Les Etats faillis d’Europe et d’Amérique nous offriront-ils une guerre de Noël ?
janvier 1, 2012
Par Léon CAMUS
La faillite occidentale à l’heure de l’Orient convulsionnaire.
D’un côté, un monde arabe secoué de spasmes tectoniques avec deux épicentres actuels, l’Égypte et la Syrie, de l’autre, les deux pôles de la puissance occidentale, États-Unis et Union européenne, cheminant cahin-caha au bord de l’abîme ! Reste à savoir si la conjonction de ces deux menaces ou la rencontre de ces deux dynamiques entropiques aboutiront ou non à une « Guerre de Noël » ? Cadeau vénéneux que des élites faillies pourraient bien apporter aux peuples sidérés pour se dédouaner de leurs échecs et « suspendre » la démocratie ! Cela afin d’être libres d’appliquer les plans quasi totalitaires qu’ils nous ont concoctés : austérité, contrôle social et projections des forces vives dans le brasier de guerres sans fin…
Conflits ultimes servant à justifier un ordre social fondé sur l’idolâtrie de la marchandise, soit un Nouvel Ordre innommable aux mains d’oligarchies d’argent, ennemies résolues du genre humain.
Ce dimanche 24 novembre au Caire, après six jours d’émeute et 41 morts sur la Place des Martyrs, alors que la junte militaire tenant les rêne du pouvoir depuis le 11 février semble lâcher du lest, alors que commence le long accouchement, étalé sur quatre mois, des élections législatives, la « crise » égyptienne paraît plus que jamais sans issue et même, passablement inquiétante. Car la rue égyptienne se trouve maintenant divisée entre manifestants exigeant un « changement radical » et contre-manifestants réclamant le retour au calme et à l’ordre pour relancer une économie plongée dans un coma profond depuis un an.
Ceux qui hier encore étaient unis pour chasser Moubarak se retrouvent donc aujourd’hui presque au bord de l’affrontement. Une seule certitude : comme en Tunisie et au Maroc, les Frères musulmans devraient sortir grands vainqueurs du processus électoral.
Ce même jour, le Premier ministre qatari, Hamad al-Thani, annonçait au Caire, en clôture d’un Conseil extraordinaire des ministres de la Ligue arabe, l’adoption contre la Syrie d’un train de sanctions économiques, ceci afin de contraindre le régime à cesser toute répression des mouvements subversifs œuvrant au renversement du régime baasiste… gel des comptes bancaires du gouvernement syrien dans les pays arabes, suspension des liaisons aériennes… Peu de chose apparemment, mais une « première » révélatrice de l’alignement des gouvernements arabes sur les desiderata occidentaux.
Sur les 21 membres de la Ligue arabe – exception faite de la Syrie suspendue depuis la mi-novembre – 19 ont approuvé sanctions, l’Irak et le Liban s’en étant « dissociés » aux dires de cheikh Hamad !
Pendant ce temps, l’ineffable M. Juppé, après avoir reconnu les rebelles du « Conseil national syrien [comme] l’interlocuteur légitime », déclarait qui allait proposer à l’Union européenne, et au nom de la France qui n’en peut mais, l’instauration en Syrie des « zones sécurisées pour protéger les populations civiles ».
Chacun pourra constater ici, qu’à quelques nuances près, le scénario qui s’écrit ces jours-ci, ressemble come deux gouttes d’eau à celui déjà appliqué à la Jamahiriya Libyenne : reconnaissance de la dissidence comme interlocuteur étatique et amorce d’un grignotage du territoire d’un État souverain sous prétexte d’action humanitaire… Arrêtons-nous un instant sur ces deux crises disjointes mais qui se développent en parallèle…
Égypte : révolution confisquée, système verrouillé, les Frères musulmans bientôt aux commandes… avec l’aval des É-U
Les Frères Musulmans, qui attendent ce moment depuis trente longues années, sont a priori les favoris des législatives qui démarrent ce lundi 28 novembre (1). Ils leur faudra cependant compter avec la jeunesse désœuvrée qui campe place Tahrir, bien décidée qu’elle est à faire bouger les lignes et à dépasser les collusions et les clivages actuels : il s’agira en conséquence pour les Frères de se démarquer nettement du Conseil suprême des forces armées qui assure actuellement la transition, mais aussi plus discrètement la continuité entre l’Égypte de Moubarak et celle d’une révolution en passe d’être confisquée… et c’est justement ce que refusent les foules en colères : se faire voler leur révolution.
