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Syrie : l’auteur US de la mission « On garde le pétrole » se démarque déjà de son échec prévisible


Le Saker
Moon of Alabama

Dimanche 17 novembre 2019

Par Moon of Alabama ? Le 15 novembre 2019
Les néocons qui ont dupé le président Trump dans le but de « voler le pétrole » en Syrie prennent déjà leurs distances. Ils savent que cela se soldera par un échec.

Hier, le New York Times a tenté d’insinuer que l’armée américaine était derrière l’idée de voler le pétrole syrien :

Quelques jours après la décision abrupte du président Trump de retirer mille soldats américains de Syrie, le général Mark A. Milley, président du Joint Chiefs of Staff [état-major interarmes], a trouvé un moyen de remédier à la situation.

L’homme d’affaires tapi dans M. Trump s’est concentré sur les gisements de pétrole syriens qui, s’ils ne sont pas protégés, pourraient tomber entre les mains de État islamique – de la Russie ou de l’Iran. Le général Milley proposa donc à un Trump très réceptif, que des commandos américains ainsi que des combattants kurdes syriens alliés gardent le pétrole.

Aujourd’hui, il reste 800 soldats américains en Syrie.

« Nous conservons le pétrole », a déclaré M. Trump à la presse mercredi avant sa rencontre avec le président turc Recep Tayyip Erdogan. « Nous avons laissé des troupes derrière nous, uniquement pour le pétrole. » …

« Je reconnais que Milley a convaincu le président de modifier sa décision concernant la Syrie », a déclaré Jack Keane, ancien vice-chef d’état-major de l’armée, qui s’est entretenu à plusieurs reprises avec M. Trump et le général Milley le mois dernier pendant les journées effrénées de la politique erratique du président pour la Syrie.

Mais l’article dit plus tard que ce n’était pas l’idée du général Milley. Il avait différents plans :

Une proposition consistait à garder une force légère pour aider à contrôler une petite bande de la frontière entre l’Irak et la Syrie, environ 10% de la zone. Une autre option serait d’essayer de garder le contrôle d’une plus grande partie du pays – plus de la moitié de la zone contrôlée actuellement par les combattants américains et kurdes.

Mais après que M. Trump eut déclaré au général Milley qu’il souhaitait conserver les gisements de pétrole, le Pentagone a rapidement « mis en œuvre » un nouveau plan faisant appel aux forces américaines et à leurs alliés kurdes pour protéger le pétrole …

L’information est également en contradiction avec les précédents rapports de NBC selon lesquels c’est le directeur de Institute for the Study of War, le néocon Jack Keane lui-même, et le sénateur démocrate Graham Lindsay, également néocon, qui ont piégé Trump dans ce plan stupide :

Quelques jours après que le président Donald Trump a ouvert la voie à l’invasion de la Syrie par la Turquie, plusieurs de ses alliés les plus proches se sont rendus à la Maison-Blanche pour tenter de le faire changer d’avis, selon quatre personnes au courant des entretiens.

Le 8 octobre, le général retraité Jack Keane, analyste chez Fox News, a présenté au président une carte montrant la Syrie, la Turquie et l’Irak, indiquant l’emplacement des gisements de pétrole dans le nord de la Syrie contrôlés par les États-Unis et leurs alliés kurdes, ont déclaré deux personnes familiarisées avec la discussion. Keane a expliqué que ce pétrole tomberait entre les mains de l’Iran si Trump retirait toutes les troupes américaines du pays.

Keane a refait le même exercice avec Trump le 14 octobre, cette fois avec le sénateur Lindsey Graham à ses côtés, selon quatre personnes présentes à la réunion. Keane a affiché une carte montrant que près des trois quarts des gisements de pétrole de la Syrie se trouvent dans les régions du pays où les troupes américaines sont déployées, ont déclaré les habitués de la réunion. Ils ont déclaré que Graham et Keane avaient informé le président que l’Iran se préparait à se diriger vers les champs de pétrole et pourrait saisir l’espace aérien situé au-dessus d’eux une fois que les États-Unis seraient partis.

Alors, pourquoi Keane essaie-t-il maintenant de blâmer le général Milley, président du Joint Chiefs of Staff, d’avoir provoqué ce non-sens ?

Il se peut qu’il reconnaisse que l’opération va probablement mal tourner.

La lutte contre ISIS a été menée par des unités agiles de la force spéciale américaine, légèrement équipées, formées à travailler avec les forces de substitution locales. Celles-ci ont maintenant été remplacées par des unités plus lourdes de l’armée équipées de véhicules de combat d’infanterie.

Ces véhicules à chenilles ont besoin de beaucoup d’essence et d’entretien. Cette logistiques est facile à attaquer.

