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Ukraine : comment le coup d’État de 2014 a entraîné l’intervention russe


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27 févr. 2022

Ukraine : comment le coup d’État de 2014 a entraîné l’intervention russe
par lecridespeuples

Traduction du Thread de @SizweLo, étoffée par @lecridespeuples, résumant les événements qui ont conduit aux événements actuel entre l’Ukraine et la Russie.

En 2010, l’Ukraine a élu Viktor Ianoukovytch Président. L’Occident (États-Unis et UE) n’était pas satisfait de ces événements car il considérait le nouveau Président comme trop aligné sur la Russie. Avant l’élection de Ianoukovytch, l’Ukraine avait un accord de libre-échange en préparation avec l’UE. Mais en 2013, Ianoukovytch a fait un virage à 180° et a refusé de signer l’accord, privilégiant un rapprochement avec la Russie.

En novembre 2013, sous la direction de la Secrétaire d’État adjointe aux affaires européennes et eurasiennes, Victoria Nuland, les États-Unis ont fomenté une révolution de couleur (appelée EuroMaïdan) qui a conduit à un coup d’État sanglant en Ukraine. Ianoukovytch a été renversé. Les dirigeants de l’Est de l’Ukraine n’ont pas reconnu les autorités issues du coup d’Etat. Cela a conduit à des manifestations anti-gouvernementales en février 2014 et à un référendum en Crimée où 97 % des personnes interrogées ont voté pour le retour de la Crimée à la Russie. La Russie a annexé la Crimée à l’Ukraine en mars 2014. D’autres manifestations anti-Maïdan ont été réprimées dans le sang, comme à Odessa, où 48 militants pro-russes ont brûlés vifs par les miliciens néo-nazis de Pravy Sektor [Secteur Droit].

Le nouveau gouvernement ukrainien post-coup d’État a rapidement voté un projet de loi visant à supprimer le russe comme langue officielle. Les russophones de l’Est de l’Ukraine, nombreux à ne pas même parler ukrainien, ont été outrés, estimant que les Russes de souche étaient en danger imminent et préparant leur défense pour ne pas subir le nettoyage ethnique que les milices leur promettaient.

Début 2014, la Russie a commencé à envoyer un soutien aux Russes dans les régions orientales de l’Ukraine (Donetsk, Kharkiv, Zaporijia et Odessa) qui exigeaient désormais l’indépendance. En avril 2014, les régions majoritairement russophones de Donetsk et Lougansk (dont près d’un million d’habitants ont aujourd’hui la nationalité russe) ont fait sécession de l’Ukraine et se sont proclamées républiques distinctes.

Toujours au début de 2014, la Russie a commencé à effectuer des exercices militaires à la frontière orientale de l’Ukraine, en mimétisme aux exercices de l’OTAN en Lituanie, en Lettonie et en Estonie, qui partagent des frontières avec la Russie.

En septembre 2014, sous l’égide de la Russie et de l’OSCE, l’Ukraine et les régions séparatistes du Donbass ont signé des accords de cessez-le-feu à Minsk, en Biélorussie, pour mettre fin aux hostilités. Mais jusqu’à à ce jour, des batailles continues ont été menées entre les forces ukrainiennes et les séparatistes de Lougansk & de Donetsk sur le territoire de la région du Donbass, régulièrement bombardé par Kiev, en violation des accords. Le Donbass déplore plus de 10 000 morts sous les bombes, dont plus de 100 enfants.

Parallèlement au conflit armé, l’UE et les États-Unis ont imposé des sanctions internationales contre la Russie. Les sanctions ont entraîné l’effondrement de la monnaie russe et causé des dommages économiques aux pays de l’UE. En 2016, la Russie avait perdu environ 600 milliards de dollars. En 2017, l’ONU a publié un rapport indiquant que les pays de l’UE perdaient environ « 3,2 milliards de dollars par mois » en raison des sanctions russes.

