Comment « l’israël » fait de l’argent avec du sang.
octobre 21, 2013
Lundi 21 octobre 2013
Vacy Vlazna
Le documentaire de Yotam Feldman intitulé « HaMaabada » (Le Laboratoire), sorti en août dernier, est une des plus importantes révélations sur les raisons et la mise en œuvre obscènes des très lucratives industries israéliennes que sont l’armement et la sécurité, à travers la voix de certains de ses principaux ex-opérateurs militaires : Amos Golan, Shimon Naveh, Leo Gleser, et Yoav Galant.
Attention ! « Le Labo » contient du porno guerrier et du mal pur et dur : à voir et à pleurer.
Le mastodonte de l’armement israélien a un chiffre d’affaires de plus de 7 milliards de $ et comme le révèle Feldman, ce succès phénoménal est dû à l’expérience, acquise en testant l’armement sur la population palestinienne dans les laboratoires militaires israéliens que sont Gaza et la Cisjordanie.
« Je pense que le principal produit que vendent les Israéliens, en particulier au cours de la dernière décennie, c’est l’expérience … le fait que les produits ont été testés, l’expérience : c’est la chose essentielle qu’ils [les clients] viennent acheter. Ils veulent le missile qui a été tiré dans la dernière opération à Gaza, ou le fusil utilisé lors du dernier raid en Cisjordanie ».
Sans broncher, Benjamin Ben Eliezer, ministre de l’Industrie, avance fièrement la raison de la phénoménale demande d’armes et de technologie israéliennes. « Quand Israël vend des armes, elles ont été testées, essayées. Nous pouvons dire : nous avons utilisé ceci pendant 10 ans, 15 ans ».
Testées par des tueurs israéliens sur les 1398 enfants palestiniens tués depuis 2000 et sur les centaines de milliers d’enfants qui se débattent avec des traumatismes de guerre, des états de stress post-traumatiques et des terreurs perpétuelles.
Le Labo explique pourquoi le processus de paix – passé, présent et potentiel – est une imposture absolue. L’économie d’Israël est inextricablement dépendante de la guerre et de la souffrance des Palestiniens.
« Et par ailleurs il y a le fait qu’aujourd’hui l’économie israélienne est tellement dépendante de ces opérations. C’est 20 % des exportations. Ce sont 150 000 familles – pas personnes – en Israël qui dépendent en fait de cette industrie. Et si un jour ça s’arrêtait, s’il n’y avait pas de prochaine opération à Gaza, alors Israël aurait quelques problèmes économiques ».
« L’industrie de l’armement n’appartient pas à quelques marchands, elle est propriété de tout un pays »
Quelle meilleure justification du mouvement Boycott, Désinvestissement et Sanctions (BDS) qui cible des entreprises publiques et privées ainsi que toutes les universités israéliennes, à travers leurs programmes de recherche et développement militaires, qui « changent le sang en argent »
Quel fusil a fait monter le shekel quand les sœurs Amal (2 ans) et Suad Abed-Rabo (9 ans), qui agitait un drapeau blanc, furent abattus par l’équipage d’un tank à Gaza ?
La dégradation de l’esprit et de la société d’Israël via la normalisation perverse d’une agression cruelle et d’une criminalité violente, sanctionnées par l’État, se manifeste tout au long du film dans l’arrogance vaniteuse des seigneurs de guerre, politiciens et marchands d’armes israéliens, qui oublient qu’aux yeux des gens civilisés ils apparaissent comme des psychopathes :
Général (retr.) Amiran Levin : « Je voudrais mentionner un point, parlant de Gaza, parlant du Liban et d’autres endroits que nous occuperons dans le futur. Puisque nous voulons maintenir l’équilibre, comme un pays développé, le châtiment comme stratégie devrait être l’élément majeur … C’est la chose la plus importante, la quantité est plus importante que la qualité. La faute que l’armée commet, c’est de juger chaque cas individuellement, que la personne mérite de mourir ou non. La plupart de ces gens sont nés pour mourir, nous avons juste à les aider ».
