Pour mieux comprendre le point de vue uniforme de la « presse française »: Qatar : Main basse sur les médias français ?
octobre 11, 2012
par le petit blanquiste
Via son fonds d’investissement Qatar Holding LLC, le Qatar vient de porter à plus de 10% sa participation au capital de l’important groupe média, Lagardère SCA, dont Arnaud Lagardère est le gérant. Le fonds quatari devient ainsi le principal actionnaire du groupe.
Lagardère contrôle un conglomérat de médias dont des canaux de TV (Gulli, June, Mezzo) et des stations radio (Europe 1, Europe 2,Virgin Radio, RFM).
Dans le domaine de l’édition, il est propriétaire de Hachette Livre, Stock, Fayard, Armand Colin, Calmann-Lévy, Grasset, Larousse, Hatier, Astérix, etc.
Avec le groupe Hachette Filipacchi Médias (HFM) – dont il est également propriétaire – Lagardère est le premier éditeur de presse magazine au monde avec plus de 250 titres publiés dans une quarantaine de pays.
En France, HFM contrôle de nombreux titres de la presse magazine : Elle, Paris-Match, Télé 7 jours, etc.
Il détient, en outre, 42% du groupe Marie Claire (Marie Claire,Cosmopolitan, Cuisines et Vins de France, etc.).
Dans la presse, Lagardère contrôle le Journal du Dimanche.
S’il n’est plus actionnaire du journal Le Monde, depuis novembre 2011, il détient encore une participation de 25% au capital du groupe Amaury (L’Equipe, Le Parisien, L’Echo républicain).
En outre, depuis dix ans, via Hachette, Lagardère est représenté, aux côtés de TF1 et de la Caisse d’épargne, dans la Société Humanité Investissements Pluralisme (SHIP) qui détient 20%, du capital de la Société nouvelle du journal L’Humanité (SNJH) éditantL’Humanité, L’Humanité dimanche et La Terre.
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On ne peut évoquer Arnaud Lagardère sans faire état de son amitié avec Nicolas Sarkozy qu’il a qualifié publiquement de « frère » en 2005.
Alain Genestar, directeur de la publication de Paris Match, en fera les frais en 2006. Il sera licencié pour avoir publié en couverture du magazine la photographie de Cécilia Sarkozy – séparée de Sarkozy – en compagnie de son futur mari.
Quant à l’émir du Qatar, Hamad Ben Khalifa al-Thani, dont le pays est le troisième producteur de gaz naturel du monde, il s’intéresse beaucoup à la France. Et la France officielle le lui rend bien.
Son achat de la majorité du capital du PSG est connu. Ce qui l’est moins, c’est que le Qatar a procédé à des acquisitions significatives dans différentes sociétés et dans l’hôtellerie de luxe. En plus de Lagardère SCA, on trouve Vinci, Veolia Environnement, Suez Environnement, Hôtel Raffles à Paris (ex-Royal Monceau), Centre de conférences international de l’avenue Kléber à Paris (futur hôtel Peninsula), Société fermière des casinos de Cannes (casinos, hôtels Majestic et Gray d’Albion à Cannes).
A titre personnel, l’émir possède des propriétés immobilières, dont le célèbre hôtel Lambert sur l’île Saint-Louis à Paris.
En retour, il a obtenu du Parlement français, début 2008, que ses investissements immobiliers ne soient pas imposables sur les plus-values et que les résidents qataris en France ne payent pas l’ISF pendant leurs cinq premières années de présence.
Enfin, le Qatar se caractérise comme un des pays du monde arabe parmi les plus engagés dans les entreprises guerrières de l’Occident en Libye et , maintenant, en Syrie. Ce qui explique ses liens privilégiées avec Nicolas Sarkozy.
Les deux compères…
Il faut aussi savoir que l’émir du Qatar est parvenu au pouvoir après avoir organisé un coup d’Etat contre son propre père en 1996.
Cet « accident de parcours » n’a pas retenu l’attention de la presse française, pas suffisamment, en tout cas, pour qu’elle le qualifie de dictateur.
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On ne saurait terminer sans rappeler cette phrase de Marx :
La « liberté de la presse est la liberté que les capitalistes ont d’acheter des journaux et des journalistes dans l’intérêt de créer une opinion publique favorable à la bourgeoisie ». [2]
[1] Lagardère est aussi actionnaire à 7,5% du groupe aérospatial EADS qui semble-t-il intéresserait beaucoup le Qatar.
[2] Cité par William Ash, Marxism and moral concepts, Monthly Review Press, 1964.
de
Jean-Pierre Dubois