Masses dont la mémoire politique est assez vive – aiguisée par les restrictions de liberté mentale qui leur ont été imposées depuis un demi siècle – pour savoir que chasser Moubarak, comme les Algériens le firent de Chadli en janvier 1992, et lui substituer un parti majoritaire en lieu et place d’un parti unique, n’a rien à voir avec une démocratie véritable. En un mot les foules attentives ont compris qu’un pouvoir semblable au précédent mais habillé de neuf était en train de s’installer silencieusement à leur corps défendant. Une conscience et une détermination impressionnante pour une plèbe en principe analphabètes, sans guide et sans idéologie autre que la volonté d’exprimer librement haut et fort leur espérance de pouvoir vivre à présent dans la dignité. Ce pourquoi elles rejettent ce qui pourrait succéder à la junte militaire : « le président sans pouvoir d’un État fantoche, des ministres impuissants et un parlement sans poids ». Au final, les Frères et leurs épigones – tel le Mouvement de la Jeunesse du 6 avril, le même qui appelle actuellement les Égyptiens à la mobilisation – seront à n’en pas douter ceux qui incarneront le mieux – d’ailleurs avec ou sans le soutien des É-U car rien n’est clair en ces temps troublés ! – le retour vital à l’ordre… et aux touristes que tous attendent avant les hypothétiques présidentielles d’avril 2012.
Inutile au demeurant de se demander pourquoi aucun des objectifs de la révolution – pourtant fort clairs : changements radicaux de la structure du système soit une rupture totale avec le régime précédent – n’a été atteint jusqu’ici excepté l’élimination de symboles trop voyants et la dissolution du Parti national démocratique, quand on sait ce qu’est vraiment la machine militaire qui a pris le relai.
En tout état de cause, le maréchal Mohamed Tantaoui, ministre de la Défense et président du Conseil suprême des forces armées est de facto le chef d’État avec Omar Souleimane pour vice-président… or les deux hommes, s’ils n’ont pas été directement désignés par les États-Unis, ont-ils été du moins explicitement agréés par Washington (2). En ce qui concerne le premier, celui-ci a noué des liens étroits avec le Pentagone lorsqu’accédant en 1991 au portefeuille de la Défense et commandant en chef des forces armées égyptiennes, il participe à la première Guerre du Golfe aux côtés de la Coalition anglo-américaine [Cf.Wikipedia]. Plusieurs câbles diplomatiques américains publiés par WikiLeaks, le décrivent en 2008 comme « charmant et courtois… âgé [il est né le 31 octobre 1935] et particulièrement insensible au changement ».
Enfin pour clore provisoirement le chapitre, sachons que les États-Unis contribuent à hauteur d’1,5 md de $ annuel au budget égyptien dont la majeure partie engraisse l’armée. La cause est entendue, et le système largement verrouillé. Quelque soit le cas de figure, il semble bien que les É-U continueront à tirer les ficelles… le cas échéant par Frères interposés sauf deus ex machina, autrement dit à ce que la révolution égyptienne ait vraiment lieu à l’issue d’un soulèvement général. Ce qui semble peu probable. Reste une troisième possibilité au regard des frustrations restées à vif, celle d’un chaos durable et d’une instabilité explosive chronique dont le voisin immédiat n’aurait guère à se plaindre puisque tout l’art de ses dirigeants consiste à régner sur la Région ordo ab chao (3). D’où le pandémonium syrien pour lequel les politiques français semblent n’avoir qu’une hâte, celle d’y foncer tête baissée…
Syrie, guerre indirecte : les Pieds Nickelés anglo-franco-allemands sont à la manœuvre, les derniers jours de Bachar El-Assad ?
