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Chaos en Irak : à qui la faute ?


BOULEVARD VOLTAIRE

Chaos en Irak : à qui la faute ?
¡Mujeres-de-todo-el-mundo-uníos

Le 25 juin 2014
Les Américains commencent à être effrayés par ces alliances conclues au milieu du siècle dernier, obligés de ménager leurs vieux amis tout en se demandant s’ils n’auraient pas, au bout du compte, joué le mauvais chameau.

C’est peu de le dire, mais rien ne va plus en Irak et ses proches environs. Les djihadistes sunnites de l’EIIL (État islamique en Irak et au Levant) progressent de jour en jour, bousculant une armée irakienne à forte majorité chiite, pourtant plus de dix fois supérieure en nombre ; ce qui, au passage, est proportionnel à la démographie locale.

La raison d’une telle débandade tient peut-être au fait que cette dernière a été entraînée par des Américains qui, après avoir à moitié rasé le pays en 1990, l’avoir ensuite affamé plus de dix ans durant et l’ayant encore envahi en 2003, n’ont rien trouvé de plus judicieux à faire, pour réorganiser ladite armée, que de licencier tous ses cadres, sunnites laïcs et membres du parti Baas pour la plupart, qu’on retrouve aujourd’hui à encadrer leurs frères ennemis islamistes. Quelle réussite, à la fois militaire et diplomatique…

La Maison-Blanche voulait remodeler le Proche et le Moyen-Orient ; voilà qui est fait, mais pas de la manière dont leurs brillants stratèges l’avaient forcément envisagée. Enfin, si le but était de démembrer le tout en bantoustans ethnico-confessionnels, le but aura été atteint au-delà des espoirs les plus fous… Avec Israël qui se frotte les mains, mais pas tant que ça, l’État hébreu étant susceptible de tôt regretter le temps du Hamas, avec lequel il est toujours possible de négocier, parce que discipliné, alors que les autres…

Cela posé, deux faits majeurs s’imposent. Les frontières issues des accords Sykes-Picot, signés en 1916, sont en train de voler en éclats. Il s’agissait déjà d’une cote mal taillée, puisque visant à transformer les provinces des califats de jadis en États-nations à l’européenne ; cote d’autant plus mal taillée que les territoires ancestraux de tel ou tel peuple se virent amputés de telle ou telle terre, tandis que les Anglais conservaient du sable gorgé de pétrole, et nous, Français, du sable submergé d’emmerdements à venir.

Ensuite, ce conflit entre sunnites et chiites, un temps mis sous le boisseau, du temps de ces régimes socialistes et laïcs que les USA n’ont eu de cesse d’abattre, préférant « dealer » avec les wahhabites saoudiens.

Les pires des guerres sont intra-religieuses : musulmans contre musulmans ; comme les Européens autrefois, entre catholiques et protestants. C’est exactement ce qui se passe aux confins de l’Irak et de la Syrie. Dans l’affaire, les chrétiens ne sont que victimes collatérales, et les géopoliticiens de comptoir qui résument l’affaire en un affrontement entre méchants musulmans et gentils chrétiens doivent avoir lu plus souvent les œuvres de Danièle Gilbert que celles de Jacques Bainville.

Dans une tribune récemment publiée dans Le Figaro, l’ancien Premier ministre Dominique de Villepin ne disait finalement pas autre chose. D’un côté, l’arc chiite, qui va de l’Iran jusqu’au Liban en passant par la Syrie. De l’autre, la puissance financière sunnite de l’Arabie saoudite et des Émirats, Qatar en tête, qui financent ces djihadistes sunnites du genre énervé tentant de créer un califat nouveau, à cheval entre Irak et Syrie ; même les fous furieux de la secte Boko Haram bénéficient de leurs subsides… Jusqu’au jour où ils se retourneront contre leurs bailleurs de fonds, mécréants naviguant à vue entre caisses de whisky, putes à volonté et bases américaines installées près des lieux saints.

De fait, les Américains commencent à être effrayés par ces alliances conclues au milieu du siècle dernier, obligés de ménager leurs vieux amis tout en se demandant s’ils n’auraient pas, au bout du compte, joué le mauvais chameau. Car à long terme, le gagnant de cette partie de poker menteur sera l’Iran, seule puissance stable de la région, avec laquelle les USA tentent de recoller les morceaux. Sans oublier la Turquie, discrète pour le moment, mais jusqu’à quand ?

De son côté, la France ne dit rien. Comme depuis trop longtemps, sachant que ce qui nous reste de politique arabe se limite à Barbès-Rochechouart, pour reprendre le mot célèbre de Michel Jobert.

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