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Un printemps qui vient de Perse


Mondialisation.ca, 28 novembre 2013
 
Maâmar Farah

Tiens, tiens ! « lisraël » et l’Arabie saoudite se retrouvent ensemble sur la liste des uniques pays qui ont mal accueilli l’accord sur le nucléaire iranien. Voilà qui est fort révélateur de la collision de leurs intérêts et de la solide attache qui les lie dans une région en totale recomposition.Nous savons déjà que le plan de déstabilisation des républiques arabes (hormis le Bahreïn, le pseudo-printemps n’a touché aucune monarchie !) a été réfléchi par les cabinets sionistes et fortement soutenu par la Turquie, l’Arabie saoudite et le Qatar.Ce plan a été également appuyé par la France, la Grande-Bretagne et les États-Unis. Mais,pour une fois,ce dernier pays n’a pas engagé de troupes,ni de gros moyens matériels et financiers.Les Anglais,qui s’alignent automatiquement sur Washington, n’avaient pas leur verve habituelle et se sont contentés de faibles appuis logistiques.Reste la France !

Voilà un pays qui a changé radicalement de politique extérieure en quelques années. Évidemment, quand on parle d’alignement inhabituel sur les positions sionistes, comme je l’ai fait récemment, des écrits et des voix s’élèvent de l’autre côté de la Méditerranée pour me reprocher mon «anti-israélisme» primaire ! J’écris dans la presse libre de mon pays et, ici, je ne risque pas d’être poursuivi pour anti-sémitisme. Je rappelais il y a quelques jours que nous avons été élevés dans le respect de toutes les races et religions ! Mais nous avons en horreur le sionisme et ses plans machiavéliques qui, depuis l’occupation de la Palestine jusqu’aux multiples crimes commis au Liban et dans les Territoires occupés, reflètent son caractère raciste, totalitaire et guerrier. Pire, ces plans se sont étendus aux républiques arabes, avec l’aide d’un philosophe troubadour, le fameux BHL, qui a joué un rôle capital dans l’engagement militaire de la France en Afrique du Nord et la décomposition de la Libye. A ce titre, Sarkozy portera devant l’Histoire la responsabilité d’avoir non seulement démonté tout le système social français au nom d’un certain réformisme bancal répondant aux exigences de Bruxelles, mais surtout d’être le premier président qui est sorti des lignes traditionnelles de la politique étrangère gaullienne. Alors que la France, et cela jusqu’au règne de Chirac, avait une politique équilibrée au Proche-Orient, voire des positions courageuses anti-atlantistes, Sarkozy a balayé d’un trait cette approche pragmatique, lucide et solidaire des forces de paix, pour s’aligner béatement sur Washington et devenir l’allié inconditionnel de « l’israël » ! Pire, dans l’épisode libyen, la France a joué le rôle d’un va-t-en-guerre qui tranche nettement avec les positions d’un Chirac, par exemple, sur le dossier irakien !

Avec l’arrivée de Hollande, on attendait un recentrage et un retour aux fondamentaux de la diplomatie française, mais l’épisode syrien et l’acharnement que met Paris à défendre une « opposition » dominée par les djihadistes, allant jusqu’à les armer, montrent à l’évidence, que la France ne réfléchit plus par elle-même, ni pour ses propres intérêts. L’empreinte de l’internationale sioniste est on ne peut plus claire ! Il y a quelques jours, le président français s’époumonait, depuis « l’israël », à réclamer l’arrêt de la prolifération des armes nucléaires dans le Proche-Orient. Or, et jusqu’à preuve du contraire, le seul pays de cette région à posséder l’arme nucléaire, des ogives par centaines et les fusées pour les transporter, est justement… « l’israël » !

Alors, de quoi et pour qui parlait M. Hollande ?

N’est-ce pas un oubli fort révélateur de l’aveuglement du chef de l’État français ?

Par ailleurs, son ministre des Affaires étrangères ne fait pas mieux à propos du même dossier nucléaire iranien. Ses propos, après l’accord historique signé à Genève, laissent entrevoir un certain dépit, voire une déception qui n’est pas sans rappeler le courroux de « l’israël ».

Veut-il, à tout prix, une guerre contre l’Iran, comme le réclament, à cors et à cri, les faucons de Tel-Aviv ?

N’est-ce pas consternant de voir qu’au moment où les USA et la Grande-Bretagne se calment quelque peu et font preuve d’une retenue qui tranche avec leur agressivité habituelle, c’est la France qui prend le relais et devient la force occidentale la plus belliqueuse au cours de ces dernières années ?

