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Irak : Pas de justice en vue pour les victimes des crimes de guerre britanniques


Irak : Pas de justice en vue pour les victimes des crimes de guerre britanniques

Publié par Gilles Munier
19 Novembre 2014, 07:24am

Par Jonathan Owen (revue de presse : extrait – The Independent on Sunday, 9/11/14 repris par The Star, Afrique du sud, 11/11/14)*

« … il faudrait 47 ans et demi pour conclure 53 cas de morts illégitimes et 95 cas de mauvais traitements » !

Les victimes et les familles des personnes assassinées, violées ou torturées par des soldats britanniques en Irak devront peut-être attendre des dizaines d’années avant que l’Iraq Historic Allegations Team (Ihat) – Groupe sur les Allégations Historiques en Irak – achève son travail même si des officiels assurent que certains cas s’apparentent à des « crimes de guerre ».

Le Groupe doté d’un personnel insuffisant, en retard de plusieurs années sur son planning, n’aura certainement pas terminé ses investigations pour 2016 selon le document mis à la disposition de The Independent. Sur la base du travail accompli à ce jour, il faudrait 50 ans pour faire la lumière sur les accusations, sachant que les interviews prendraient à eux seuls 18 ans.

La Grande-Bretagne est de plus en plus sous le feu d’accusations pour crimes de guerre en Irak, suite à la visite en juin à Ihat d’une délégation de la Cour Pénale de Justice pour une enquête préliminaire sur le dossier déposé par les Public Interest Lawyers (Avocats pour l’Intérêt Public) et du European Center for Constitutional and Human Rights (Centre Européen pour les Droits Constitutionnels et Humains).

L’enquête a pris énormément de retard même si le Secrétaire à la Défense, Michael Fallon, a approuvé une augmentation substantielle du budget d’Ihat en juillet dernier, de 33,2 à 57,2 millions de livres sur une période de trois ans se terminant en 2019. Depuis sa fondation par le Ministère de la Défense, en 2010, Ihat a seulement conduit quatre enquêtes sur des allégations de mort non justifiée et quatre sur des mauvais traitements. A ce rythme, il faudrait 47 ans et demi pour conclure 53 cas de morts illégitimes et 95 cas de mauvais traitements.

Le porte-parole d’Ihat explique que « L’énormité de la tâche est unique mais un calcul basé simplement sur le nombre de cas conclus jusqu’à présent est inexact et trompeur. Il est important de souligner que ce sont des enquêtes criminelles que nous nous sommes engagés à conduire de manière professionnelle et efficace. ».

Certes, une petite douzaine d’officiers de police traite les cas décrits par Ihat comme des « enquêtes criminelles », et la majorité des 136 membres d’Ihat est des « enquêteurs civils ». Parmi la liste des cas, 15 se réfèrent à des accusations pour meurtres d’Irakiens « détenus par les forces britanniques ». Selon Ihat, « Parmi ces détenus, sept ont perdu la vie dans un camp britannique. 8 ont apparemment été tués durant ou peu après être entrés en contact avec les Britanniques ou lors de leur détention ». Ihat est soumis à une pression constante et croissante depuis quelques mois à mesure que d’autres accusations pour meurtres et abus de femmes, d’enfants et d’hommes se manifestent, portant le nombre à 182 pour « meurtres sans fondement » et 60 pour viols et coups et blessures. Un porte-parole d’Ihat a confirmé que ces cas avaient été transmis à la Cour Pénale car ils pourraient être considérés comme « crimes de guerre ». (…)

Aucun individu n’a été inculpé mais selon Ihat deux affaires seulement ont été transmises aux services du Procureur Général pour déterminer si les individus concernés devaient être inculpés. Pour Phil Shiner, avocat des familles irakiennes des victimes, la procédure d’interrogation ne sera pas terminée avant 2032. Carla Ferstman, directeur de l’organisation des droits humains, Redress, est d’avis que « Ihat a véritablement besoin de dynamiser ses opérations s’il veut être dans les temps pour respecter les obligations de la Grande-Bretagne. Les victimes, en majorité, ont eu le sentiment que la Grande-Bretagne n’était pas sérieuse ; c’est pourquoi elles se sont rapprochées de la Cour pénale pour qu’elle enquête. C’est extraordinaire que l’intervention de la Cour dans le cadre d’une simple enquête préliminaire n’ait pas galvanisé le gouvernement pour enquêter plus urgemment et poursuivre en justice les cas où la preuve de la criminalité est concluante ».

Sept soldats britanniques doivent cette semaine témoigner au cours d’audiences devant l’ancien magistrat de la Haute Cour, Sir George Newman, sur la mort de deux civils irakiens en 2003. Sir George conduit la première série d’enquêtes sur la mort de civils pendant la guerre en Irak en 2003 après que les magistrats de cette Cour eurent jugé l’an dernier « qu’une nouvelle approche » était nécessaire dans les procès où aucune accusation n’avait été formulée ou où la procédure avait été interrompue.

Photo : Arrestation de résistants irakiens par les troupes britanniques

Traduction et Synthèse : Xavière Jardez

*Version originale: No justice in sight for Iraqi victims of alleged murder, rape, and torture

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