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Midi Presse, Midi Libre, Jihadistes et Lunel, indifférence et mépris pour ces Syriens qu’on ignore y compris


Midi Presse, Midi Libre, Jihadistes et Lunel, indifférence et mépris pour ces Syriens qu’on ignore y compris

simone lafleuriel-zakri
oct 24 2014

Âgés entre 19 et 30 ans, ils étaient partis depuis plusieurs mois. Leurs familles ont reçu un simple coup de fil.

C’est un coup de fil qui est venu annoncer la nouvelle à chaque famille. Trois jeunes de Lunel, dans l’Hérault, sont morts lors d’un bombardement de l’armée syrienne, le week-end dernier en Syrie, non loin de la frontière avec le Liban. Un quatrième est décédé quelques jours plus tard, des suites de ses très graves blessures. Ces quatre garçons, âgés entre 19 et 30 ans, étaient partis pour certains depuis près d’un an, quelques mois pour un autre, avec la volonté d’accomplir le Jihad en Syrie. Trois d’entre eux sont issus de familles de confession musulmane (deux sont de la même famille), le dernier était, par contre, converti. Tous leurs proches sont aujourd’hui anéantis, oscillant entre douleur et colère. Et ne sachant pas s’ils pourront, un jour, enterrer les corps des disparus.
Des femmes et des enfants coincés sur place

Sur les pages Facebook de certains des jeunes, on peut encore voir des photos où ils posent tout sourire ou armes à la main, en tenue de jihadiste. Mais ce sont désormais leurs compagnes qui envoient des nouvelles du terrain de guerre. Ces jeunes faisaient en effet partie d’un groupe de Lunellois, partis ensemble ou rejoints sur place. Certains étant mariés et pères de famille. Des jeunes Lunelloises se trouvent ainsi toujours en Syrie, avec parfois des bébés. L’une d’elle, déjà mère et enceinte, chercherait un moyen pour revenir en France. Pendant ce temps, à Lunel, la nouvelle a fait l’effet d’une déflagration sourde. Mêlant honte et colère, silence et discussions très animées. Il y a ceux, consternés, qui ne comprennent pas comment des jeunes qui, il y a quelques mois, « sortaient en boîte, avaient des copines, comme tous les jeunes de Lunel », raconte un proche, ont pu terminer ainsi leur vie.
Lunel, entre silence et douleur
La nouvelle s’est répandue peu à peu dans Lunel. Par le bouche-à-oreille. Après la prière aux morts prononcée à la mosquée lundi soir. Depuis, c’est une ambiance à la fois lourde et électrique qui pèse un peu partout. Avec une multitude de discussions. En particulier entre les jeunes, laissés libres par la survenue des vacances scolaires et qui se regroupent pour en parler.  » Au moins, cela suscite le débat « , indique un adulte, qui suit cette annonce de près et préfère pouvoir discuter avec les jeunes plutôt qu’ils s’emmurent dans le silence ou tombent eux aussi sur de mauvaises personnes. Si la parole se libère partout en ville, les familles, écrasées de douleur, ne souhaitent, par contre, pas du tout s’exprimer. Refusant même, pour certaines, que l’on évoque ce qui s’est passé. Demandant aussi que l’on respecte leur deuil. Une dernière criant enfin sa colère contre  » ces barbus bien tranquilles assis chez eux  » qui ont envoyé un frère ou un cousin à la mort.

D’autres, au contraire, les admirent. « On m’a raconté que sa femme l’a vu et qu’il avait un sourire heureux sur le visage, mort », a entendu une jeune Lunelloise, qui, comme la totalité des nombreux interlocuteurs joints ou rencontrés, tient à garder l’anonymat. Une autre rumeur – elle aussi invérifiable – circule enfin sur le départ de nouveaux jeunes, décidés à les rejoindre après l’annonce de leur mort. Ce qui est sûr, par contre, c’est que lundi 20 octobre au soir, la prière due aux morts a été prononcée à la mosquée de Lunel, après l’annonce des décès (une prière dite pour tous, quelle que soit la circonstance de la disparition, NDLR). Restent un grand malaise, qui règne dans toutes les discussions, et de nombreuses questions.
Une filière à Lunel ?

Sur la filière qui, à Lunel, a permis à autant de jeunes de partir ensemble en Syrie. Même s’il est difficile de connaître leur chiffre exact, ils seraient en effet une quinzaine à avoir fait le voyage pour prendre les armes. Sur la radicalisation de ces garçons qui, pour trois d’entre eux, étaient « des jeunes qui galèrent ». Ils auraient brutalement changé de comportement, provoquant l’incompréhension d’une grande partie de leur famille. « On les connaît depuis gamins. D’une certaine façon, on se sent coupable… », lâche un adulte, qui craint que ces décès et la grande complexité du contexte qui les entoure n’attisent les haines et les postures caricaturales, au lieu de provoquer une prise de conscience salvatrice. « Certains ne comprennent pas qu’ils sont allés se battre contre des musulmans, comme eux. »

Mais tous restent assommés, désormais, du résultat : quatre jeunes morts dans des conditions atroces. Des familles dévastées. Des femmes et des enfants coincés dans une guerre où ils sont allés se jeter volontairement. Et avec derrière une inquiétude, sourde, pour les autres Lunellois partis, dont leurs amis sont actuellement sans nouvelles.

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