Il est certain qu’avec la tournure des événements en Syrie, et suite à l’accord sur le nucléaire iranien, les choses vont évoluer dans le bon sens. Il faut saluer le rôle de la Russie de Poutine dans cette bataille pour la paix. Parallèlement, le réveil de l’armée égyptienne, la prise de conscience du peuple libyen quant aux dangers que font peser les extrémistes sur la paix et la concorde, ainsi que la mobilisation des forces républicaines et démocratiques en Tunisie, tissent une toile de fond favorable au recul des périls et c’est ce qui nous fait dire que le véritable printemps arabe est à venir. Il part cette fois-ci de la Perse éternelle…

Faut-il rappeler que, depuis l’implosion de l’URSS, le monde était à la dérive, subissant la loi d’une seule super-puissance qui a fait feu de tout bois contre tout ce qui bouge ?

Ce changement géostratégique, combiné à d’autres facteurs, comme le réveil du sionisme et du néo-conservatisme aux États-Unis, sera la cause principale du recul de la paix dans le monde. 1991 marquera le début de ces temps sordides ; ce fut la première guerre du néo-impérialisme sous l’étendard d’une coalition menée par les États-Unis. Durant la période qui suit, les multinationales renforcent leur pouvoir et imposent leur diktat aux États et aux peuples, créant une gigantesque toile d’intérêts capitalistes. Le monde qui en naît est celui de la suprématie du capital sur les valeurs d’humanisme et de progrès social qui ont longtemps fait rêver les générations. En Europe, les États-nations sont embrigadés par un nouvel ordre qui les prive du levier de commande sur des questions vitales. Ce sont les puissances de l’argent qui dictent leurs lois. Les restrictions budgétaires toucheront les programmes sociaux et la France, entre autres, perd son modèle, bâti au prix de lourds sacrifices et de luttes héroïques de la classe ouvrière ! Nos pays, après des expériences socialistes n’ayant pas abouti, s’engagent dans l’ultra-libéralisme et perdent leur fragile indépendance économique en voie de construction. Misère, corruption, importations massives, dévaluation, inflation, crises, terrorisme : ce sont les années noires dont on se souviendra longtemps ! Dans des pays voisins, les «monarchies républicaines» qui vivaient sur le dos des peuples sont chassées par des révolutions rapidement récupérées par les forces intégristes rétrogrades.

Aujourd’hui, ce cycle semble ralentir et même s’arrêter parfois. Désormais, les peuples savent que lorsque l’impérialisme s’intéresse à la démocratie chez eux, c’est toujours suivi d’une guerre civile ou d’une partition du pays. Avant, ils nous agressaient au nom de la «civilisation». Aujourd’hui, c’est pour la «démocratie» ! C’est à nous de bâtir cette démocratie, en tenant compte de nos propres conditions et de nos expériences. A ce titre, attelons-nous à mobiliser tous les moyens humains, institutionnels, juridiques, intellectuels aptes à créer les conditions objectives pour la mise en place d’une véritable démocratie. C’est à la société civile qu’il appartient de dénoncer les errements despotiques et la mauvaise gouvernance. C’est à elle qu’il appartient de travailler sans relâche à la mise en place d’un consensus national autour de la nécessaire démocratisation de la vie politique. Les partis auront, à ce titre, un rôle majeur à jouer. Mais, pour cela, ils devront cesser de faire cavalier seul ou de s’isoler dans leurs chapelles doctrinales. Le salut passera par une clarification des choix politiques, puis par un regroupement qui fera apparaître trois ou quatre forces politiques identifiables idéologiquement.

Si l’impérialisme voulait réellement la démocratie dans nos pays, il agirait sans arrière-pensée et sans sélectivité. Car, s’il juge que la Syrie est un pays non démocratique, il devrait s’inquiéter sérieusement de ce qui se passe en Arabie saoudite, Qatar et Maroc ! En fait, ce sont les républiques gardiennes des Etats-Nations qui sont visées et non les monarchies. Ces dernières ne seront jamais inquiétées car elles ont un statut de protectorats dominés par l’argent et les idées sionistes ! Bien naïfs étaient certains observateurs algériens qui s’attendaient à une «brouille» maroco-américaine autour du Sahara occidental ! La position du démocrate Obama n’a rien de surprenant. La France et les États-Unis ne peuvent aller contre un projet dont ils sont les maîtres d’œuvre puisque ces deux puissances se partagent économiquement le royaume marocain et lui dictent sa politique !

Maâmar Farah

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