Les guerres de l’Occident : Ces gênants effets pervers.
mars 17, 2013
Nous avons souvent évoqué le déterminisme des engrenages en matière de politique étrangère. C’est-à-dire le néfaste mécanisme qui se déclenche à partir d’une mauvaise décision. A un moment donné, on opte mal et on agit en conséquence. Les événements s’enchaînent et, liés par leur propre logique, créent des situations inextricables. Ce qu’on a mis en branle vous échappe. Le résultat est pire que le problème à résoudre au départ.
Ce processus n’a cessé de se répéter, depuis son initiation en Yougoslavie. Partout, les situations se sont dégradées. En Irak, l’Etat s’est dissous dans un désordre d’affrontements religieux ; en Afghanistan, les talibans ont été renforcés par la haine de l’envahisseur ; en Libye, la prospérité a cédé la place à un chaos de milices et de tribus ; en Egypte et en Tunisie, l’islam s’est adjugé le pouvoir ; en Syrie, on pave la route des fanatiques musulmans ; au Mali, les premiers accrochages laissent prévoir un nouveau bourbier.
A première vue, c’est un délabrement général. Tout au moins, aux yeux de ceux qui croient encore au rôle vertueux de l’Occident, aux interventions humanitaires et aux guerres pour la démocratie. Toutes les interventions se soldent par des échecs. On a dépensé – et on dépense – beaucoup d’énergie, d’argent et de vies humaines pour arriver à l’exact inverse de ce que l’on prétendait obtenir.
Comment ne pas constater cette évidence ? Les politiciens sont-ils stupides à ce point ? Non, bien sûr. Du moins, pas tous. En tous cas, pas ceux aux commandes de l’impérialisme de Wall Street et de la City. Un petit jeu de mots en anglais en dit long sur leur position. Leur bannière officielle, c’est le Fight for God (le combat pour Dieu). Mais les initiales G, O et D sont comme par hasard celles de Gold, Oil et Drugs (l’argent, le pétrole et la drogue). Ironie du sort. Même le langage révèle les vrais objectifs de leur combat.
Tout s’éclaire. La vérité est que le délabrement général, ils s’en foutent complètement. Peu importe la situation politique, peu importent les dégâts, pourvu que le profit, les sources d’énergie et les possibilités de trafic soient garantis. C’est l’essentiel. On a émietté la Yougoslavie en petits Etats dépendants de façon à contrôler la grande voie de communication Europe du nord-Méditerranée-Proche-Orient et on a construit le camp Bondsteel ; on s’est débarrassé de tous les chefs d’Etats qui, comme Saddam Hussein, Kadhafi ou Gbagbo, manifestaient des velléités d’indépendance et, au sein de leurs pays déstabilisés ou détruits, on a soigneusement sécurisé la production pétrolière et gazière ; on a facilité la création d’Etats musulmans “modérés” en Egypte et en Tunisie qu’il sera possible de tenir financièrement en main grâce aux organismes internationaux (BI, FMI, OMC, etc.) ; on s’efforce par tous les moyens de détruire les derniers bastions de résistance que sont la Syrie et l’Iran pour recomposer un Proche-Orient compatible avec le Nouvel ordre mondial.
Tout cela est bien calculé. C’est le noyau dur de la politique anglo-saxonne dans notre partie du monde. Nos gouvernants tricolores s’y conforment docilement dans l’intérêt de nos multinationales, en espérant ramasser quelques miettes dans les partages de butin.
Finalement, la grande arnaque, c’est de faire passer le dur agenda de l’impérialisme pour une libération des peuples. Malheureusement pour les camelots du capital, les habillages ont été quelque peu ratés. L’engrenage des décisions a eu des effets pervers, obligeant le néocolonialisme à dévoiler son vrai visage. Et nos dirigeants (droite et gauche confondues), ne sachant quoi faire dans ces pétrins imprévus fabriqués de toutes pièces – mais toujours fidèles atlantistes – nous ont bloqués dans la guerre américaine, ayant ruiné ou s’étant aliéné tout ce qui pouvait nous soutenir ailleurs dans le monde.
Les “durs” pétroliers et militaires y gagnent. Pas nous.
Louis Dalmas