La « malédiction syrienne » hante l’Europe
avril 7, 2012
La tendance générale
La « malédiction syrienne » hante l’Europe
L’interdiction de l’entrée sur le territoire français, par Nicolas Sarkozy, du prédicateur extrémiste égypto-qatari Youssef Al Qardhaoui, et la poursuite des efforts pour le démantèlement des cellules terroristes takfiristes sur le sol français, sont un signe que la France est frappée par ce qui est appelée « la malédiction syrienne », surtout que Paris était le fer de lance de l’agression contre la Syrie, menée par les Frères musulmans et consorts.
Depuis le début du printemps arabe, les pays occidentaux se vantent d’héberger les mouvements terroristes qu’ils avaient déjà instrumentalisés pour mobiliser les jeunes arabes dans la guerre afghane contre l’Union soviétique.
La réutilisation de ces mouvements a provoqué un climat politique et médiatique plein de tensions et d’appels à l’extrémisme et au meurtre, et a créé un cycle infernal qu’il est difficile de briser sans procéder à une révision totale de la position vis-à-vis de la Syrie et de la grille de lecture pour l’ajuster afin qu’elle serve les intérêts de la stabilité en Europe.
Un an est passé et les différents pays occidentaux rivalisent pour réserver le meilleur accueil aux Frères musulmans, sur les flancs duquel poussent des groupes plus extrémistes les uns que les autres, qui ont provoqué des bains de sang et attiré comme un aimant Al-Qaïda et consorts.
Une fois de plus, l’Occident paye de sa propre sécurité le prix de ce partenariat, de cette malédiction. L’Arabie saoudite et le Qatar, les deux « alliés intimes » de Nicolas Sarkozy, accordent abri et soutien au commandement des Frères musulmans, qui jouissent de l’appui de l’institution religieuse.
Il y a 20 ans, des voix sages sont apparues en Europe, appelant à faire la distinction entre les mouvements islamistes nationaux qui résistent à Israël et les groupes terroristes et takfiristes, basés sur le principe de l’élimination de l’autre en l’assassinant. Toutefois, les élites dirigeantes européennes, soumises à l’hégémonie américaine, ont fait taire ces voix et leur ont tourné le dos sous la pression des lobbys sionistes. Ces mouvements de résistance anti-israéliens ont été encerclés, traqués, interdits en Europe, leurs associations dissoutes, leurs sympathisants harcelés.
En contrepartie, le commandement des Frères musulmans et d’autres groupes extrémistes ont trouvé les portes des capitales européennes grandes ouvertes et ont pu endoctriner et recruter dans les rangs des communautés musulmanes du Vieux continent.
L’année dernière, les gouvernements européens ont considérablement augmenté les facilités accordées à ces mouvements sous couvert dudit printemps arabe, et grâce aux « services » offerts par ces mouvements pour l’occupation et le pillage de la Libye, pour protéger Camp David et pour normaliser les relations entre la Tunisie et l’État hébreu. Le soutien européen en général, franco-britannique en particulier, s’est concentré à tous ces groupes extrémistes et sanglants qui ont mis la Syrie à feu et à sang pour tenter de démanteler l’État national laïque syrien.
Les Européens autorisent la diffusion dans leurs pays de chaines satellitaires prônant la haine, le racisme, l’exclusion religieuse, les appels au meurtre et les incitation aux massacres à caractère sectaire, comme la chaine Al-Wissal, qui héberge le cheikh extrémiste Adnane Arour, qui a appelé au meurtre du tiers des Syriens. En revanche, les chaines Al-Manar du Hezbollah, Al-Aqsa du Hamas et d’autres télévisions appartenant à des mouvements anti-israéliens, sont interdites, car elles prônent la résistance, comme le faisait Charles de Gaulle via Radio Londres, en 1942.
La « malédiction syrienne » va hanter tous les gouvernements européens qui ont choisi de se compromettre avec les extrémistes au prix de torrents de sang versé en Syrie.
La tendance en Syrie
Baroud de déshonneur pour les « ennemis de la Syrie »
Les « Amis de la Syrie », réunis dimanche à Istanbul, ont reconnu le Conseil national syrien (CNS) formé par l’opposition comme « représentant légitime du peuple syrien ». Les délégués de 33 États et autant d’organisations ont en outre invité l’émissaire Kofi Annan, à fixer un calendrier de mesures à prendre en cas de non-application de son plan de paix, accepté par Damas mais ignoré jusqu’à présent par « les oppositions » syriennes.
Cette contre-attaque des ennemis de la Syrie vise à rééquilibrer une situation politico-diplomatique en faveur du pouvoir syrien. D’ailleurs, Damas estime avoir passé avec succès un cap difficile, puisque ni la Ligue ni le plan de l’Onu ne demandent le départ du régime ou de son président. Les partisans du régime considèrent aussi avoir marqué un point important en remportant des succès décisifs sur le terrain, en détruisant notamment la chambre d’opérations installée par les insurgés à Baba Amr, à Homs.
De plus, le pouvoir syrien considère que la déclaration présidentielle du Conseil de sécurité, adoptée le 21 mars, est dans son intérêt car elle réclame l’arrêt des violences de la part de toutes les parties, reconnaissant ainsi implicitement que l’opposition commet elle aussi des actes de violence. De plus, le régime a remporté des victoires militaires en montrant qu’il contrôle pratiquement le terrain dans les grandes villes. Mais il doit encore faire face à deux problèmes importants, la sécurité et l’économie. Aussi, a-t-il choisi d’affronter ces nouvelles réalités en prenant une double décision. D’abord, il compte restructurer ses services de sécurité en les unifiant dans le cadre d’un Conseil national de sécurité. Ensuite, il cherche à imposer un contrôle strict de toutes ses frontières, avec la Jordanie, la Turquie, l’Irak et le Liban, pour mettre un terme au passage des armes et des combattants. C’est d’ailleurs la raison pour laquelle il entreprend désormais des opérations le long des frontières libanaises.
