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Un film de la CIA: «Il est mort comme un chien». En vedette, Trump et Al-Baghdadi


7 au Front
29 octobre 2019 Robert Bibeau

«Il est mort comme un chien», Donald Trump ne pouvait être plus percutant alors qu’il posait pour les caméras du monde entier. Abou Bakr al-Baghdadi, chef recruteur de Daech au Levant, aurait été livré à ses bourreaux sans procès, tout comme son prédécesseur Osama Ben Laden ex-recruteur d’AL QAIDA, prétendument assassiné extrajudiciairement. Comme pour chaque film inspiré du Far West américain, le shérif a tué le truand au moment où il allait se mettre à table et livrer ce qu’il sait des activités de ceux qui l’ont commandité.

Les scènes-chocs de ce film de série B étaient écrites : le lâche terroriste, coincé dans un réduit sans issues, huit hélicoptères de combat planant au-dessus de sa casemate imprenable, trois enfants terrifiés en otage, à moins que ce ne soit deux des femmes du polygame, et le misanthrope pleurnichant a fait exploser son gilet pare-balle, le tunnel s’effondre sur lui et ses otages (enfants radicalisés pour les uns, femmes hystériques pour les autres). Cette fin supposée de Baghdadi évitera aux Américains, comme pour Ben Laden, d’exposer son corps au public.

Pepe Escobar, toujours bien informé (!) prétend : « Qu’une équipe médicolégale de premier plan a expertisé des échantillons de l’ADN du faux calife et a fait apparemment son travail en un temps record?! Les restes de la cible commodément auto-explosée – scellés dans des sacs en plastique – le confirment : c’est Baghdadi… puisqu’on vous le dit! En pleine nuit, il est temps pour le commando de retourner à Irbil, un vol de 70 minutes au-dessus du nord-est de la Syrie et du nord-ouest de l’Irak. Fondu au noir : nous sommes à la conférence de presse de Trump. Mission accomplie. Générique. » (1) Mort ou extradé vers la Turquie voisine, en voilà un autre qui ne risque plus de révéler les secrets de son métier de chef de milice djihadiste et de trahir ses complices.

Le choix de l’endroit de l’exécution

La scène rocambolesque s’est déroulée à Idlib, dans le nord-ouest de la Syrie, à 5 km de la frontière syro-turque. La casemate et ses tunnels n’existent plus, transformés en gravats pour qu’il ne devienne pas le sanctuaire de ce « sultan » encombrant. Les services secrets turcs dont on ne connait plus l’allégeance (OTAN ou russo-chinois) ont livré les renseignements pour localiser cet ancien agent de la CIA venu jadis palabrer avec le sénateur McCain avant de proclamer le califat. (2)

Curieusement, il n’y a pratiquement pas de jihadistes de ISIS/Daech à Idlib (ils se trouvaient plutôt en sécurité dans les prisons du Rojava avant d’être extradés par les troupes américaines à l’arrivée de l’armée syrienne), mais beaucoup de Hayat Tahrir al-Sham, anciennement Jabhat al-Nusra, une filiale syrienne du centre de recrutement de mercenaires d’Al-Qaïda, des noms connus à Washington sous le nom de «rebelles modérés», dont des brigades turkmènes armées par les services de renseignements turcs. Pourquoi le chef recruteur des mercenaires de Daech se planque-t-il dans un réduit contrôlé par son rival et concurrent au Proche-Orient? Deux réponses possibles : A) L’armée syrienne et l’aviation russe ayant rapidement bloqué la frontière syro-turque, ont rendu difficile l’extradition de l’agent recruteur djihadiste vers la Turquie amie. B) Le «chien mort» à Idlib pourrait être Abou Mohammad Salama, le chef du Haras al-Din, un sous-groupe d’Al-Qaïda en Syrie.

La complicité de la Russie dans la mise en scène?