En mars 2021, le Président Poutine a ordonné à l’armée russe de mobiliser des troupes près de sa frontière avec l’Ukraine et en Crimée. En novembre, la Russie a déployé des navires en mer Noire pour « observer » les navires de guerre américains, dont la présence militaire, ainsi que les livraisons d’armes de l’OTAN à l’Ukraine, étaient de plus en plus importantes. Poutine a déclaré que les navires américains et les déclarations belliqueuses de Kiev étaient « un sérieux défi » pour la sécurité nationale de la Russie.

En novembre 2021, le ministère russe de la Défense a déclaré que « le véritable objectif des activités américaines dans la région de la mer Noire est d’explorer le théâtre des opérations au cas où Kiev tenterait de régler par la force le conflit dans le sud-est de l’Ukraine ». De nombreux représentants de Kiev avaient déclaré officiellement qu’ils n’avaient aucune intention de respecter les Accords de Minsk, et les forces du régime ukrainien s’amassaient à la frontière du Donbass, laissant présager une attaque massive visant à en finir avec les séparatistes.

La fin du conflit en Ukraine ouvrirait la voie à l’adhésion de ce pays à l’OTAN, dont les statuts stipulent qu’un pays ne doit pas avoir de conflit intérieur pour pouvoir y accéder. Très inquiète à cette perspective, la Russie a adressé en décembre 2021 une requête officielle aux Etats-Unis et à l’UE, leur demandant de cesser l’expansion de l’OTAN vers l’Est, et notamment de ne pas intégrer l’Ukraine, rappelant les promesses d’après la chute de l’URSS de ne pas étendre l’OTAN vers l’Est (violées par 5 vagues d’élargissement successives). Des médias occidentaux comme Der Spiegel ont publié des preuves de ces engagements verbaux, niés par Washington

Moscou a également souligné que d’après des Accords précédents (Charte de sécurité européenne de l’OSCE de 1999 adoptée à Istanbul et Déclaration d’Astana de l’OSCE de 2010), il est interdit d’assurer sa sécurité aux dépens de la sécurité des autres pays. L’adhésion de l’Ukraine à l’OTAN placerait les missiles nucléaires américains à une portée de 7 minutes de Moscou, un grave danger pour la Russie qui constitue une nouvelle « crise des missiles ».

La réponse des Etats-Unis et de l’UE (qui a fuité dans El Pais) à la requête russe a été une fin de non-recevoir, refusant ne serait-ce que de discuter de l’entrée de l’Ukraine ou non dans l’OTAN au nom de la liberté de chaque pays d’assurer sa sécurité comme bon lui semble, faisant fi du principe de sécurité indivisible et égale. La Russie a donc renvoyé une lettre à chaque pays de l’OTAN lui demandant son interprétation du principe de sécurité indivisible, mais n’a reçu aucune réponse.

Voir L’ultimatum de la Russie aux pays membres de l’OTAN

À partir de la mi-janvier 2022, les États-Unis ont commencé à annoncer que la Russie allait envahir l’Ukraine, déclarant qu’une attaque pourrait commencer avant la conclusion des Jeux olympiques d’hiver de 2022 à Pékin en février. Tout au long de ce mois, l’OTAN a intensifié ses livraisons d’armes à l’Ukraine, notamment des missiles antichars et d’autres armes fabriquées aux États-Unis. Le 22 janvier, les États-Unis ont livré 90 000 kg d’armes létales à Kiev. Les Pays-Bas et l’Espagne ont également déployé des forces dans la région pour soutenir l’OTAN.

En février, les États-Unis ont envoyé des soldats en Allemagne et en Pologne pour renforcer la présence de l’OTAN en Europe, ainsi que des avions de chasse F-15 en Roumanie. La Grande-Bretagne a également déployé des soldats, des navires de guerre et des avions à réaction en Europe de l’Est.

Le 21 février, les dirigeants des Républiques autoproclamées de Donetsk/Lougansk ont à nouveau ??demandé à Moscou de reconnaître leur indépendance, ce que la Russie se refusait de faire depuis 8 ans, privilégiant la voie diplomatique des Accords de Minsk. Le Parlement russe a également formulé cette même demande à l’unanimité. Poutine a accepté et signé un Traité de reconnaissance et d’assistance, y compris militaire qui ouvrait la voie à l’envoi de troupes russes pour protéger et même libérer les Républiques de Donetsk & Lougansk, dont une grande partie était occupée par les forces ukrainiennes.