C’est donc à partir de ces nouvelles données que le président syrien a annoncé qu’il acceptait le plan d’Annan, mais il a toutefois exprimé son refus de permettre à ce plan de consacrer des lignes de démarcation dans le pays. Ce qui signifie qu’il continuera à pourchasser les terroristes partout où ils se trouvent. Il n y aura pas de sanctuaires pour les groupes armés.
Déclarations et prises de positions
Sayyed Hassan Nasrallah, secrétaire général du Hezbollah
« Les Israéliens souhaiteraient que la Palestine soit effacée des mémoires et tombe dans l’oubli. Ils ont tout fait dans ce but, cherchant à pousser ses fils au désespoir, pour qu’ils acceptent le fait accompli et renoncent à la lutte. Mais ils ont échoué, puisque la Journée de la terre continue d’être célébrée, alors que la lutte continue. Une partie des Libanais et des Palestiniens aidés par l’Iran ont réussi à remporter des victoires historiques sur les Israéliens au Liban et à Gaza. En Syrie, de nouvelles données sont apparues qui montrent le recul, sinon la disparition, de l’option de l’intervention militaire étrangère en Syrie et de l’armement de l’opposition. Il est aussi devenu clair qu’il est impossible de faire chuter le régime syrien par les voies militaires, alors que la mission Annan propose une solution politique. Une telle solution repose sur deux constantes : le dialogue entre le régime et l’opposition, et les réformes institutionnelles et politiques. Tous ceux qui se disent soucieux de l’intérêt du peuple syrien et de la stabilité dans la région devraient donc pousser vers le dialogue et vers l’adoption de la solution politique. L’opposition peut provoquer des explosions et envoyer des voitures piégées, mais cela ne fait pas chuter le régime. Ce qu’il faut donc, c’est une solution politique, comme nous le réclamions depuis le début. De même, la demande internationale d’un départ du président Assad a reculé. Il s’agit maintenant de chercher à rapprocher les points de vue et à cesser la campagne médiatique visant à pousser les gens à la révolte et à la violence.
Je comprends que le dossier syrien occupe tant de place dans les sommets en raison de l’importance de la Syrie, mais je ne comprends pas comment le sommet arabe peut ne pas évoquer la situation à Bahreïn, qui est un royaume arabe, peuplé d’Arabes et qui vit une véritable tragédie. Mais il est interdit de reconnaître qu’il existe un problème là-bas, sous peine du boycott par certains pays du sommet. Le peuple de Bahreïn a le souffle long et une grande détermination. Il saura remporter une victoire.
Au Liban, à ceux qui attendent les développements en Syrie pour renforcer leur position, je leur conseille de revoir leurs calculs. La direction du vent est désormais connue, même si les choses doivent prendre du temps et que la situation n’est pas celle qui prévalait il y a un an. Il n’est plus nécessaire d’attendre et de perdre ainsi du temps. Nous ne sommes pas d’accord sur le dossier syrien, soit. Chacun a le droit d’exprimer son opinion, même si certains ont été loin dans les attaques personnelles, mais il ne faut plus faire des paris perdants, ni surtout déstabiliser le Liban à cause du dossier syrien. Le gouvernement actuel reste en place, non pas parce que telle est la décision du Hezbollah, mais parce que l’équation politique qui l’a amené au pouvoir est encore valable. Ce ne sont pas les manifestations ni les performances ou l’échec d’un gouvernement qui le font chuter, mais bien les équations politiques. »
Revue de presse
As Safir (Quotidien libanais proche de la majorité, 30 mars 2012)
Ghasseb al-Moukhtar
Le gouvernement libanais a adopté la politique de dissociation de la crise syrienne dans l’espoir de préserver la stabilité sécuritaire et politique au Liban. Mais il n’a pas réussi car certaines forces politiques s’emploient à soutenir l’opposition syrienne politiquement, médiatiquement, financièrement et militairement, sans mesurer les conséquences d’un tel choix, dont la plus dangereuse serait liée au monopole de la décision de paix ou de guerre avec un État voisin frère.
La politique de dissociation a été en œuvre au sein des instances régionales et internationales. Mais sur le terrain, les problèmes sécuritaire, social et humanitaire se sont accumulés en raison de l’affluence des réfugiés syriens. Les autorités libanaises vérifient-elles l’identité de ces réfugiés qui se divisent en trois catégories : les familles contraintes de fuir le pays en, les éléments armés et les personnes blessées.
Selon des sources officielles, des fonds parviennent aux responsables des comités de coordination de l’opposition syrienne ainsi qu’aux hôpitaux pour couvrir les dépenses de traitement des blessés. Toutefois, aucun service de sécurité libanais ne vérifie ces cas, bien que la loi oblige les Forces de sécurité à assumer un rôle à cet égard conformément à la loi. La Sûreté générale, elle, doit enregistrer le nom des réfugiés qui traversent légalement les points de passages et des blessés. Aucune autorité sécuritaire ne relève le nom des personnes arrivées illégalement au Liban. Les divisions politiques internes ont vidé la politique de dissociation de son contenu.