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Kerry- Lavrov : Sykes-Picot du XXIe siècle ?


Kerry- Lavrov

«La vie humaine est une valeur qui n’a pas de prix, tout ce qu’on appelle réformes, droits de l’homme et démocratie ne valent pas le sang d’un seul homme innocent».

Le Patriarche Raï

Il semble que le drame du peuple syrien connaîtra son épilogue à en croire les rumeurs, supputations et autres analyses. De quoi s’agit-il ? Ni plus ni moins d’un nouveau partage du monde entre les grands. Pour l’histoire récente ,  souvenons-nous de Yalta, du «rideau de fer» entre un Occident dit «libre» et un Empire du «mal», pour reprendre l’expression de Ronald Reagan. Une trentaine d’années plus tôt, il y eut un partage du monde entre les deux «puissances» de l’époque, la perfide Albion (l’Angleterre) et le Coq gaulois (la France) qui guerroyaient tantôt de concert, notamment pour démolir la Chine, tantôt l’un contre l’autre par pays faibles interposés. Les Etats-Unis n’avaient pas encore atteint le sommet de leur puissance,  la Russie et la Chine étaient engluées dans leurs contradictions internes.

Les accords Sykes –Picot

Nous sommes en 1916, le conflit a deux ans, l’Empire ottoman «l’homme malade de l’Europe» est du côté allemand. C’est l’occasion pour les deux acolytes anglais et français de donner le coup de grâce à l’empire vermoulu et qui n’a jamais connu de repos depuis plus d’un siècle, constamment attaqué par ces deux puissances qui, au nom de la protection des minorités (Guerres du Levant), dépeçaient méthodiquement l’empire. Les accords Sykes-Picot sont justement des accords secrets signés le 16 mai 1916, entre la France et la Grande-Bretagne (avec l’aval des Russes et des Italiens), prévoyant le partage du Moyen-Orient à la fin de la guerre (espace compris entre la mer Noire, la mer Méditerranée, la mer Rouge, l’océan Indien et la mer Caspienne) en zones d’influence entre ces puissances, dans le but de contrer des revendications ottomanes. (…) Aux États-Unis, le président Woodrow Wilson, -scandalisé par l’accord- tentant de mettre en avant l’argument de l’autodétermination des peuples, en vain. Les Français et les Britanniques se mettent d’accord sur les frontières à la conférence de San-Remo, en avril 1920.

Obama et Poutine et le partage du Proche-Orient

Dans un article publié le 26 janvier dernier en Russie, Thierry Meyssan expose le nouveau plan de partage du Proche-Orient sur lequel travaillent la Maison-Blanche et le Kremlin. L’auteur y révèle les principales données de la négociation en cours sans préjuger d’un accord définitif, ni de sa mise en oeuvre. L’intérêt de l’article est qu’il permet de comprendre les positions ambigües de Washington qui pousse ses alliés dans une impasse de manière à pouvoir leur imposer prochainement une nouvelle donne dont ils seront exclus. «Le président Obama, écrit Thierry Meyssan, s’apprête à changer complètement de stratégie internationale malgré l’opposition que son projet a suscité dans sa propre administration. Le constat est simple. Les États-Unis sont en passe de devenir indépendants sur le plan énergétique grâce à l’exploitation rapide des gaz de schiste et du pétrole des sables bitumineux. Par conséquent, la doctrine Carter (1980) ,selon laquelle la sécurisation de l’accès au pétrole du Golfe est un impératif de sécurité nationale, est morte. De même d’ailleurs que l’Accord du Quincy (1945) selon lequel Washington s’engage à protéger la dynastie des Séoud si ceux-ci leur garantissent l’accès au pétrole de la péninsule arabique. (…) D’autre part, tout doit être fait pour empêcher une alliance militaire sino-russe ». (1)

Nous sommes loin de l’époque guerrière de Bush. Avec Obama , c’est le «soft power» en action.  Avec Bush, c’était l’affrontement à outrance. Marco d’Eramo nous rappelle un rapport de 2006: «Pour la Maison-Blanche, la planète de l’an 2006 se domine avec les mêmes oeillères et la même agressivité préventive qu’il y a quatre ans. C’est ce qu’on apprend de la lecture des 48 pages denses qui composent le nouveau document sur la National Security Strategy (..) Dans le paragraphe sur l’Irak, les stratèges admettent qu’il n’y avait pas d’armes de destruction  massive. Mais, disent-ils presque textuellement , rien à foutre, (…). La nouveauté la plus préoccupante du document se trouve cependant ailleurs, c’est-à-dire dans la nouvelle dureté manifestée à l’égard de la Russie et de la Chine à qui le rapport dispense des conseils assez menaçants, voire de véritables menaces». (3)

Et la Chine ? Et Israël ?