Voir Indépendance du Donbass : le discours intégral de Vladimir Poutine

Un ultimatum été adressé au régime de Kiev. Dès lors, la Russie était en guerre contre l’Ukraine. Ce qui a définitivement fait pencher la balance pour une guerre totale contre l’Ukraine, au lieu d’une intervention limitée au Donbass, est probablement l’annonce par Zelensky le 19 février de sa volonté de se doter de l’arme nucléaire, une ligne rouge pour la Russie. Rappelons que l’Ukraine déclare que la Crimée est un territoire ukrainien occupé par la Russie, qui doit être récupéré même par la force. Si l’Ukraine adhère à l’OTAN et attaque la Crimée, la Russie sera en guerre avec tout l’OTAN au nom de l’Article 5 imposant aux membres la défense mutuelle.

Le 22 février, Boris Johnson a annoncé des sanctions contre les banques et les particuliers russes. L’Allemagne a annoncé la suspension du processus de certification du gazoduc Nord Stream 2. Les ministres des Affaires étrangères de l’UE ont mis sur liste noire tous les Russes qui ont voté en faveur de la reconnaissance des régions séparatistes. Rappelons que les sanctions sont des actes de guerre, seule l’ONU étant habilitée à en prononcer selon le droit international.

Le 24 février, le Président Poutine a annoncé le début d’une « opération militaire spéciale » en Ukraine. Il a notamment rappelé que durant la 2e guerre mondiale, Staline avait commis une grave erreur :

« Si l’histoire est un guide, nous savons qu’en 1940 et au début de 1941, l’Union soviétique s’est donné beaucoup de mal pour empêcher la guerre ou au moins retarder son déclenchement. À cette fin, l’URSS a cherché à ne pas provoquer l’agresseur potentiel jusqu’au bout en s’abstenant ou en reportant les préparatifs les plus urgents et les plus évidents qu’elle devait faire pour se défendre d’une attaque imminente. Quand elle a finalement agi, il était trop tard. En conséquence, le pays n’était pas prêt à contrer l’invasion de l’Allemagne nazie, qui a attaqué notre patrie le 22 juin 1941, sans déclarer la guerre. Le pays a arrêté l’ennemi et a fini par le vaincre, mais cela a coûté très cher. La tentative d’apaiser l’agresseur avant la Grande Guerre patriotique s’est avérée être une erreur qui a coûté cher à notre peuple. Dans les premiers mois qui ont suivi le déclenchement des hostilités, nous avons perdu de vastes territoires d’importance stratégique, ainsi que des millions de vies. Nous ne commettrons pas cette erreur une deuxième fois. Nous n’avons pas le droit de le faire ».

La guerre était donc inévitable selon lui, et la seule question était de savoir si ce serait une guerre avec l’Ukraine seule avant son adhésion à l’OTAN, ou avec l’Ukraine et tout l’OTAN après son adhésion. Sans parler de la rapidité avec laquelle l’Ukraine pourrait se doter de l’arme nucléaire, ayant hérité de l’arsenal et de la technologie soviétiques.

Poutine a donc déclenché son opération avec pour objectifs la démilitarisation, la dénazification et la neutralisation de l’Ukraine, qui ne doit jamais intégrer l’OTAN et jamais obtenir l’arme nucléaire. Il a invoqué l’article 51 de la Charte des Nations Unies, qui stipule que « Aucune disposition de la présente Charte ne porte atteinte au droit naturel de légitime défense, individuelle ou collective, dans le cas où un Membre des Nations Unies est l’objet d’une agression armée, jusqu’à ce que le Conseil de sécurité ait pris les mesures nécessaires pour maintenir la paix et la sécurité internationales. Les mesures prises par des Membres dans l’exercice de ce droit de légitime défense sont portées à la connaissance du Conseil de sécurité et n’affectent en rien le pouvoir et le devoir qu’a le Conseil d’agir à tout moment de la manière jugée nécessaire pour maintenir ou rétablir la paix & la sécurité internationales. »

Voilà où nous en sommes aujourd’hui.

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