Tandis que M. Cameron, Premier ministre britannique annonce benoîtement la « guerre civile » en Syrie, en France le Canard enchaîné « révèle » que Paris, Londres et Ankara plancheraient activement sur la préparation d’une offensive… limitée il est vrai [23 nov. 2011].
Pour sa part, M. Juppé, qui prétend représenter les intérêts français hors frontières, durci sa chaque jour davantage sa position à l’égard du pouvoir alaouite d’Assad, déclarant avec un bel aplomb [France Info 28/11] que « ses jours sont désormais comptés »… Vous m’en direz tant ! Or si ce n’est pas une déclaration de guerre, cela y ressemble bigrement. M. Juppé estime en outre que les sanctions économiques adoptées par la Ligue arabe contre le régime syrien vont l’isoler toujours plus, et à partir de là, réaffirme la nécessité d’établir des « corridors humanitaires… seule façon d’alléger à court terme le martyr des populations » (4). Des propos abondamment repris et amplifiés par la caisse de résonnance journalistique sans que quiconque ne songe à s’esclaffer devant tant de Tartuferie !
Comme si Juppé se préoccupait du sort des populations ? Sauf à ce que, schizophrène, il ait fini par croire à sa propre logomachie… en dépit des démentis apportés à ses projets d’ingérence armée par la Cheftaine des opération militaires des Nations unies, Valérie Amos, estimant quant à elle, que « les besoins humanitaires identifiés en Syrie ne justifient par la mise en place de tels mécanismes ».
D’ailleurs, au moment même où s’écrivent ces lignes, le 28 nov. 2011, des dizaines de milliers de personnes ne sont-elles pas rassemblées à Damas sur la place Sabaa Bahrat, au cœur de la ville, pour conspuer et dénoncer les sanctions imposées la veille par la Ligue arabe en brandissant drapeaux géants et portraits du président Assad, tandis que dans le nord du pays, à Alep et Hassaké, d’autres manifestants défilaient en rangs serrés ? Quand cessera-t-on de mentir en nous faisant croire à une révolte populaire en Syrie alors qu’il s’agit de la dissidence de groupes factieux entrainés, monnayés, équipés de l’extérieur ?
Reste que rien de l’actuelle offensive diplomatique, médiatique – et souterrainement militaire – dirigée contre Damas n’aurait pu avoir exister sans le spectaculaire retournement de la Turquie passé du camp anti-impérialiste et ami de la Syrie, à celui de supplétif de l’empire financier anglo-américain et de leurs tributaires franco-allemands.
Pendant ce temps-là, le Département d’État imperturbable – comme le sont tous les « rouleaux compresseurs » remplissant scrupuleusement un cahier des charges et suivant pas à pas un agenda – enjoint à ses ressortissants de quitter immédiatement le territoire syrien tout en faisant courir la rumeur que le porte-avion George H.W. Bush et sa flotte de combat, aurait quitté le Golfe arabo-persique pour gagner les eaux de la Méditerranée orientale.
Laissant entendre ou suggérant que les États arabes et la Turquie se seraient tombés d’accord pour imposer une zone d’exclusion aérienne auquel la Marine américaine apporterait un soutien logistique… En clair, si l’on se réfère au précédent libyen, une « no fly zone » n’est qu’un violent euphémisme désignant une formidable campagne de bombardements de cibles diverses et variées…
Ce que réclame à point nommé « sur certaines cibles stratégiques »,le colonel Riad Al-Assaad, chef de la prétendue Armée syrienne libre – basée en Turquie d’où partent les opérations de guerre subversive conduites sur le sol syrien (5) – et très impatient de voir matraquée depuis les airs sa terre natale… Au demeurant – réponse du berger à la bergère – la Russie prévoit d’envoyer en 2012 une flotte de guerre en Syrie (6) alors même qu’un regain de tension se manifeste entre Moscou et les Atlantistes, non seulement à propos de la crise syrienne mais aussi en raison du déploiement programmé d’un bouclier anti-missiles américain en Europe orientale et en mer Baltique. Une concomitance entre deux dossiers sensibles qui ne doit certainement rien au hasard en ce qu’il est singulièrement illustratif de la dégradation des relations Est/Ouest (7). C’est de ce contexte qu’il convient à présent d’appréhender le revirement d’une Turquie prête encore hier à former un triangle du refus avec Damas et Téhéran ?