Lt.Co.(retr.) Shimon Naveh, un philosophe militaire, oui vous avez bien lu, un philosophe militaire qui parle comme s’il avait ingurgité un kilo d’amphétamines ; il se balade dans un simulacre de village arabe criblé de balles, servant à des exercices militaires, et se lamente : « Comme vous pouvez le voir, ceci n’est pas un village arabe. C’est un endroit mort. Peut-être que dans nos rêves les plus roses c’est à cela qu’un village palestinien ressemblerait, mais ce n’en est pas un ».
Le général Yoav Galant, le « créateur » de l’Opération Plomb Durci en 2008-2009 : « En ce qui me concerne, l’ennemi a 3 options, soit il est tué, soit il se rend, soit il fuit ». Galant omet de dire que 1,6 million d’hommes, de femmes, d’enfants et de vieillards de Gaza (et en l’occurrence tous les Palestiniens) n’ont nul lieu où fuir, parce qu’Israël contrôle fermement la terre, la mer et l’espace aérien de Palestine.
Nous comprenons donc que les Israéliens ont une stratégie identique de guerre de faible intensité ou de asymétrique à celle des États-Unis : ils n’attaquent que des nations qui sont à genoux, usant de sièges, de sanctions et d’armements hors-normes.
Dans une interview au Small Wars Journal, Naveh reconnaît : « Quand vous menez une guerre contre un rival qui est de toute façon inférieur à vous, vous pouvez perdre un gars ici ou là, mais vous contrôlez absolument tout. C’est agréable. Vous pouvez prétendre que vous faites la guerre et pourtant ce n’est pas une guerre vraiment dangereuse ».
Hormis les combattants pour la liberté du mouvement Hamas, armés de kalashnikovs et « d’un modeste stock d’armes », la Palestine n’a ni armée, ni marine, ni force aérienne pour défendre son peuple. Bien sûr, il y a les forces de sécurité du Président Abbas armées et entraînées par les États-Unis, mais elles font avec brutalité la police contre leur propre peuple au profit d’Israël.
Feldman montre comment les plus grosses entreprises d’armement israéliennes rendent la vente d’armes séduisante. Lors d’un salon de l’armement à Paris, une jeune VRP guillerette démontre sur écran le potentiel de précision des produits de l’industrie israélienne de l’armement, et à la base militaire de Shivta, les officiers étrangers venus assister à une démonstration de missile sont répartis en groupes menés par de « charmantes » soldates israéliennes.
Des gouvernements étrangers comme l’Australie contribuent généreusement à multiplier les bénéfices des marchands de mort israéliens tout en apaisant les craintes de leurs électorats. Galant s’en plaint : « Il y a beaucoup d’hypocrisie, ils vous condamnent politiquement, tout en vous demandant quelle est votre recette, à vous Israéliens, pour transformer le sang en argent ».
N’empêche que les profits pour Israël, tels qu’il les précise, sont les suivants :
« Tout d’abord il gagne sécurité, d’autre part les nations et les armées du monde veulent être amis avec le fort, en être proches, et être du côté des vainqueurs. »
Fort, oui, JUSTE ? Pas selon les parents de la petite Ahmed As-Sinwar âgée de 3 ans qui a été retrouvée sous un tas de gravats et de pierres avec un trou dans sa tête, et certainement pas selon les parents des 352 autres enfants tués, plus des 860 enfants blessés et mutilés qu’a laissés l’Opération Plomb Durci, l’offensive israélienne par missiles air-sol, tirs d’artillerie, bombes au phosphore, obus avec fléchettes, balles, et par les munitions non explosées.
Il est tout à fait macabre et au-delà de toute compréhension décente que les ventes de drones aient été stimulées par les meurtres délibérés de 116 enfants par ces avions sans pilote, pendant la même Opération Plomb Durci..
Le plus haut échelon du gouvernement israélien a le contrôle total de l’industrie de la mort. Toutes les exportations d’armes et de services de sécurité sont validées par SIBAT , l’agence d’exportation du ministère israélien de la Défense.
