Un habitant de la ville d’Alep dit sa douleur et sa lassitude face aux mensonges colportés par les médias .
avril 11, 2013
Résignation et lassitude résument assez bien l’état d’esprit actuel des habitants d’Alep.
En effet, les Alépins se sont résignés :
A voir leur ville coupée en deux parties avec l’afflux de centaines de milliers de déplacés qui ont envahi les zones « sûres », sans se lamenter. (Et le flux continue : des petites camionnettes pleines de gens et quelques meubles et matelas circulent dans les rues à la recherche d’un abri)
A entendre le bruit assourdissant des rafales de mitrailleuses et des tirs de canons, sans broncher et des avions, sans lever la tête.
A vivre constamment sous la menace d’obus de mortier qui tombent n’ importe où, de tirs de snippers qui tuent n’importe qui et de voitures piégées qui explosent n’importe quand, sans avoir peur.
A être des cibles de kidnappings qui ont lieu quotidiennement, sans se cacher.
A être privés du courant électrique et de l’eau courante (2 à 4 heures par jour seulement), du téléphone portable et de l’internet (réseau très fantaisiste), et du téléphone fixe (coupures fréquentes), sans se plaindre.
A subir des embouteillages monstres sur le peu de routes encore ouvertes dans les quartiers « sûrs » (la plupart des autres routes et rues étant fermées à la circulation pour cause de sécurité), et à devoir souvent rentrer chez eux à pied parce que les routes conduisant à leurs quartiers ont été fermé par des milices, sans rouspéter. (Nous avons vu des jeunes porter leur vieux père ou grand père sur le dos et monter a Cheikh Maksoud !)
A rentrer chez eux dès le coucher du soleil (18 h maintenant) et n’en sortir que le matin, transformant Alep en ville-fantôme, sans pouvoir se divertir.
A voir tous les trottoirs envahis par des étals et des marchands ambulants qui vendent n’importe quoi pour pouvoir survivre, sans se plaindre que leur ville soit devenue un grand village.
A croiser, tous les jours, la pauvreté et de plus en plus de mendiants dans les rues sans se révolter.
A constater que l’économie est complètement ruinée, les usines démantelées et volées et les commerces brûlés sans désespérer. Et, de plus, ils sont las :
Las de ne pas apercevoir un brin de solution à des événements qui durent en Syrie depuis 2 ans (15 mars 2011) et à Alep depuis 8 mois (23 juillet 2012).
Las de voir la Syrie, nommée « berceau de la civilisation » par la communauté internationale et Alep, la plus ancienne ville toujours habitée du monde, détruites, leurs trésors archéologiques volés, leur tissu social effiloché, la sécurité, qui y régnait et que les autres nous enviaient, disparue, et la coexistence entre les différentes communautés du pays et la tolérance remplacées par un fanatisme religieux importé.
Las de devoir démentir tous les mensonges colportés par les medias étrangers.
Las de voir les grandes puissances proposer une solution négociée entre les deux parties tout en récusant l’une d’elle et de décider d’armer une partie en « armes défensives et non-létales » comme si ces dernières pouvaient exister.
Malgré ce contexte assez sombre, nous, « les Maristes Bleus » continuons trois écoles de Cheikh Maksoud. Nous y allons quotidiennement passer la journée avec eux pour accompagner les mères, divertir, éduquer et instruire les enfants (projet : I learn), distribuer les denrées pour le petit déjeuner et le souper, apporter chaque jour un repas chaud à midi, soigner les malades, nous occuper de l’hygiène et de l’état sanitaire, sans oublier le lait pour les enfants et les nourrissons ainsi que les couches. Des vêtements et des chaussures sont donnés à l’occasion. Depuis 2 semaines, le repas de midi que nous distribuons tous les jours aux déplacés dont nous avons la charge nous est fourni gratuitement par une association caritative musulmane « Al Ihssan » qui prépare dans ses locaux des dizaines de milliers de repas par jour pour les déplacés des écoles. A l’occasion de la fête des Mères, que nous célébrons en Syrie le 21 Mars, nous avons organisé, avec leurs enfants, une fête pour les Mamans déplacées.
Nous poursuivons toujours notre projet « le Panier de la Montagne » qui consiste à fournir un panier alimentaire mensuel aux chrétiens du quartier de Cheikh Maksoud qui sont sans ressources à cause des événements. Ils sont 300 familles. Mercredi 27, aura lieu la distribution du 8ème panier mensuel et, à cette occasion, chaque famille recevra aussi un kilo de viande pour que Pâques soit aussi une fête.
Nous n’oublions pas non plus les familles démunies qui habitent ailleurs que le quartier de Cheikh Maksoud et que nous soutenons depuis 25 ans dans le cadre de notre association « l’Oreille de Dieu ».
Récemment, nous, Les Maristes, avons pris l’initiative de proposer une réunion à toutes les associations caritatives qui portent secours aux chrétiens démunis d’Alep. Les responsables des 13 associations se sont rencontrés deux fois pour se connaître et pour coordonner leur action, recouper leurs listes, et harmoniser les secours.
Dans notre quotidien de plus en plus difficile, nous sommes consolés par plusieurs lueurs d’espoir et d’Espérance :
Nos bénévoles continuent leur engagement avec nous malgré qu’il soit devenu de plus en plus périlleux d’aller à Cheikh Maksoud, les accès sont parfois bloqués, des obus y tombent souvent et des snippers font parfois des victimes.
Les Syriens dans leur majorité refusent la violence et aspirent à l’arrêt des hostilités et à retrouver le climat fraternel d’autrefois.
Nous sommes émerveillés par ce réseau de solidarité qui s’est tissé autour de nous tant au niveau local que national ou international. Nous ne pouvons assez remercier tous ceux qui, par des pensées, des messages ou des dons nous ont manifesté leur amitié, leur solidarité et leur amour.
Pour terminer, et à l’occasion de l’élection du pape François, nous voulons partager avec vous cette prière de St François d’Assise :
Seigneur, faites de moi un instrument de votre Paix !
Là où il y a de la haine, que je mette l’amour.
Là où il y a l’offense, que je mette le pardon.
Là où il y a la discorde, que je mette l’union.
Là où il y a l’erreur, que je mette la vérité.
Là où il y a le doute, que je mette la foi.
Là où il y a le désespoir, que je mette l’espérance.
Là où il y a les ténèbres, que je mette votre lumière.
Là où il y a la tristesse, que je mette la joie.
O maître, que je ne cherche pas tant
A être consolé……..qu’à consoler ;
A être compris……..qu’à comprendre ;
A être aimé…………..qu’à aimer ;
Car :
C’est en donnant…..qu’on reçoit ;
C’est en s’oubliant…..qu’on trouve ;
C’est en pardonnant…..qu’on est pardonné ;
C’est en mourant….qu’on ressuscite à la vie éternelle
A l’occasion de Pâques, nous voulons vous dire que nous croyons en l’Espérance chrétienne, sans quoi, la foi n’est que paroles et la charité n’est qu’aumône. Nous croyons que la lumière jaillira des ténèbres et qu’après la mort il y a la résurrection et la vie.
Bonnes Pâques
Christos Anesti
Pour « les Maristes Bleus » (*)