Le stupéfiant retournement de la Turquie
Stupéfiant au premier abord, pas si l’on regarde les choses au fond. Le 17 mai 2010, les ministres des Affaires étrangères iranien, brésilien et turc signaient à Téhéran un accord sur un projet d’échange de combustible nucléaire à l’issue d’un sommet tripartite en présence des présidents Ahmadinejad, Lula da Silva et du Premier ministre turc Erdogan… ceci à la grande colère de Mme Clinton dont la politique de sanction à l’égard de l’Iran était ainsi battue en brèche. Un épisode qui faisait suite au coup d’éclat d’Erdogan le 29 janvier précédent à Davos où il infligea un spectaculaire camouflet au président israélien Pérès en rompant brutalement un échange relatif à la situation de la Bande Gaza après Plomb durci ?
Plus récemment l’on se souvient du rappel réciproque des ambassadeurs, l’État hébreu ayant refusé de présenter des excuses pour l’assaut du navire humanitaire turc Mavi Marmara – cherchant à forcer le blocus de Gaza – dans lequel 9 militants avaient trouvé la mort sous les balles des commandos israéliens.
Nous sommes en outre bien loin de cette photographie historique où se trouvaient réunis à Istanbul, lors du Sommet du Comité Permanent pour la Coopération Économique et Commerciale le 9 nov. 2009, les présidents Abdallah Gull, Bachar el Assad et Mahmoud Ahmadinejad…
Que s’est-il donc passé ?
Comment expliquer le retour dans d’Ankara dans le giron occidentaliste, alors que tous croyaient la Turquie – au moins depuis 2003 et son refus de prêter main-forte aux anglo-américains dans leur assaut contre l’Irak baasiste – dans le camp de ces nouveaux Non-Alignés que sont les grandes puissances émergentes ?
Et que l’on était en droit de s’attendre, dans la crise syrienne, à un rôle de médiateur et de bons offices de la part du gouvernement turc, alors que c’est l’exact contraire qui s’est produit !
Éléments d’explication
Au lendemain du rapprochement turco-syrien et turco-iranien, les potentats du Golfe se sont attelés à détourner le tandem Gull/Erdogan de leurs tropismes syro-iraniens, obéissant en cela à leurs peurs de voir se constituer un pôle régional dominé par les Chiites exécrés… satisfaisant en cela à toutes les attentes de Washington.
Résultat, le Qatar, base arrière avancée de l’influence américaine dans la Péninsule, s’est empressé d’annoncer son intention de construire en Turquie un complexe gazier de liquéfaction destiné aux exportation vers l’UE.
Ajoutons au nombre des carottes, que les Turcs fort marris de porter à leur flanc sud la tumeur du PKK expression de l’irrédentisme kurde, convoitait la possession de drones tueurs, maîtres incontestés des champs de bataille asymétriques dans les conflits de basse intensité.
Dans un premier temps, Tel-Aviv en a vendu à Ank
ara, mais les machines de mort ont été réexpédiées à l’envoyeur parce que défectueuses… D’ailleurs l’une des raisons sous-jacentes de la dégradation de relations entre les deux capitales !
Puis la Turquie a tenté de s’équiper auprès de la France et de l’Italie. En vain, les Israéliens ayant mis des bâtons dans les roues et fait capoter les accords. Au bout du compte, une demande à Washington – également bloquée un certain temps par Congrès sous la pression du lobby israélien – finit par aboutir. Des Predators sont désormais prépositionnés sur la base aérienne d’Incirlik, ce qui suppose, à l’évidence… un échange de bons procédés !