Amos Golan, un marchand d’armes qui a commencé « avec un rêve », se considère lui-même comme un « bon gars », et pas quelqu’un qui tue des gens innocents dans ses temps libres. C’est un ancien commandant de l’unité des forces spéciales Duvdevan, qui a pour spécialité de mener des opérations d’infiltration avec des agents déguisés en arabes, et qui est l’inventeur du fusil d’assaut Cornershot, – invention très rentable – le fusil de sniper qui permet au tireur de voir dans les coins.
Son service clé-en main Silver Shadow Security Systems Advanced ( Ssass ), soutenu à l’exportation par le SIBAT, a fourni des solutions de sécurité et de la formation pour les dictatures de la République du Congo, du Nigeria et de l’Ouganda, où l’escadron de la mort Black Mamba formé par le Ssass est accusé de violations des droits de l’homme.
Leo Gleser, un brave père et grand-père, affirme que depuis le 11/9 « toutes les solutions de la défense sont maintenant fournies par Israël par le biais de sociétés israéliennes. » Qui aurait pensé que le 11/9 bénéficierait tant à Israël ? Sa propre entreprise, la International Security and Defense Systems (ISDS), affiliée au SIBAT, qui a été « créé en 1982 par des officiers expérimentés, d’anciens agents de l’ISA, l’agence de sécurité israélienne, le Mossad et les Forces de défense » » compte parmi ses références les Jeux Olympiques d’Athènes, de Barcelone, de Pékin et de Rio, et la coupe du monde de football de 2014. Des coentreprises ont été mises en place pour la formation en matière de sécurité avec la Chine, l’Inde, le Brésil, l’Espagne et États-Unis.
La même société sert également l’Organisation des Nations Unies, qui semble avoir oublié que la compagnie de Gleser a formé, dans les années 80, le violent Bataillon du Honduras 3-16 du Honduras, soutenu par la la CIA et impliqué dans la disparition de 191 personnes. ( Ceci a été documenté dans le livre de Andrew et Leslie Cockburn : Dangerous Liaison – The Inside Story of the US-Israeli Covert Relationship).
Le criminel de guerre et tueur d’enfants, Noav Galant, alors qu’il était pressenti pour devenir le prochain chef d’état-major général, a pris sa retraite en raison d’allégations selon lesquelles il s’appropriait des terres publiques près de chez lui pour son usage privé, ce qui est ironique par excellence étant donné qu’il participe à la direction de HaChadash HaShomer qui aide « les agriculteurs et les éleveurs israéliens dans le Néguev et la Galilée qui administrent de vastes étendues de terres appartenant à l’État, à faire face à la menace d’une saisie illégale de leurs terres », c’est-à- dire à empêcher « l’empiètement continu de les Bédouins sur des terres appartenant à l’Etat », lesquelles nous le savons tous, sont des terres bédouines ancestrales volées par Israël. Comme nous le constatons, Galant est passé maître en hypocrisie.
L’exposition par Le laboratoire des profits réalisés par Israël pour son expertise et le trafic d’armes n’a rien de nouveau et a déjà été bien documenté comme dans l’ouvrage de Jane Haapiseva-Hunter sur La politique étrangère israélienne : l’Afrique du Sud et l’Amérique centrale. L’impact du documentaire réside dans le fait d’entendre et de voir directement nous-mêmes les psychopathes israéliens admettre gaiement faire beaucoup d’argent grâce aux nettoyage ethnique et aux génocide.
Feldman termine Le laboratoire par un sommet d’ironie cruelle : lors d’une conférence, ces gros asticots israéliens nourris de cadavres, hochent la tête et sourient en écoutant la belle et inspirée chanson de John Lennon, « Imagine ».
« Imaginez tous les peuples du monde,
Vivant en paix … »
* Vacy Vlazna militante australienne, est actuellement coordinatrice de Justice pour les Affaires palestiniennes. Elle a travaillé dans les négociations de paix d’Aceh et du Timor-Est.