Les forces spéciales américaines étaient auparavant rejointes par des forces françaises et britanniques. Ces alliés ne sont pas disposés à se joindre à la mission voler le pétrole :

Lors d’une réunion de haut niveau du département d’État prévue jeudi, les diplomates de 35 nations et organisations internationales seront invités à poursuivre la campagne d’éradication du groupe extrémiste, même après la mort de son chef, Abu Bakr al-Baghdadi, lors d’un raid américain le mois dernier.

Mais la confusion entourant la politique de l’administration Trump dans le nord-est de la Syrie a découragé les alliés, selon plusieurs diplomates, qui ont indiqué qu’ils avaient émis des doutes sur le fait que quels que soient les accords les accords éventuellement conclus ils pourraient être annulés par le président. …

Un diplomate étranger a déclaré que la réunion de jeudi porterait sur ce qu’il a décrit comme une perte de stratégie claire des États-Unis en Syrie. Un autre a prédit que les pourparlers de haut niveau ne seraient rien d’autre que des rencontres de courtoisie.

Les diplomates savent également que cette mission rampante fait partie du nouveau plan :

« Il est clair que le président a été convaincu de retenir des troupes sur la seule base qui aurait pu l’intéresser – l’existence du pétrole », a déclaré Charles R. Lister, chercheur principal à l’Institut du Moyen-Orient. « Mais l’appareil gouvernemental américain, beaucoup plus important, tente de l’utiliser pour dissimuler une stratégie plus significative, moins ambiguë et plus durable, axée sur la lutte contre le terrorisme tout en réaffirmant son pouvoir de pression sur Damas. »

Le nouveau plan néocon est toujours l’ancien. Utiliser les terroristes pour parvenir à un « changement de régime » en Syrie. Il va (encore) échouer.

L’armée américaine dans l’est de la Syrie paiera des Kurdes du PKK pour les utiliser comme gardes et pour filtrer la région. Mais les zones pétrolifères sont arabes et les Kurdes du PKK sont très détestés par la population arabe.

Il est peu probable que les habitants se réjouissent de voir le pétrole volé par des étrangers. Ils ont tiré profit de la contrebande de pétrole dans les zones contrôlées par le gouvernement et résisteront à une occupation américaine ainsi qu’aux Kurdes qui s’ingèrent dans leurs affaires. Un certain nombre de personnes de cette région avaient rejoint État Islamique et sont revenues au rôle de «civil local» lorsqu’il est devenu évident que ce dernier avait perdu la bataille. Certains d’entre eux seront – encore – disposés à se battre.

Hier, le président syrien Bashar Assad a accordé une interview à deux chaînes de télévision russes au cours de laquelle il avait prédit exactement ce qui suit :

Question 12 : Monsieur le président, selon les médias, Trump a annoncé une expansion de la présence américaine en Syrie, en particulier dans le nord-est du pays, sous prétexte de protéger les champs de pétrole. Existe-t-il une solution militaire à ce problème ? Et quand une telle opération militaire commencerait-elle ?

Président Assad : J’ai toujours dit qu’un occupant ne peut occuper un terrain sans avoir des agents dans ce pays, car il lui serait difficile de vivre dans un environnement complètement hostile. Par conséquent, la solution immédiate et la plus efficace consiste à nous unir en tant que Syriens et en tant que patriotes. Cela ferait partir les Américains et ils ne pourraient pas rester, ni pour le pétrole ni pour rien d’autre.

Cependant, avec le temps, quand l’occupant reste – l’expérience de l’Irak est encore fraîche dans l’esprit des Américains et le résultat, pour eux, était inattendu ; pour nous cependant, c’était clair et j’ai dit dans une de mes interviews après l’invasion de l’Irak en 2003 que l’occupation engendrerait une résistance militaire. De même, la présence américaine en Syrie va générer une résistance militaire qui entraînera des pertes chez les Américains et les obligera par conséquent à partir. Bien sûr, nous n’envisageons pas une confrontation russo-américaine, cela va de soi et elle ne sert ni nos intérêts, ni ceux des Russes, ni la stabilité internationale ; c’est dangereux. Cependant, l’Amérique ne peut pas croire qu’elle vivra confortablement dans n’importe quelle région occupée. Nous leur rappelons l’Irak et l’Afghanistan, la Syrie ne fera pas exception.

Assad a également exprimé une vision réaliste du système gouvernemental américain :

Question 13 : En ce qui concerne le comportement américain ici, en particulier en ce qui concerne le pétrole syrien, ne croyez-vous pas que ce comportement est celui d’un gouvernement mafieux ? Et quelles sont les pertes pour la Syrie du fait du comportement de Washington ?