S’ajoute à cela les relations historiques existant entre le parti au pouvoir en Turquie, « Développement et Justice », islamiste réputé modéré, et les Frères musulmans, principale force de l’opposition syrienne en exil. Mais in fine aucun des éléments évoquée ne suffit à lui seul, ou tous ensembles, à expliquer l’actuel acharnement de la Turquie contre le régime syrien. En fait, il aura fallu aux fins stratèges du Département d’État de trouver la façon de canaliser les velléités d’expansion régionale d’Ankara. Car il est impossible d’ignorer les ambitions pantouraniennes et néo-ottomanes qui travaillent depuis des lustres l’inconscient collectif des élites turques, kémalistes ou religieuses, où elles étaient en sommeil. Et d’abord parce qu’elles sont une donnée structurelle de la Turquie de toujours dont les représentants d’aujourd’hui sont génétiquement héritiers du mouvement des Jeunes Turcs… ceux-là mêmes qui abolirent le Khalifat, pour mieux – puisqu’ainsi fonctionne le balancier de l’histoire – œuvrer présentement à sa reconstitution sur le pourtour méditerranéen à l’occasion de ces « Printemps arabes » et du Projet d’Union euroméditerranéenne du président sarkozy
La boucle est bouclée.
Il fallait donc en plus de la « gazinière », des drones de combat, donner un os à ronger aux puissants appétits d’Ankara… auxquels Washington à su faire miroiter l’éventualité proche d’un leadership turc sur la Communauté des croyants ! Un Khalifat modernisé sous la forme de démocraties islamiques, pluralistes et… libérales autant que faire se peut, la Charia devant s’adapter elle-aussi au monde moderne. Ainsi Washington ayant échoué « à donner » l’Europe à la Turquie – et pas seulement l’y faire entrer – est parvenu à désamorce les tensions, réelles ou simulées, qui ont opposé Ankara et Tel-Aviv… en jetant la Syrie en pâture à la Turquie, c’est-à-dire en semblant souscrire aux ambitions régionales de l’AKP, Washington a réintégré le Turc – un moment tenté par le néo Tiers-mondisme des Émergents – dans sa propre stratégie d’unification du Marché régional, sur les décombres des nations arabes morcelées en entités confessionnelles et/ou ethniques, mais en passe de se trouver rassemblées au sein d’une aire islamique homogène dans la diversité.
En un mot comme en cent la crise syrienne scelle le retour de la Turquie dans l’orbite américaine.
Ce qui marque, pour l’heure, une victoire de la diplomatie de l’Administration Obama, mais constitue un danger immédiat pour nous Européens qui devront, une fois de plus, payer le prix de la guerre. L’ancien ambassadeur d’Israël à Washington, Itamar Rabinovitch, dans les colonnes de l’International Herald Tribune [19 nov. 2011] a eu l’amabilité de nous expliquer qu’avant l’arrivée au pouvoir en 1970 des Alaouites « la République syrienne était un État faible et instable, une arène pour les rivalités régionales et internationales ». Or pour le docte analyste, ces derniers mois signifient précisément un retour à la « situation ante quo, c’est-à-dire prévalant avant 1970 ». Une Syrie faible, en proie au chaos voilà donc ce qui sied à M. Rabinovitch « profondément préoccupé par la menace iranienne, Israël pense qu’enlever la brique syrienne du mur iranien pourrait déboucher sur une nouvelle phase de la politique régionale ». Serait-ce là l’ultima ratio des événements vu de l’autre côté des collines du Golan ? N’en doutons pas. Nous savions déjà que de la révolte contre Damas et des manœuvres qui lui sont connexes, ne visent pas seulement la Syrie, mais aussi la Palestine, le Liban et l’Iran…
Cette fois-ci seulement, c’est « eux » qui le disent !
Notes :
1- Le vote du lundi 28 qui intervient après une semaine d’affrontements place Tahrir qui ont fait 42 morts et 3 000 blessés, ne concerne qu’un tiers des gouvernorats soit 17,5 millions sur quelque 40 millions d’électeurs, notamment au Caire, Alexandrie et Louxor en Haute Égypte.
Les Frères musulmans qui disposent d’une véritable organisation escomptent 30% des suffrages. Les résultats définitifs ne seront pas connus avant mi-janvier 2012.
2 – Les deux hommes sont ceux qui ont couvert les programmes dit de « restitution extraordinaire » de la CIA quant à l’hébergement et au « traitement » de certains prisonniers du champ de bataille afghan et irakien, soumis à des interrogatoires « non conventionnels » ne pouvant être conduits sur les bases ou le territoire américains. Cf. Parlement canadien : http://www.parl.gc.ca/Content/LOP/r….