Thierry Messan nous dit que quand les Américains auront les coudées franches en Syrie, ils «s’occuperont «de la Chine». Le temps est venu d’un retrait massif qui permettra de transférer les GI’s vers l’Extrême-Orient afin de contenir l’influence chinoise».

Une analyse sur le site Oulala permet d’expliquer pourquoi la Chine modernise son armée , étant donné qu’au stade impérialiste de développement économique mondial, tous les marchés, toutes les zones de ressources naturelles et toutes les aires d’exploitation de la main-d’oeuvre sont déjà accaparés par l’une ou l’autre des puissances impérialistes. La Chine n’a pour alternative que de mener des guerres commerciales, financières et monétaires de conquête afin de repartager les zones d’influence et d’exploitation hégémoniques. Mais cette retenue et cette diplomatie ne doivent pas faire mirage, la Chine impérialiste commence à s’armer et quand les États-Unis deviendront trop menaçants – eux qui viennent de déplacer leurs flottes de guerre vers le Pacifique, l’Empire du Milieu sera prêt à riposter».(4)

 «Reste Israël qui ne va pas se laisser faire. Nous le voyons déjà par ses tentatives de torpiller la candidature de Hagel au secrétariat à la Défense, coupable selon le Sénat de ne pas avoir suffisament de « feeling « pour Israël. Il a fallu toute sa pugnacité pour qu’en définitive ,le Sénat approuve sa candidature, sans qu’il n’ait rien renié- apparemment- de ses principes

La Syrie est prête au dialogue avec les groupes armés  La conséquence du deal américano-russe se fait jour. En effet, l’espoir peut-il être permis à la faveur des déclarations faites hier à Moscou par le ministre syrien des Affaires étrangères, Walid El-Mouallem, qui, lors d’une rencontre avec son homologue russe Sergueï Lavrov, a déclaré que le régime du président syrien Bachar Al Assad est prêt à dialoguer avec toutes les parties, y compris les groupes armés : «Nous sommes prêts au dialogue avec tous ceux qui veulent le dialogue, y compris les groupes armés», a déclaré M.Mouallem au début de ses entretiens avec M.Lavrov. Le ministre russe a, lui, déclaré qu’un règlement politique inter-syrien était la seule solution «acceptable» et que la poursuite de l’effusion de sang pourrait entraîner «l’effondrement» de l’État.

Le secrétaire d’Etat américain, John Kerry, a rencontré mardi dernier à Berlin son homologue russe Sergueï Lavrov. Ces tractations diplomatiques en Europe se déroulent au moment où le régime du président Bachar el Assad se dit prêt, pour la première fois, à dialoguer avec les rebelles armés. MM.Kerry et Lavrov se connaissent du temps où le nouveau secrétaire d’Etat présidait la commission des Affaires étrangères du Sénat. (…) Un responsable du département d’Etat a ainsi expliqué aux journalistes accompagnant M.Kerry que «la Russie peut jouer un rôle crucial pour convaincre le régime syrien (…) de la nécessité d’une transition politique.»(5)

On comprend aisément la politique américaine  concernant la grande capacité militaire du géant russe  et son faible développement économique  au contraire de la Chine : grande capacité économique et faiblesse militaire. La puissance de frappe et les richesses énergétiques de la Russie sont une réalité: les premières réserves de gaz naturel et de pétrole mais aussi tous les minerais . Contrairement à la Chine très développée mais pauvre en ressources. Du point de vue nucléaire, la Chine est un nain. Poutine est désormais l’homme le plus influent de la planète (il n’a pas cédé sur la Syrie).

Nous assistons certainement à une réorganisation du monde. Les Français et les Anglais cantonnés dans le rôle de supplétifs,nous sommes loin de la politique arabe de De Gaulle ou même du tandem Chirac-De Villepin qui ont dit non à l’Empire , à propos de l’invasion de l’Irak. Les Allemands, qui ont toujours deux fers au feu, vont basculer du côté russe (continuation de la politique de Schröder). Les Français continueront à guerroyer en vain, ils auront leur Afghanistan au Mali et comme le dit un proverbe arabe, «ils mangeront leurs dents».

Chems Eddine Chitour

 

1 Thierry Meyssan http://www.alterinfo.net/  Obama-et-Poutine-vont-ils-se-partager-le-Proche-Orient_a87127.html23 Février 2013

2. http://www.alterinfo.net/Pour-Laïd Seragni Catherine-II-damas-detient-la-cle-de-la-maison-Russie-et-pour-Poutine-elle-est-la-cle-d-une-nouvelle-ere_a87034.html  21 Février 2013

3. http://www.mondialisation.ca/la-russie-et-de-la-chine-sur-la-liste-des-usa/2181

4. C.E.Chitour http://www.mondialisation.ca/etats-unis-chine-russie-le-partage-du-monde/29482

5. Syrie: Kerry rencontre Lavrov à Berlin pour une issue au conflit AFP 26.02.2013

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