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Prise dans le piège syrien, la Turquie redécouvre le dialogue régional


 
 
Erdogan et Ahmadinejad à Bakou

Menacée d’être entraînée par le conflit syrien qui fait rage à ses portes, la Turquie vient d’opérer un discret changement de pied diplomatique en reprenant langue avec les deux principaux alliés du régime du président Bachar al-Assad, l’Iran et la Russie.
   Ce n’est pas un revirement complet mais le virage est spectaculaire. Après avoir vainement tenté de jouer les médiateurs puis pris le parti de la rébellion contre le régime de Damas et ses soutiens, Ankara semble avoir redécouvert les vertus du dialogue régional.
  Le Premier ministre turc Recep Tayyip Erdogan a lui-même donné la semaine dernière le ton de cet ajustement lors d’une rencontre opportunément médiatisée avec le président iranien Mahmoud Ahmadinejad, à Bakou.
  Après avoir longtemps refusé d’évoquer la question syrienne avec son pays, M. Erdogan a proposé à Téhéran de l’inclure dans un mécanisme de coopération destiné à faire baisser les tensions suscitées par le conflit syrien chez tous ses voisins.
   « Ce mécanisme trilatéral pourrait concerner la Turquie, l’Egypte et l’Iran », a-t-il suggéré, « un autre mécanisme pourrait réunir la Turquie, la Russie et l’Iran, et un  troisième la Turquie, l’Egypte et l’Arabie saoudite ».
   « Il s’agit là d’un changement significatif de la position d’Ankara », a noté l’éditorialiste du quotidien de langue anglaise Hürriyet Daily News, « il y a encore quelque mois, Ankara ne voulait pas entendre parler de discussion sur la Syrie impliquant la Russie ou l’Iran en insistant sur leur soutien inconditionnel au président Assad ».
  Ces dernières semaines, la guerre civile qui ensanglante la Syrie est devenue un souci majeur pour le gouvernement turc. Plus de 100.000 réfugiés syriens ont franchi ses frontières pour fuir les combats et suscitent la grogne d’une partie des populations turques locales.
   Et depuis le bombardement syrien du village d’Akçakale début octobre, l’armée turque est sur le pied de guerre et riposte systématiquement à chaque tir d’obus sur son territoire. Tout le long de leur frontière commune, la tension entre les deux pays est à son comble et a fait ressurgir le spectre d’un débordement du conflit.

Virage diplomatique contraint 

Sans surprise, l’opposition turque a vu dans cette poussée de fièvre l’échec de la diplomatie turque dans cette affaire et accuse ouvertement le gouvernement islamo-conservateur de vouloir précipiter le pays dans une guerre à laquelle une très large majorité de Turcs est farouchement opposée.
Autant de raisons qui ont contraint les autorités d’Ankara à chercher l’apaisement. « Si, d’un côté, la Turquie poursuit sa politique de confrontation avec la Syrie, de l’autre elle souhaite aussi s’impliquer dans les efforts de paix », résume l’éditorialiste du quotidien libéral Milliyet Sami Kohen.
  

Officiellement, il n’est pas question de virage politique. La Turquie n’a « jamais » écarté les initiatives régionales, assure à l’AFP un diplomate turc, rappelant son soutien à un « quartet » de négociateurs réunissant Le Caire, Ankara, Téhéran et Ryad.
N’empêche. Longtemps à couteaux tirés, la Turquie et l’Iran font désormais cause commune pour soutenir l’appel au cessez-le-feu lancé par le médiateur Lakhdar Brahimi. De même, Ankara et Moscou ont repris des contacts actifs et tout fait pour minimiser l’incident provoqué par l’interception d’un avion civil syrien accusé par Ankara de transmettre du matériel militaire qui n’a jamais été montré.
 Reste à déterminer l’efficacité de cette nouvelle version de la politique dite de « zéro problème avec mes voisins ». Théorisée par le ministre des Affaires étrangères Ahmet Davutoglu, elle semblait définitivement enterrée par la crise syrienne.
« La Turquie est désespérée depuis dix-neuf mois », estime l’expert Soli Ozel, de l’université Bilgi d’Istanbul. « Elle n’est pas assez forte pour peser sur la situation en Syrie, pour convaincre les alliés de la Syrie (de trouver une solution), ni pour convaincre ses propres alliés de la soutenir », diagnostique M. Ozel.
 « Je pense que les responsables turcs sont en train de redécouvrir les avantages du +aucun problème avec mes voisins+ », juge lui aussi un diplomate occidental, « ils ont compris que la Turquie n’était pas seule et que, même si elle était une puissance, elle ne pouvait pas se passer d’amis ».

Source: AFP

 

 

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