3 – Il ne sort malheureusement pas que du bon pour les semeurs de zizanie de la Boîte de Pandore qu’ils ont ouverte : encore ce 28 nov. au matin des « saboteurs » ont fait sauter dans le Sinaï pour la 9e reprise un gazoduc alimentant Israël à l’heure où les bureaux de votes commençaient à ouvrir… un avertissement représentatif de la poudrière que devient à vitesse grand V l’Égypte du Siècle des tempêtes. L’Égypte fournit 43% du gaz naturel consommé en Israël à partir duquel 40% de sa consommation électrique est produite. Le gaz égyptien couvre également 80% des besoins jordaniens pour sa propre production d’électricité, soit 6,8 millions de mètres cubes de gaz quotidiens.
4 – L’éternel prétexte humanitaire dont les corridors sont un fleuron, brandi par tous ces gens qui entendent nous faire croire en leurs impérieux sentiments « moraux ». Mais lors que l’armées américaines massacrait en Afghanistan, dans le mépris plus absolu des lois et coutumes de guerre, des prisonniers (l’écrasement sous les bombes de la prison forteresse de Kalat i Jambi ou ce fameux convoi de prisonniers du champ de bataille qui n’achemina à Bagram en décembre 2001 que des cadavres mitraillés), ou lorsqu’en février 1991, elle enterrait vivants les fantassins de Saddam dans leurs tranchées à la frontière koweitienne, sonnés qu’ils étaient par deux semaines de bombardement, ou encore quand l’aviation coalisée carbonisait des colonnes de fuyards sur « l’autoroute de la mort » à coup de bombes à dépression, ou bien quand le généralissime Schwarzkopf engageait sereinement une « bataille d’annihilation » – qu’il ne conduisit pas à son terme – c’est-à-dire de destruction totale des personnels ennemis, en l’occurrence les 500 000 soldats irakiens déployés face à la coalition occidentale… sans oublier les engins au phosphore lancées sur les civils gazaouis en 2009 à l’occasion de l’Opération Plomb durci et de ses 13 000 morts… lesquelles n’émurent pas grand monde dans la classe médiatique. Aucune des grandes gueules qui posent aujourd’hui à l’autorité morale ne l’ouvrait alors. Or c’est l’héritage de siècles et de la civilisation qui se trouve bafoué, refoulé et nié dans et par une telle attitude !
5 – La solidarité sunnite se trouve également à l’œuvre au nord du Liban. Les camps palestiniens près de Saïda regroupent de nombreux salafistes entraînés, ceux-là qui en 2008 donnèrent du fil à retordre à l’armée libanaise. De source locale fiable, environ 17 000 – chiffre considérable – de ces combattants, aguerris sur différents théâtres d’opérations, seraient déjà « opérationnels » en Syrie.
6 – Selon les Izvestia, le porte-avion russe, Amiral Kouznetsov, vient en effet de quitter la Mer de Barents avec son escadre à destination de la base navale russe dans la rade syrienne de Tartous qui devrait atteindre en janvier 2012n officiellement pour une simple escale prévue depuis 2010. L’analyste dissident T. Meyssan signale depuis Damas que la Russie aurait également envoyé deux croiseurs à Tartous où du matériel de guerre serait dès à présent débarqué « à flux tendu comme à l’époque d’Andropov ». – Voir aussi Russia warships to enter Syria waters in bid to stem foreign intervention. Haaretz – 18 nov. 2011. Il aura fallu attendre le 28 nov. Pour que l’AFP diffuse cette information.
7 – 23 nov. 2011. AP. Le président Dimitri Medvedev a déclaré mercredi que la Russie déploierait ses missiles vers les sites américains anti-missile en Europe si Washington continuait à ignorer les demandes de Moscou relatives à ce « bouclier ». De son côté la Maison Blanche a fait savoir que les États-Unis ne limiteront pas ou ne changeront pas leurs projets dans ce domaine en dépit des nouvelles menaces de la Russie.
Léon Camus