Trump a dit à propos de Moscou : «Nous leur avons dit : «Nous arrivons»… et ils ont dit : «Merci de nous avoir prévenus.» Mais, «ils ne savaient rien sur la mission». Pourtant : «le ministère russe de la Défense ne dispose pas d’informations fiables concernant des soldats américains conduisant une opération visant à éliminer pour la énième fois le chef de Daech, Abou Bakr al-Baghdadi, dans une localité sous contrôle turc dans la zone de désescalade d’Idlib», a annoncé le général Igor Konachenkov, porte-parole du ministère russe de la Défense. Selon le général, le nombre croissant de ceux qui annoncent leur participation à l’élimination d’al-Baghdadi et diffusent des détails contradictoires de l’opération jette le doute sur la réalité de l’opération comme telle et sur sa réussite. «Nous ne sommes au courant d’aucune contribution présumée quant au passage de l’aviation américaine dans l’espace aérien de la zone de désescalade d’Idlib lors de cette opération», a souligné le porte-parole de la Défense russe. (3)

«ISIS/Daech a par ailleurs déjà désigné un successeur : Abdullah Qardash, alias Hajji Abdullah al-Afari, également irakien et ancien officier militaire de Saddam Hussein. Il est fort possible qu’ISIS/Daech et une myriade de sous-groupes et de variations d’Al-Qaïda en Syrie fusionnent à nouveau, après leur division de 2014. » (4)

La ressource stratégique

Pour mémoire, avant l’ascension d’ISIS/Daech, au milieu de la guerre par procuration contre le gouvernement syrien désobéissant, un mémo de la DIA était sans équivoque: si la situation se dégrade, il est possible d’établir une principauté salafiste déclarée ou non déclarée dans l’est de la Syrie (Hasaka et Der Zor), et c’est exactement ce que veulent les puissances qui soutiennent l’opposition «modérée» (sic), afin d’isoler le régime syrien, qui est considéré comme stratégique pour stopper l’expansion des «Routes de la soie» dans cette région carrefour entre l’Orient – l’Occident – l’Afrique. Car ce n’est plus le pétrole la ressource stratégique de cette région, mais sa position stratégique au carrefour de très grands marchés commerciaux convoités. (5) Les faits sur le terrain, après le dernier accord majeur négocié par la Russie entre les Turcs et les Kurdes syriens du Rojava, montrent clairement que le rétablissement de l’intégrité territoriale de la Syrie est en bonne voie. Il n’y aura pas de balkanisation de la Syrie malgré sa destruction. La dernière poche qui reste à délivrer des djihadistes est Idlib. Qui sait ce qu’il adviendra par la suite de la base militaire américano-israélienne au Levant. (6)

Le film «Il est mort comme un chien» enterre littéralement – du moins pour l’instant – une histoire gênante: le Pentagone déploie des forces pour occuper les champs pétroliers syriens. C’est tout aussi illégal, selon le droit international, que la présence de troupes américaines en Syrie, qui n’ont jamais été invitées par le gouvernement. Ceci constitue un dernier chantage à l’endroit des forces de la résistance afin qu’elles ne cherchent pas à savoir quels cadavres dorment sous les linteaux effondrés à Idlib.

L’assassinat extrajudiciaire (ou l’exfiltration en catimini) du chef recruteur des mercenaires de Daech constitue l’acceptation par l’Amérique et ses sous-fifres de leur défaite sur le front du Proche-Orient. Nous pouvons envisager qu’en même temps que les troupes américaines se retireront du terrain, peu à peu le venin ethnique, religieux, sectaire, communautariste qu’ils auront distillé dans cette contrée continuera d’empoissonner ce sous-continent qui aurait mérité la tranquillité.
NOTES

Fin du calife: «Il est mort comme un chien»


https://www.presstv.com/DetailFr/2019/10/27/609675/Syrie-Idlib-Al-Baghdadi-Daech-Al-Qada
https://www.presstv.com/DetailFr/2019/10/27/609727/AlBaghdadi-abattu-Moscou-souleve-un-doute

Fin du calife: «Il est mort comme un chien»


https://www.presstv.com/DetailFr/2019/10/27/609675/Syrie-Idlib-Al-Baghdadi-Daech-Al-Qada
Robert Bibeau Sur PressTV, Iran. http://www.les7duquebec.com/7-de-garde-2/baghdadi-mort-le-decodage/

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