiré ».
« La même chose va se passer en Syrie car l’opposition la plus efficace est celle des jihadistes. On ne peut être naïf et irresponsable », comme certains philosophes occidentaux qui parlent du devoir d’agir, ajoute-t-il.
De Jérusalem à Alep, de Beyrouth à Bagdad, la perspective de frappes occidentales est dénoncée avec force par les patriarches d’Eglises implantées depuis la naissance du christianisme, qui n’ont pas envie d’être assimilées aux « croisés » par les islamistes comme en Irak en 2003.
Le plus vif est le patriarche irakien Louis Raphael Sako, patriarche des chaldéens : une intervention militaire américaine reviendrait « à faire exploser un volcan destiné à emporter l’Irak, le Liban, la Palestine. Et peut-être que quelqu’un veut précisément cela ».
L’évêque d’Alep, Mgr Antoine Audo évoque un risque d’une « guerre mondiale ». Le patriarche maronite Bechara Boutros Raï a accusé « des pays, surtout de l’Occident mais aussi de l’Orient » de « fomenter tous ces conflits ». « Nous sommes en train de voir la destruction totale de ce que les chrétiens ont pu construire durant 1.400 ans » de cohabitation avec les musulmans, a-t-il estimé.
Le patriarche syro-catholique Youssef III Younan a accusé les puissances extérieures « d’avoir armé les rebelles, incité à la violence, envenimé encore les relations entre sunnites et chiites ». « L’Occident pense qu’avec les sunnites au pouvoir, la démocratie remplacera la dictature, mais c’est une grande illusion », s’est-il insurgé.
La crainte que « le scénario de l’Irak se répète » est constamment évoquée de même que la perte d’une « laïcité » qui rendait vivable la cohabitation au Moyen-Orient.
Les patriarches font remarquer que les Occidentaux ne semblent guère soucieux d’attendre les conclusions de l’enquête de l’ONU sur l’attaque chimique de la semaine dernière. Ils rappellent qu’il y a dix ans, les Américains sont partis en guerre en Irak pour de supposées preuves inexistantes d’armes de destruction massive. Ils s’étonnent du peu d’attention accordé par les Occidentaux à la dimension communautaire et religieuse dans les déséquilibres actuels.
Même dans les rangs des chrétiens opposés à Bachar al-Assad, le rejet de frappes étrangères est net : le monastère du père Paolo Dall’Oglio, actuellement enlevé dans le nord de la Syrie, a ainsi exhorté au « refus de toute violence ». Sur les blogs et Twitter, les opposants chrétiens à une intervention étrangère sont intervenus massivement ces derniers jours.

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