Président Assad : Vous avez absolument raison, non seulement parce qu’ils pillent le pétrole, mais aussi parce que l’Amérique est structurée comme un système politique de gangs. Le président américain ne représente pas un État – il est le PDG de la société États-Unis. Derrière ce PDG, il y a un conseil d’administration qui représente les grandes sociétés américaines – les véritables propriétaires de l’État – sociétés pétrolières et armées, banques et autres groupes de pression. En ce qui concerne le pétrole syrien, il s’agit donc du résultat attendu du régime américain, dirigé par des sociétés agissant pour leurs propres intérêts.

Assad poursuit en expliquant que voler le pétrole était également la raison pour laquelle les nazis ont envahi l’Union soviétique. Il observe en outre :

Nous pouvons très simplement assimiler la politique américaine d’aujourd’hui à la politique nazie : expansion, invasion, atteinte aux intérêts d’autres nations, violation du droit international, des conventions internationales, des principes humains et autres, le tout pour le bien du pétrole. Quelle est la différence entre cette politique et la politique nazie ? Quelqu’un du régime américain peut-il nous donner une réponse à cette question ? Je ne le pense pas.

Récemment, le ministre russe des Affaires étrangères, Sergueï Lavrov, a commenté la politique américaine en Syrie :

L’opération [turque] Peace Spring n’a pas été approuvée par la Russie. Les États-Unis l’ont approuvée, si vous avez bien compris les faits. Ils ont essayé de négocier avec la Turquie mais ont ensuite déclaré qu’ils ne pourraient pas parvenir à un accord. «Kurdes, vous êtes seuls, nous partons». Puis, après avoir abandonné les Kurdes et quitté la Syrie, ils ont dit qu’ils n’avaient plus d’obligations envers les Kurdes, mais ils reviennent pour le pétrole – pas pour les Kurdes. Ce sont des zigzag intéressants en politique étrangère. Revenons à Churchill, qui a déclaré que les Américains finissaient toujours par faire la bonne chose, mais seulement après avoir essayé tout ce qui ne marchait pas.

Lavrov a également laissé entendre que les États-Unis soutiennent toujours les djihadistes :

J’ai des raisons de croire, à partir des exemples réels de ces dernières années, que les États-Unis soutiennent toujours al-Nusra malgré le fait que cette organisation ait été répertoriée aux États-Unis comme terroriste. Ils voient dans al-Nusra un contrepoids au gouvernement syrien. C’est une autre erreur, après avoir misé sur les moudjahidines, qui ont organisé l’attaque terroriste du 11 septembre. Après avoir fait ce qu’ils ont fait en Irak, État islamique est né. Et maintenant, ils préparent al-Nusra dans l’espoir de pouvoir les contrôler. C’est une illusion.

Dans une autre interview, le patron de Lavrov, le président Vladimir Poutine, a également mis son grain de sel :

[Poutine] a ajouté qu’il considérait la présence américaine en Syrie comme illégitime car « des unités armées y sont stationnées, sans l’invitation du gouvernement syrien, ni dans le cadre d’une résolution du Conseil de sécurité de l’ONU ». « Cette présence militaire est illégale », a-t-il souligné.

La mission voler le pétrole est illégale en vertu de la législation internationale et probablement aussi en vertu de la législation américaine. C’est pourquoi aucune grande compagnie pétrolière ne voudra s’y mêler.

Toute l’opération est vouée à l’échec.

Les États-Unis ont envoyé des unités lourdes qui sont assez statiques et nécessitent beaucoup de maintenance et de fournitures qui peuvent être attaquées. Il n’a aucun allié, à l’exception de quelques Kurdes du PKK / YPG, que les Arabes locaux n’apprécient pas. La résistance à la mission augmentera et les troupes américaines subiront des pertes. Ensuite, Trump leur ordonnera à nouveau de se retirer.

C’est pourquoi Keane affirme maintenant que voler du pétrole n’était pas son idée, mais celle du général Milley. Il ne veut pas qu’on se souvienne de lui pour avoir causé le gâchis facile et prévisible dans lequel l’opération se terminera.

Les troupes russes viennent de prendre le contrôle d’une base aérienne utilisée par les forces spéciales américaines pour se réapprovisionner. Ils ont trouvé (vidéo) des locaux climatisés prêts à l’emploi avec de bons matelas, du matériel de gymnastique, des équipements de divertissement et des équipements médicaux. Ils mettront tout cela à profit.

Ils feront bientôt de même avec les nouvelles bases que l’armée américaine construit maintenant près des champs de pétrole.

Moon of Alabama

Traduit par jj, relu par Hervé pour le Saker Francophone

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Source : Le Saker Francophone
https://lesakerfrancophone.fr/…

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